1 - Naochi

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       Après que l'amour de ma vie ait décollé dans un avion qui l'emmenait à des milliers de kilomètres de moi, son meilleur ami m'a reconduit chez moi. Pendant le trajet, je souriais. Mes larmes sèches brûlaient encore mes joues rouges, mais un grand sourire ornait mon visage. En m'accompagnant devant mon porche, le visage de Kyle semblait débordé de soucis. « Tu es sûr que ça va, Ange ? Tu es sûr que tu peux rester tout seul ? », m'a-t-il demandé. J'ai répondu avec un air joyeux, le plus naturellement du monde : « Bien sûr, Kyle ! Je suis content pour lui ! ».

Mais aussitôt que Kyle fut parti, je me laissai tomber sur mon lit, et fondai en larmes.

Aller bien ? Comment puis-je ne serait-ce qu'espérer aller bien alors que le garçon que j'aime déménage à l'autre bout du monde ? Douce et douce solitude était mon quotidien, auparavant. Mais maintenant que tu m'as appris comment sourire, espèce d'idiot de Moana, comment veux-tu que je vive sans toi ?

Je t'ai supplié de rester. J'ai pleuré devant tout le monde, comme une misérable victime pathétique. Parce que c'est ce que je suis. J'ai essayé, Moana. J'ai essayé de te laisser partir, parce que je sais que tu es plus heureux à Tahiti. Mais c'est trop dur. M'imaginer ici, en France, aller en cours, boire un chocolat chaud, regarder un film, en sachant pertinemment que tu n'es pas là, c'est trop dur.

J'ai traversé beaucoup de choses, et tu es le premier à le savoir. Le bonheur n'a jamais fait partie de mon quotidien, du plus loin que je puisse me souvenir. Mais toi, toi et tes cheveux ondulés et ton sourire enjôleur, tu as apporté l'éclat qui manquait à ma vie. Tu m'as aidé à effacer mon passé petit à petit, grâce à des baisers volés et des compliments sincères, et je t'en serai reconnaissant jusqu'à ce que le dieu auquel tu crois ne décide de mettre la dernière main à ma vie.

Mais est-ce que tu croyais vraiment que je pourrais me passer de toi après tout ça ?

Je t'aime, Moana, et tu le sais parfaitement. Je t'aime et c'en est douloureux.

Je me mors la lèvre. J'ai envie de l'appeler. Ça fait à peine une demi-heure qu'on s'est quittés, mais j'ai déjà envie d'entendre sa voix basse me chuchoter que tout ira bien.

Parce que je suis effrayé. Immuablement et incommensurablement effrayé. Je ne sais pas ce que je vais devenir sans lui. Serai-je encore capable de sourire en sachant que mon Moana n'est pas près de moi ? Et est-ce que tout ira véritablement bien ?

Les traînées de larmes salissent mon visage et mon nez se met à couler. Je dois avoir l'air hideux, là, maintenant. Je pleure à en perdre la raison en poussant des cris plaintifs, serrant mon oreiller contre ma tête assommée. Faites que ça s'arrête. Faites que j'aille mieux. Faites que cela s'améliore. Rendez-moi la joie.

Si Moana était là, il s'allongerait simplement à mes côtés, en passant son bras autour de mon corps tremblant. Il murmurerait des paroles rassurantes tout contre mon oreille, sans jamais me juger. Il déposerait un baiser sur ma joue, en me tenant contre lui. Moana aime d'une manière formidable.

Peu de personnes m'ont aimé, je dois bien l'avouer. Mais Moana a su me faire découvrir ce que c'était, d'aimer et d'être aimé en retour. Parce que Moana est sincèrement la personne la plus aimante et irremplaçable que je n'ai jamais rencontré, de toute ma vie.

Je suis désolé, Moana. Je suis désolé de ne pas avoir été à la hauteur pour pouvoir t'empêcher de partir. Je suis désolé d'être incapable de déménager dans ton pays. Je suis désolé de t'avoir supplié de rester avec moi alors que je savais que tu serais plus heureux ailleurs. Je suis égoïste, je le sais. Mais cet amour est tout ce que j'ai. Je serais un idiot si je ne m'accrochais pas à la seule chose qui me fait me sentir vivant, n'est-ce pas ?

Moon's flowerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant