Moon's flower

39 - Inland taipan

     Je pose mon téléphone sur la table de ma cuisine, et prends une grande inspiration. Je pose mes coudes et joins mes mains. Mon père n'est pas là, je suis seul à la maison.

Il faut juste être courageux Moana, il faut juste que tu ailles de l'avant. C'est pour la bonne cause.

Ça fait longtemps que je ne lui ai pas parlé. Alors je fais glisser les conversations iMessage pour tomber sur son contact.

Et elle décroche, après quelques sonneries.

« Allô, Moana ?

- Salut, Maman...

Je me mors la lèvre. Ça y est, on vient juste de commencer à parler et je suis déjà nerveux.

- Pourquoi est-ce que tu m'appelles ?, demande-t-elle.

Je me sers un verre de Fanta, pour m'hydrater après cette réponse excessivement sèche.

- Émile m'a appelé... Il m'a proposé un contrat pour un combat professionnel, dans quelques semaines. C'est en France, et si je gagne j'empocherai plusieurs milliers d'euros. J'aurais besoin d'un billet, s'il te plaît.

Elle soupire.

- De quand à quand ?...

- Du treize février au vingt-huit.

- C'est quel jour, ton combat ?

- Le vingt.

Elle fait claquer sa langue, fatiguée de mes âneries.

- Tu n'as pas besoin de deux semaines pour un seul combat.

Je me mors la lèvre, une fois de plus, et bois une autre gorgée de Fanta.

- Tu veux juste être en France pour la Saint-Valentin, et passer tes vacances là-bas. Ce n'est même pas la peine de me mentir.

- M-... Māmā-...

Elle pousse un long soupir.

- Moana..., se plaint-elle.

Je reste silencieux un moment, et elle reprend :

- Tu auras ton billet. Mon comité d'entreprise me les donne pour compenser les besoins qu'ont mes enfants, en vivant loin de leur famille. Je n'y peux rien, si tu veux aller en France pour retrouver Ange.

Je frissonne.

- M-Merci, Maman. Merci infiniment.

Elle ne dit rien, et je l'entends taper sur son clavier d'ordinateur.

- Fais-le sourire., dit-elle après un long moment sans bruit.

- Comment ça ?

- Ange ne sourit jamais. Il a toujours l'air effrayé, et sur ses gardes. Et pas seulement quand je suis là. Fais en sorte qu'il sourisse, Moana.

Je fronce les sourcils, méfiant.

- Hé, j'ai pas besoin de tes conseils pour savoir comment me comporter avec mon mec. T'approuves même pas notre relation, alors retourne pas ta veste au dernier moment.

- Je n'arriverai pas à dormir la nuit si je sais que mon fils fait souffrir la personne avec qui il sort. Fais au moins en sorte de le rendre heureux.

Je soupire et pose mon verre sur la table.

- Alors maintenant tu admets que je sors avec Ange ? Tu as changé d'avis sur mon homosexualité ?, me moque-je avec hautainerie.

Rien que par son silence, je devine qu'elle lève les yeux au ciel.

- Si tu n'as rien d'autre à me dire, Moana, je dois raccrocher. Tu auras ton billet avant la fin de la semaine. Prends soin de toi.