Moon's flower

37 - Mute

      Aimata est endormi dans le grand lit de ma chambre aux murs bleus. Bleus car c'est la couleur qui l'apaise, et je voulais qu'il se sente chez lui lorsqu'il est chez moi.

Les nouveaux draps anthracites et parfumés recouvrent son torse nu, et son visage a l'air paisible. Ses longs cheveux noirs sont répartis de part et d'autre de l'oreiller sur lequel sa tête est posée, et je suis assis au bout du lit, mon visage entre mes mains.

Il doit encore faire jour, à quinze-mille kilomètres d'ici. Il doit être réveillé. Alors j'attrape mon téléphone, passe ma main dans mes cheveux, et l'appelle.

« Allô mon pote ?

- Salut, Mo' ! Tu vas bien ?

- J'vais bien, la forme... Et toi, ça va ?

- Ça va aussi ! Ça va les cours ? Et le surf ?

- Tout baigne, mon pote... Et toi, Kyle ?

- Ça va, je suis content que tu ailles bien !

Je souris, véritablement heureux.

- Dis, Moana... Ça veut dire quoi « fare », en tahitien ?

- « Fare » ?, répète-t-il avec un accent bien meilleur que le mien. Ça dépend du contexte, mais en gros ça veut dire « maison ».

J'écarquille les yeux.

- Pourquoi ?, demande-t-il.

- O-Oh, pour rien... Et... J'avais une autre question...

- Vas-y, mon pote., rit-il.

- Je n'ose pas vraiment le demander à Aimata, mais je me demandais-... Est-ce qu'il a des tics ?...

- Des tics ?, répète Moana.

- Oui... En ce moment, il fait beaucoup de mouvements anormaux, et il a l'air de s'en rendre compte et d'en être soucieux mais... Je n'ose pas lui demander ce que c'est ! Et ça a l'air de s'empirer avec le temps !

Moana se tait un instant et éclate de rire. Il rit bruyamment, à en perdre son souffle, et soupire :

- Je sais ce qu'il a !!, se marre-t-il.

- Alors dis-le-moi, idiot !!

Moana se calme, doucement et progressivement.

- J'pense qu'c'est mieux si t'en parles avec lui, mais en gros... Ai' est un peu... Obsédé par le porno. Comment dire ça simplement, hum... Quand il en regarde pas ou n'en parle pas pendant trop longtemps, il est « en manque ». Et il est très attaché aux règles de société, alors il sait que ce n'est pas acceptable de regarder du porno chez les gens. Donc il le fait pas.

- D-... Donc ses tics sont dûs au fait qu'il est en manque de porno ?..., répète-je, un peu surpris.

- Exact., acquiesce-t-il.

Je regarde Aimata qui roupille comme le plus calme des bébés, et me demande comment il est possible qu'un garçon si innocent ait des passions si chaotiques.

- Merci infiniment Moana. Tu m'aides beaucoup.

- De rien, mec. Je fournis aussi le service après-vente. », rit-il.

Je souris, et après nous être salués, nous raccrochons.

Je me rallonge à côté d'Aimata, un peu rassuré, et il ouvre enfin ses deux beaux yeux noirs une petite heure plus tard.

« Salut mon amour~..., lui souris-je.

Il lève légèrement le menton pour déposer un baiser sur le bout de mon nez, et grommelle un vague :