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Lundi, 8h30

Deux jours sont passés depuis l'épisode avec Kaïs. Deux jours où j'ai essayé de reprendre mon souffle, de remettre un peu d'ordre dans mon esprit chamboulé. Mes hématomes sont toujours là, cachés sous des couches de maquillage que j'applique minutieusement chaque matin. Kaïs continue de m'appeler, de m'envoyer des messages. Ses mots oscillent entre le doux et le cruel, entre des déclarations d'amour étouffantes et des menaces voilées qui me glacent le sang.

Est-ce que je réponds à ses appels ? Bien sûr. Parce que je sais que l'ignorer ne ferait qu'attiser sa colère, et Dieu sait ce qu'il pourrait faire si je l'énervais. Ce qu'il a fait cette fois-ci était déjà terrible, alors la prochaine fois... Qu'est-ce que ce sera ? La morgue ? Ou pire encore... Le viol ?

Je sens mon estomac se nouer à cette pensée. Je suis encore vierge, à 22 ans. Non pas par manque d'opportunités, mais par choix. J'ai toujours voulu que cette première fois soit avec quelqu'un que j'aimerai réellement, quelqu'un avec qui je me sentirais en sécurité. Mais Kaïs menace souvent de me priver de ce choix. Je frémis d'horreur à l'idée de ce qu'il pourrait me faire.

Beaucoup me conseilleraient de parler, de dire tout ça à ma famille. Mais ils ne comprennent pas. Kaïs est malin, dangereux. Il n'hésiterait pas une seconde à s'en prendre à eux, surtout à ma mère, et ça, je ne pourrais jamais le supporter. La police ? Inutile. Son père a de l'argent, des relations. Avec quelques billets, il pourrait acheter le silence de n'importe qui. Et après, Kaïs reviendrait, plus enragé que jamais, et ma vie deviendrait un véritable enfer.

Je secoue la tête, chassant ces pensées sombres. Passons.

Aujourd'hui, c'est lundi, mon premier jour de travail. Le premier jour d'une nouvelle vie, du moins je l'espère. Je commence à 9h, ce qui signifie que je dois être au bureau à 8h50, pas plus tard. M. Quamar a été clair là-dessus. La ponctualité est essentielle.

Je suis actuellement sur la route, le cœur battant à tout rompre. J'ai opté pour un tailleur rouge vif, une couleur qui respire la confiance, la force. C'est une armure de tissu contre mes peurs et mes insécurités. Mes sandales à talons noirs complètent l'ensemble, ajoutant juste ce qu'il faut de hauteur et d'élégance. En me regardant dans le rétroviseur, je m'assure que chaque détail est parfait, que chaque imperfection est dissimulée. Je ne dois laisser transparaître aucune faiblesse.

Dieu merci, j'arrive à temps. Le bâtiment de HTM Industries se dresse devant moi, imposant et moderne. Je prends une grande inspiration avant de sortir de ma voiture. C'est le début d'un nouveau chapitre, je dois y croire.

En entrant, je me dirige vers l'accueil où Mya m'attend avec un sourire professionnel. Elle m'accompagne jusqu'à mon bureau, un espace confortable juste à côté de celui de M. Quamar. Il y a même une porte communicante entre nos deux pièces, ce qui n'est pas surprenant, étant donné que je suis son assistante.

- Voici votre bureau, me dit Mya en ouvrant la porte.

L'espace est spacieux, élégant, décoré avec goût. La lumière naturelle inonde la pièce par de grandes fenêtres qui donnent une vue imprenable sur la ville. Tout est à sa place, impeccable. Il y a une grande table de travail, un fauteuil ergonomique, des étagères remplies de classeurs et de dossiers. Une petite plante verte apporte une touche de vie à l'ensemble.

- Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à me le demander, ajoute Mya.

- Merci beaucoup, dis-je en esquissant un sourire.

Elle me laisse seule pour m'installer. Je prends un moment pour m'imprégner de l'atmosphère, pour m'acclimater à cet espace qui sera désormais le mien. C'est apaisant, presque réconfortant. Ici, tout est beau et propre. Rien ne trahit le chaos de ma vie personnelle.

Je m'assoie à mon bureau, ouvre mon ordinateur portable et commence à m'organiser. Je veux être prête pour ce que la journée me réserve. Je ne peux m'empêcher de penser à ce que ce nouveau travail représente pour moi : une chance de me reconstruire, de créer quelque chose de stable dans un monde qui semble se dérober sous mes pieds. Ce travail, c'est plus qu'une simple opportunité professionnelle. C'est un refuge, une échappatoire, un moyen de reprendre le contrôle.

Pour la première fois depuis longtemps, je me sens presque en sécurité. Mais une part de moi reste en alerte, consciente que cette paix est fragile, que le moindre faux pas pourrait tout faire basculer. Pour l'instant, cependant, je m'accroche à cette petite lueur d'espoir.

« Amar »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant