La main crispée sur mon téléphone, je m'astreignais à poursuivre ma progression. Surtout ne pas tomber, ne pas casser le rythme. Peut-être n'attendait-il que ça pour me sauter dessus. Un faux pas la chute et je finirais comme ce pauvre homme. Non, non. Ne pas penser à cela. Ne pas paniquer. Comme un mantra je me répétais cette phrase en boucle dans ma tête : ne pas paniquer. Tant que la bête ne bougeait pas, je pouvais le faire. Les yeux me brûlaient à force de la scruter sans interruption, mais je refusais de fermer les paupières ne serait ce qu'une microseconde. Intuitivement, je sentais qu'il fallait ne surtout pas couper la connexion. Sans me l'expliquer, j'avais cette certitude et je préférais suivre mon instinct et tenter de survivre à cette rencontre.
Le mur obliquait à angle droit. Restait à opérer un quart de tour, un virage avant de rompre le visuel. Ma respiration s'accéléra, mes mâchoires se crispèrent sous la tension, mes muscles se préparèrent à l'effort. Tourner puis piquer un sprint. C'était ça le plan. Pas très élaboré, je l'accorde, mais c'était tout ce que mon cerveau avait pu pondre dans cet état de stress intense. J'étais dans la ruelle adjacente. Mes pieds décollèrent du sol puis je m'élançais, le cœur battant follement, à grandes embardées, le son de mes chaussures claquant sur le macadam résonnant dans le silence, à tel point que je me demandais pourquoi personne ne se réveillait dans la rue avec le boucan que je faisais. Les oreilles grandes ouvertes, aux aguets, je m'attendais à entendre les pas de la bête sur mes talons, mais rien de tel. À moins que celle-ci se déplace tel un spectre, sans faire le moindre bruit, furtif et mortel.
J'osais un coup d'œil. Rien. Encore sonnée, je me dirigeais vers le centre-ville et la prochaine station de bus, tout cela en mode automatique, incapable d'effacer l'image du loup m'ayant fait face, les oreilles résonnant encore des bruits sanglants enregistrés.
Enfin, le bus. Le trajet me permit de me ressaisir en partie. Une fois à l'intérieur de ma chambre universitaire, je me glissais toute habillée dans le lit, m'enfouissant sous les couvertures, redoutant par avance les cauchemars m'attendant à l'orée du sommeil. Je ne me trompais pas.
Un coussin m'arracha de mon sommeil agité. Je grognais contre ma colocataire. Cassie aimait me taquiner. D'ordinaire, je ne me formalisais pas de ces plaisanteries, mais au vu de ma nuit plus que riche en rebondissements, je n'étais pas d'humeur pour un réveil de ce type. Les cauchemars avaient été plus que perturbants, un mélange de l'Accident de mes seize ans et de la scène vécue la veille. Je frissonnais rétrospectivement.
— Alors coloc ? J'ai à peine dormi pourtant c'est toi qui as une tête à faire peur.
— Merci du compliment, marmonnais-je en m'extirpant avec lenteur de ma couette. La fin de soirée s'est bien passée ?
— Hum hum.
En avisant son grand sourire et sa bonne humeur matinale, j'eus ma réponse. Apparemment, j'avais pris la bonne décision en les laissant terminer la fête là-bas. Même si je ne pouvais en dire autant de mon côté.
— Ethan et toi..., dis-je tout en laissant volontairement ma phrase en suspens.
Elle se mordilla la lèvre et hocha la tête, les yeux brillants. Je bondis de mon lit et l'enlaçais, heureuse pour elle.
— Merci, mademoiselle l'entremetteuse, plaisanta-t-elle en me rendant mon étreinte. Je compte bien te renvoyer l'ascenseur avec ton inconnu. Je vais déjà me renseigner sur son petit nom avant...
— Arenht, murmurais-je assez fort pour qu'elle l'entende.
Prononcer son nom à voix haute fit palpiter mon cœur plus fort, ravivant le souvenir de son bras autour de moi.
— Arenht, hein ? Petite cachottière.
— J'ai juste entendu quelqu'un l'interpeller, l'arrêtais-je de suite. Pas de quoi te faire des films.
— Bon, c'est un point de départ. Ce n'est pas un prénom courant en plus. Reste à savoir quel parcours il suit.
J'allais me préparer un thé tout en la laissant préparer son plan à haute voix. J'avais envie de le revoir tout en redoutant la conduite à tenir après son intervention à la discothèque. J'avais beau dire à Cassie de ne pas se faire de films, je ne pouvais m'empêcher mon esprit de vagabonder vers lui, Arenht.
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Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]
ParanormalA 16 ans, j'ai échappé à une agression. Pour dépasser ce traumatisme, mes parents ont pris la décision de déménager. Aujourd'hui, je m'apprête à entrer à la fac. Un nouveau pas vers la normalité après m'être repliée sur moi-même. Pourtant rien n'es...