Chapitre 13: Promenade

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« Il est vraiment rare qu'on se quitte bien, car si on était bien, on ne se quitterait pas. »

Marcel Proust

2020, France, dimanche 5 avril, Aix en Provence

On est, mon père et moi, montés en voiture, et partis sur la route. On fait environ quinze minutes de route et on se gare face à une grade rue mais ce n'est pas vers celle-ci que l'on se dirige mais plutôt vers une plus petite où le seul commerce ou plutôt endroit de vie que l'on voyait est un cinéma. Pourquoi un cinéma ?

-C'est ici qu'a eu lieu ton premier rendez-vous avec Bryan. Tu as toujours voulu y aller. C'est un vieux cinéma qui reprogramme souvent des anciens films. Vous étiez allés voir une rediffusion d'un film en noir et blanc dont je ne me souvins plus le nom. Ce cinéma est le Mazarin, il est plutôt vieux mais authentique et cela te plaisait beaucoup. Vous êtes venus ici une autre fois pour vos un an de relation.

Je fixe la façade du ciné pour le détailler un peu plus. C'est un bâtiment en pierre blanche. Le nom du cinéma trône en grand et écrit en rouge sur la façade. On voit les photos des grands noms du cinéma derrière le nom du ciné. C'est joli et comme le dit mon père authentique.

-Tu viens ? me demande mon père quand il voit que je n'ai pas de crise comme plus tôt dans la journée.

On passe la voiture et nous reprenons la route vers un autre lieu mais cette fois-ci nous ne remontons pas dedans mais nous parcourons une centaine de mètres de plus avant d'atterrir devant une grande bâtisse, apparemment un musée d'art.

-On a visité ce lieu quand tu étais en sixième, tu voulais absolument le faire. On ne va pas rentrer maintenant mais je peux t'expliquer. Quand on rentre, il y a un jardin avec des tables où l'on peut manger et au centre on voit une sculpture qui représente un homme rouge qui nage. Puis à l'intérieur, il y a des dizaines et dizaines d'œuvres. Je ne pourrais toutes te les décrire tellement il y'en a.

J'hoche la tête mais pour l'instant aucun souvenir n'est revenu et cela jette un froid, mon père espère peut-être plus de ma part mais je n'y peux rien.

-Ça ne marche pas ? Tu ne te souvins de rien ? questionne-t-il automatiquement comme s'il avait lu dans mes pensées.

Je secoue la tête cette fois de gauche à droite et ce geste a l'air pour lui de vouloir dire beaucoup plus qu'un tas de mots que j'aurais pu prononcer.

Pouvais-je vraiment me souvenir simplement en parcourant les lieux importants de ma vie ?

On refait le chemin inverse sans un mot, que pouvait-on dire ? Quand on regagne la voiture on monte dedans rapidement et mon père me dit :

-On va faire une dernière visite puis on rentrera à la maison.

J'hoche la tête et rétorque:

-Où allons-nous ?

-Dans un parc. Quand tu étais petite, on y allait souvent, c'était toujours là qu'on venait pour t'endormir. Puis quand tu as grandi, on venait encore ici pour jouer, m'explique-t-il pendant toute la durée du trajet qui fut court puisqu'en à peine cinq minutes, nous sommes arrivés.

On descend en simultané de la voiture et on entre dans le parc.

-Que faisais-tu avec Adam quand tu étais chez lui ?

-Pas grand-chose, Adam ne voulait pas que je sorte pour pas que je me perde au cas où. Alors je restais à la maison, je faisais le ménage, je regardais des films et j'allais à mes rendez-vous médicaux. C'est tout.

-C'est bien déjà.

On marche encore quelques temps dans le parc. Sans qu'aucuns souvenirs ne reviennent. Cette escapade est vraiment inutile, aucuns souvenirs juste une excursion à sa recherche.

-Bon, on s'en va ? demande-t-il avant d'ajouter. Tu veux manger au restaurant ?

-Pourquoi pas, je lui réponds.

Comme on l'a fait toute la matinée, on reprend la voiture et mon père m'indique qu'on se rend dans mon restaurant préféré. Il m'explique que c'est un italien et que dans cette région, ce type de restaurant est très répandu et que quels qu'ils soient je les adore.

-Ai-je déjà été en Italie ?

-Quelques fois avec nous et une fois avec Bryan, tu avais adoré en même temps, l'Italie c'est magnifique.

-Ce serait bien d'y retourner.

-Pas tout de suite mais oui, ce serait bien. Changeons de sujet, comment te sens-tu à la maison ? Nous ne te dérangeons pas ?

-Je ne suis là que depuis hier, je ne suis pas encore très à l'aise mais ça va.

Cela me choque un peu, je ne me suis pas aussi facilement confié à quelqu'un à part Adam, qui était en même temps une des seules personnes que j'avais vu. Mais j'ai l'impression d'avoir une vraie complicité avec mon père beaucoup plus que celle que je peux avoir avec ma mère. Cela fait si peu de temps en même temps que je les côtoie, je ne pouvais espérer une complicité avec ma mère seulement au bout de quelques heures à ses côtés.

-Charlie ? Tu m'écoutes ?

-Excuse-moi, tu disais ? je lui réponds gentiment encore dans mes pensées.

-Je te disais que ta mère peut être rustre parfois mais c'est une superbe femme qui se bat pour ceux qu'elle aime. Tu verras.

Je me tourne vers lui et lui souris franchement. J'adore comment il parle de sa femme, en voyant dans son regard l'amour qui lui porte, on entend dans sa voix toute la fierté dont il fait preuve à son égard. On peut observer dans ces gestes toute l'affection que mon père ressent pour ma mère. C'est tellement beau et je suis tellement envieuse de leur relation qui pour moi est parfaite. C'est une relation que je ne pourrais jamais avoir avec Bryan ou qui que ce soit d'autre.

-Nous sommes arrivés, me dit-il une fois que sa manœuvre fut finie.

SANS NOMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant