Une sueur froide me dégoulinait dans le dos, j'en sentais la lente descente sur ma peau brûlante, millimètre par millimètre. Les sons environnants m'emplissaient les oreilles, mes yeux percevaient le moindre détail des feuilles mortes écrasées dans la paume de mes mains malgré la pénombre, les odeurs s'engouffraient dans mes narines. Tout m'apparaissait plus net, plus vivant. Mon esprit troublé par la peur butait face à cet assaut d'informations. Puis une branche morte craqua à quelques mètres à peine de ma position. Ce fut comme un signal. Avant d'en avoir conscience, j'étais debout et fonçais tête baissée, droit devant moi. Fuir. Les branches basses sifflaient à mes oreilles, mais je les esquivais avec une étrange facilité, mes foulées rapides dérangeant à peine le tapis de feuilles mortes. Je ne m'attardais pas sur ces phénomènes étranges, une seule pensée tournant en boucle dans ma tête : les semer. Je risquais un coup d'œil par-dessus mon épaule. Mauvaise idée.
Soudain le choc, impact qui me projeta violemment à terre. L'air se bloqua dans mes poumons avant d'être rejeté quand je touchais le sol terreux. Je sentis les cailloux s'enfoncer douloureusement dans ma chair. Des mains calleuses agrippèrent mes poignets avant de me tordre les bras derrière le dos. Encore sonnée, je me débattis pourtant, la sensation de leurs mains sur moi me donnant la nausée. Des flashs de mes cauchemars éclatèrent dans mon cerveau alors que l'odeur de tabac froid me parvenait. C'était bien eux, les mêmes hommes que seize ans auparavant.
— Fais gaffe c'est la pleine lune ce soir, lança-t-il à son acolyte.
Ces paroles me firent froncer les sourcils. Qu'est-ce que la lune avait à voir dans tout ça ? On me releva sans ménagement et avant d'avoir pu reprendre mes esprits, on me banda les yeux puis je sentis la morsure d'une aiguille transpercer la peau sensible de mon cou. Je tentais une nouvelle fois de me débattre, mais mes membres semblaient aussi lourds que du plomb. Mes pensées ralentirent, se brouillèrent.
Une odeur désagréable chatouilla mes narines, mélange de produits chimiques et de relents de moisissures. Je fronçais le nez et ouvris les yeux. Je cillais sous la lumière violente qui agressait mes pupilles. Après plusieurs tentatives, je réussis à faire le point. Ma tête semblait sur le point d'éclater. Levant la main pour l'appuyer sur mes tempes douloureuses, je découvris que celles-ci étaient entravées, m'empêchant tout mouvement. Clignant des yeux pour m'habituer à la clarté froide des néons, je découvris que j'étais allongée sur une planche d'acier, version clinique douteuse, et solidement attachée à celle-ci à l'aide de grossières ceintures en cuir doublées de métal qui me sciaient la peau.
Des aiguilles. Mon souffle se bloqua.
Plantées dans mes bras, reliées à des perfusions. Chaque détail me percutait avec force alors même que la peur enserrait ma gorge dans un étau. Bleu. Le contenu de la poche suspendue à un crochet en métal était d'un bleu opaque et s'écoulait en moi. Je me crispais puis m'agitais pour tenter de libérer mes mains. Je devais les enlever.
Les liens métalliques cliquetèrent contre la table, autant d'éclats sonores me martelant les tympans. Je cherchais mon souffle alors qu'un filtre rouge obscurcissait soudain mon champ de vision. Elle m'avait finalement rattrapée, mise en branle par tous ces stimuli particuliers. Un cocktail regroupant chaque élément déclencheur de mes crises : sentiment de danger, oppression, aiguilles et... La tête me tournait alors que chaque pièce du puzzle se mettait en place : ils m'avaient retrouvé, j'étais à leur merci pour Dieu sait quelle raison tordue. Des frissons me parcoururent l'échine avant de s'étendre à tout mon corps. Des tremblements me secouèrent alors que je luttais toujours pour aspirer un souffle d'air. La machine à laquelle j'étais reliée se mit à émettre des bips aigus.
Nauséeuse, je n'avais plus de repères, mon esprit à la dérive. Cette crise de panique dépassait en puissance toutes celles subies depuis le traumatisme et je n'étais pas certaine d'en sortir indemne. Je lâchais prise alors que des martèlements de pieds résonnaient dans la pièce, vite rejoints par des éclats de voix.
—...resserre un peu au cas où.
— Elle nous a fait quoi ?
—... crise...
Leurs paroles me parvenaient par intermittence, fragments de phrases dont le sens s'évaporait avant d'atteindre mon cerveau. Mes yeux roulaient de droite à gauche, cherchant une aide providentielle. Les chaînes s'enfoncèrent dans mes poignets alors qu'ils les resserraient, bridant davantage mes mouvements. Je ne cessais de me débattre pourtant, réaction primitive et animale de survie. Une vive douleur irradia dans mon cou. je me figeais net. La dose m'assomma quasi aussitôt, m'envoyant au tapis.
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Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]
ParanormalA 16 ans, j'ai échappé à une agression. Pour dépasser ce traumatisme, mes parents ont pris la décision de déménager. Aujourd'hui, je m'apprête à entrer à la fac. Un nouveau pas vers la normalité après m'être repliée sur moi-même. Pourtant rien n'es...