SANS NOM

Chapitre 17: Bye-bye

« Chacun a son monde, le tout est de planter ses racines dans la terre qui nous convient. »

Marc Lévy

2020, France, dimanche 7 juin, Aix en Provence

J'ai passé une très bonne nuit en plus d'avoir passé une très bonne soirée. J'ai fait pleins de rêves où les acteurs principaux étaient Bryan et moi, non ce n'était érotique, je vous vois bande de coquins. Mes parents sont levés depuis au moins trente minutes et moi, je suis réveillée mais encore dans mes pensées. Je cherche un bon moyen d'annoncer à mes parents mon déménagement sans les brusquer ou les blesser. Je décide tout de même de me lever et de les rejoindre pour petit-déjeuner après une bonne vingtaine de minutes à fixer mon plafond blanc. -Bonjour, dis-je d'une voix basse en entrant dans la salle à manger. -Bonjour ! répondent-ils en même temps. Mon père me propose le café que je prends tous les matins ce que bien sûr j'accepte, il pose à côté de moi les tartines de beurre que j'adore. Le silence est brisé par une sonnerie de téléphone, la sonnerie de mon téléphone. Elle annonce la venue d'un message. J'ai déjà le nom de l'expéditeur. Bryan... « Je serais là vers 16h. Alors prépare-toi, chérie...😘 » Un sourire naît sur mon visage ce que mon père remarque. -Pourquoi tu souris comme une débile ? rigole-t-il. -Il faut que je vous parle, dis-je beaucoup plus sérieusement. Les sourires qui sont jusqu'alors sur leurs visages disparaissent et ils s'assoient sur les chaises de la cuisine. -Bryan m'a fait une proposition hier... Mes parents froncent les sourcils puis se regardent dans les yeux quelques instants avant de me fixer une nouvelle fois attendant que j'argumente ma phrase. -Il veut que j'emménage chez lui aujourd'hui. Et j'ai accepté. Encore une fois, ils se regardent avant de se tourner vers moi et de me sourire. Ils ne disent rien mais ils sourient alors je ne le prends pas mal. Il y a un long silence qui me fait remonter le stress. Leurs regards jonglent de moi à l'autre. Avant que mon père décide de prendre la parole. -C'est super ! Vous êtes de nouveau ensemble ? -Non, mais... On va prendre notre temps, il faut que je retrouve la mémoire et après on verra... Il y a un autre long moment de silence mais cette fois c'est ma mère qui reprend la parole. -Je peux te dire quelque chose ? -Oui, oui bien sûr... -Tu ne devrais pas construire te vie autour de ta mémoire. Dieu, le destin, t'a donné une seconde chance, oui, tu as perdu la mémoire en court de route. Elle reviendra peut-être dans deux jours, dans deux mois, dans deux ans ou jamais. Et si elle ne revient jamais, tu ne vas pas gâcher ta seconde chance pour une stupide recherche. C'est comme si tu attendais la mort toute ta vie, c'est totalement stupide. Tu dois te reconstruire des souvenirs maintenant sans attendre que les anciens reviennent. Tu ne vas pas attendre des souvenirs qui ne reviendront probablement jamais. Surtout toi qui as déjà vu la fin une fois. Oh. Je ne m'attendais pas du tout à ce monologue. Ma mère a raison de A à Z, de haut en bas. Je le sais bien mais j'ai trop de mal à l'accepter. C'est à ce moment-là que je comprends, ma mémoire n'est qu'une excuse, ce n'est pas une barrière à ma relation avec Bryan. La barrière, c'est moi, je ne suis pas prête. Mais surtout, la vraie raison, c'est qu'Adam me manque beaucoup et même si je suis très heureuse de la compagnie de Bryan, ce ne sera jamais comme avec Adam. Adam c'est Adam. Je ne serais jamais capable de donner à quelqu'un d'autre la place que lui avait prise et pour l'instant je suis incapable de donner à quelqu'un d'autre la place que même lui n'avait pas pris. -Oui, maman, je sais. Vous ne m'en voulez pas ? -Pourquoi on devrait t'en vouloir ? rétorque de suite ma mère. -Parce que je pars... -Tu es grande, ma puce. Tu étais déjà partie t'installer avec Bryan une fois, tu as disparu et tu es revenue. Ça nous a fait très plaisir que tu reviennes ici quelques temps et si tu veux retrouver ta vie avec Bryan, c'est normal et on comprend. On ne fait pas des enfants pour qu'ils restent éternellement avec nous. Ce n'est pas là le cycle de la vie. Je leur adresse un sourire qui se veut sincère mais qui doit ressembler plutôt à une grimace dû à la tasse de café que je suis en train de boire mais qui est désormais froid et écœurant, je ne fais aucun commentaire et le bois en silence. -Vous allez pouvoir m'aider à déménager ?  -Bien sûr, nos muscles et nos bras sont là pour porter tes cartons, me répond mon père avec un clin d'œil. -Je prends ma douche et on pourra commencer, je répondis en remontant déjà les escaliers. Connaissant la température extérieure, je décide d'enfiler une tenue simple pour porter des cartons, un jean brut avec un simple sweat noir au logo aux trois traits reconnaissables. J'attache mes cheveux en une simple queue de cheval. Quinze minutes plus tard, je suis de nouveau au rendez-vous et je retrouve mes parents installés dans le canapé, dans les bras l'un de l'autre. -On peut commencer, dis-je du bas de l'escalier et sans attendre de réponses, je suis déjà en train de remonter les escaliers. Seul problème, je n'ai pas de cartons dans ma chambre, seulement deux sacs et une valise. Alors autant pour mes vêtements, c'est plutôt pratique mais pour la vingtaine de livres que j'ai entassé depuis deux mois, c'est plutôt difficile. Je commence déjà par regrouper mes vêtements par saisons pour mieux les mettre dans mes sacs. Je mets ceux d'hiver et de mi- saison dans ma grosse valise. Mes parents ouvrent la porte une dizaine de minutes plus tard, cinq cartons dans les mains. Cinq cartons, c'est peut-être beaucoup mais mieux vaut trop que pas assez. -J'ai déjà terminé ma valise. Il me reste ces vêtements, dis-je en leur montrant la pile de mes habits disposés en vrac sur le lit. -Que veux-tu qu'on fasse ? me coupe ma mère. -Je vais prendre tous les livres achetés depuis mon retour alors on peut les mettre dans un carton, j'ordonne. Ils hochent la tête en même temps et commencent à mettre ma tonne de livres dans un carton. Pendant que moi je m'occupe de mes vêtements. Hors de question que mes parents s'occupent de mes sous-vêtements. Je ne suis pas tombée aussi bas.