22: Enfermé

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Ramer, aller plus vite. Sauver papa. Ramer, aller plus vite... empêcher Élise de gagner. Sauver papa...

Toutes les phrases qui tournaient dans la tête de Louis étaient centrées sur son père. Le jeune homme l'aimait trop pour le perdre. Il avait été celui qui le rassurait ou le consolait quand une aura féminine n'était pas là pour le faire. Son père avait été sa mère pendant toute son enfance et même maintenant...

- Papa... tiens bon encore quelques minutes... murmura l'habitant de Venise.

Il entra dans la ville scrutant les bâtiments éclairés d'une lueur étrange. Jamais Louis n'avait vu les maisons vénitiennes aussi lumineuses mais vides. Comment le savait-il ? Tout simplement car aucune lampe n'était allumée dans les demeures au bord du Pô. Seuls les lampadaires accompagnaient le chemin silencieux du garçon, laissant les ombres danser sur l'eau noircie par la nuit.

Une angoisse sourde planait au dessus de la ville, comme si elle savait ce qui allait ce passer, comme si elle attendait la suite.

Louis deglutit. Il avait peur.

Soudainement, une pensée traversa son esprit. William lui manquait. Cependant, il la repoussa très loin, dans un coin de sa tête. Il avait quelque chose de plus important à faire.

Il descendit de sa gondole et l'amara dans un recoin sombre caché de la vue de tous. Une voix dans sa tête lui murmurait qu'il en aurait besoin plus tard mais que personne ne devait la voir. Quand Louis eut fini de faire un noeud solide, un éclat de rire cruel le fit relever le regard. Il scruta le mur quelques secondes avant de se retourner. Des voix lui parvenaient aux oreilles.

Il les suivit et arriva sur la place de son quartier, située à plusieurs rues de sa maison. Une grande foule était réunie à son milieu. Le coeur du garçon se mit à battre à tout rompre. Louis dû jouer des coudes pour se faufiler jusqu'au centre.

- Excusez-moi, murmurait-il de temps en temps. Pardon...

Quand les adultes croisaient son regard, ils s'écartaient pour lui laisser place, et si au début Louis avait eut de la difficulté à se déplacer, maintenant le chemin se traçait petit à petit.

Arrivé au centre de la place, le jeune homme aux longs cheveux châtains resta sans voix. Élise, debout sur le toit d'un taxi aux vitres teintées, riait aux éclats. Le Drôle la regardait, un masque horrifié à peine dissimulé sur le visage. Il semblait déçu par le comportement de la fille blonde.

- Élise, qu'est-ce que tu fais ? cria Louis en sortant du cercle.
- Tiens tiens... regardez qui voilà ! fit la blonde sur le même ton tout en sautant de la voiture. Je vois que mes messages t'ont fait revenir.

Elle eut un petit rire moqueur alors que le jeune homme l'observait sans comprendre.

- Quels messages ? demanda-t-il doucement essayant de la calmer.
- Quels messages ? Quels messages ! hurla Élise en se rapprochant dangereusement de lui. Tu te fous de moi ?

Le garçon habillé en jaune la regarda légèrement effrayé par son regard furibond. Alors qu'elle plantait ses yeux verts dans les siens, Louis sortit son téléphone et pu constater qu'il avait plusieurs messages de la jeune fille. Il déverrouilla son portable, s'arrêtant quelques minutes sur son fond d'écran où l'on pouvait voir William qui le regardait, un sourcil relevé.

Élise, énervée, lui prit des mains sans se soucier des bonnes manières. Ce qu'elle vu la mit plus en colère et elle courut jusqu'à la voiture, laissant derrière elle le jeune homme figé par le comportement agressif de la blonde.

- Vous voulez voir avec qui il était ? cria-t-elle en montant sur le toit du taxi avec l'aide du Drôle. Avec cette bête ! Regardez donc ces cicatrices monstrueuses et ses dents ! J'en suis sûre qu'il a peut être des penchants cannibales !

Sur ces mots, elle avait jeté le portable dans la foule qui l'avait rattrapé et observait silencieusement la photo.

- C'est vrai qu'il a l'air dangereux, constata un homme avant de le montrer à sa voisine.
- Ça se trouve il pourrait s'en prendre à mon fils, fit une femme plus loin.

Alors que des murmures approbateurs s'élevaient de l'attroupement, Louis essaya de défendre William avec désespoir:

- Non... non, il n'est pas méchant ! S'il vous plaît écoutez moi...
- Vous voyez par vous même ! Cet homme l'a ensorcelé pour pouvoir le tuer ! Ou alors il est complice avec ce monstre pour pouvoir vous tuer vous ! le coupa Élise folle de rage. Il faut le tuer avant que lui ne le fasse !

Des acclamations sauvages répondirent à sa tirade. Louis, désemparé, ne put rien faire et fut jeter dans le taxi. Alors qu'il martelait la porte de la voiture pour sortir, il entendit les habitants de Venise partir, probablement à la recherche de William.

- Non... S'il vous plaît...
- Louis ? fit une voix derrière lui.
- Papa ? lui répondit le garçon en se retournant.

Pendant ce temps, Élise conduisait les vénitiens jusqu'à leur gondole, sans apercevoir celle cachée par le jeune homme quelques minutes plus tôt. Elle était décidée à faire regretter Louis de l'avoir défié. Maintenant qu'elle avait tous les habitants de la ville italienne dans sa poche et que le garçon était hors d'état de nuire, il ne lui restait plus qu'une dernière pièce à jouer pour gagner entièrement la partie. Abattre le roi : William.

- Suivez moi ! fit-elle en cachant dans les plis de sa robe une arme à feu.

A quelques mètres de là, dans une autre gondole, Le Drôle comprit alors toute la monstruosité de celle qu'il avait jadis aimé.

- C'est une vrai bête sauvage, murmura-t-il pour lui même. Mais je parle du monstre qui nous guide.

En soit, tous les bateaux qui finissaient silencieusement sur l'eau formaient un magnifique tableau terni par la motivation des adultes. Aucun doute n'était possible, ils avaient clairement envie de se battre.

A leur arrivé sur la berge, personne ne remarqua une jeune femme qui, cachée dans la forêt, observait la scène, un léger sourire aux lèvres. Elle suivit le groupe en prenant soin de ne pas se montrer. Ils arrivèrent enfin au manoir et elle n'eut qu'à se faufiler dans le jardin de la demeure.

Anna avait prit sa décision : elle attendrait la fin de cette guerre ridicule pour entrer en scène.

Le Beau et la Bête [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant