23 - Am I forgettable ?

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       Parfois, quand je suis vraiment triste, il m'arrive de penser au début. À l'époque où je me suis rendu compte que j'aimais Ange. Cette amère année, la Seconde où j'ai réalisé mon homosexualité. Et à chaque fois que j'y pense...

Ça me fait mal.

« Hé, Phil.

- Quoi, Moana ?, balbutia-t-il.

C'était clair et net, il était complètement torché.

- T'es réveillé mec ? T'as l'air mort.

- Nan, j'suis sobre. J'ai quasiment rien bu. », mentît-il avant de se laisser tomber raide sur le tapis de son couloir.

Je le laissai là, sans vraiment me préoccuper de son sort, et descendis ses escaliers, en tanguant un peu. Ma braguette était baissée et ma bouche avait le goût d'alcool, mais je ne m'en sortais pas trop mal. Je remontai ma fermeture, en essayant de me rappeler de qui me l'avait baissée. Cassandre ? Julie peut-être ? Ou encore Iris ? Je n'en avais aucune putain d'idée.

Mais soudainement, je butai contre quelque chose. Ou plutôt quelqu'un.

« Wow, t'as l'air sacrément bourré toi ! »

      Je me brosse les dents, en me massant le crâne. Putain, j'ai beaucoup trop bu, hier soir. Beaucoup, beaucoup trop.

Ma mère est assise dans le salon, en train de tresser les cheveux de ma petite-sœur, et je retourne dans ma chambre sans leur décrocher un mot.

Le garçon que j'ai rencontré hier, à la soirée, il était vraiment sympa. Pas très beau, c'est clair, et il n'a rien de plus qu'un autre, mais... Il m'a fait du bien. Je ne sais pas si traîner avec un paumé comme lui ternirait mon image, mais on est amis maintenant, non ? Ça me sera bénéfique de m'éloigner de Julian et de ses amis fêtards de temps en temps. Car cet « Ange Coleen » est authentique. Quand je lui parlais, j'avais l'impression d'être vraiment moi-même, et c'était tellement-... Tellement gratifiant...

Lundi, au lycée, j'irai lui demander si on peut manger ensemble. Il n'y a pas de raison qu'il refuse, n'est-ce pas ?

     « Elle a mis les dents, cette salope ! J'ai eu putain d'mal, et j'l'ai quittée ! À quoi bon dévergonder les p'tites catho' coincées si c'est pour qu'elles aient pas une langue divine ? », se plaint Mathis.

Je n'aime vraiment pas qu'ils parlent de ma religion comme ça, mais je ne leur ai jamais dit que j'étais croyant, alors j'imagine que c'est juste.

Mais du coin de l'œil, j'aperçois un petit garçon au sweat-shirt rouge, avec de longues cernes sous ses yeux clairs, et un air fantomatique. C'est Ange, n'est-ce pas ?

Je m'écarte donc du groupe de Mathis et Phil, et Ange lève ses pupilles vers moi. Mais il passe ses yeux comme s'il ne m'avait pas vu. Que veut dire ce regard vide comme celui d'un poisson mort ? Pourquoi il ne me regarde pas ?

Enfin, peut-être qu'il ne m'a pas vu.

« Ange !, l'interpelle-je.

Cette fois, il me regarde, moi. Son ami aux cheveux roux se retourne également, et manque de recracher le cookie qu'il tient à la main.

Ange fronce les sourcils, étonné.

- M-Moi ?

- À qui d'autre veux-tu que je parle ?, souris-je.

Il a un mouvement de recul.

- J-J'ai fait quelque chose de mal pour que tu viennes me parler, Moana ?...

Moon's flowerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant