Chapitre 40

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Luna, quatre ans plus tôt

Nous y voilà. La maison de Scott sous mes yeux, je n'arrive plus à avancer. Owen mon petit frère m'a proposé de m'accompagner, mais je préfère me retrouver seule face à lui.

Il est sorti de l'hôpital juste après l'enterrement, mais n'a pas daigné me donner de nouvelle. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir essayé de capter son attention. J'ai envoyé des dizaines de messages, appeler un nombre incalculable de fois et j'ai même essayé d'attirer son attention en lançant des cailloux sur sa fenêtre, mais rien n'y a fait.

Si Clara était là, elle me dirait probablement de ne pas m'inquiéter, qu'il finira par revenir à un moment ou un autre. Mais Clara n'est plus là. On lui a ôté la vie d'une manière bien trop tragique et horrible d'après moi. Si seulement j'avais conduit la nuit de l'accident, peut-être qu'elle irait bien, peut-être qu'elle serait toujours en vie, peut-être qu'elle continuerait de m'aider comme l'amie qu'elle était.

Elle est morte sur le trajet de l'hôpital, plus précisément dans l'ambulance. Je n'étais pas avec elle et ses parents non plus. Elle est partie seule et en souffrant, personne n'a été là pour elle alors qu'elle l'a toujours été pour un grand nombre de ses proches. Les médecins ont tout fait pour la sauver, mais ça n'a malheureusement pas suffi. Pendant que j'étais sonnée avec des bouts de verre plantés partout dans le corps, ma meilleure amie perdait la vie. Pendant que je pleurais toutes les larmes de mon corps encore sous le choc, elle me quittait moi, mais elle quittait aussi toutes les personnes chères à son cœur. Pendant que je jurais de douleur à cause d'éclats de verre désagréables, Clara tombait dans le coma pour ne plus jamais en ressortir. Ses magnifiques billes noires se sont fermées pour ne plus jamais s'ouvrir et ça me fend le cœur de me dire que je ne la reverrais jamais.

L'accident a eu lieu il y a plus d'un mois et pourtant je revis cette atroce soirée chaque seconde. Mes parents sont persuadés que le temps résout les problèmes, mais je sais que ce sont des conneries, le temps ne me ramènera pas ma meilleure amie. Le temps ne lui rendra pas la vie qu'elle a perdu pour se rendre à une maudite fête. Je ne veux pas guérir si ça implique que je dois l'oublier.

Je sonne à la porte, chose que je ne fais habituellement pas et la mère de Scott vient m'ouvrir. En voyant ma mine défaite, elle me fait entrer et me prend dans ses bras. Je ne l'ai revu qu'une fois à l'hôpital et une fois à l'enterrement et pourtant, j'ai l'impression de ne pas l'avoir aperçu depuis au moins quatre ans. J'aimerais oublier le temps d'un instant le profond mal-être qui s'est glissé à l'intérieur de moi, mais c'est impossible et malheureusement, un simple câlin ne changera rien à ça.

Sans parler, je me détache de son étreinte, lui offre un pauvre rictus qu'elle me retourne avec compassion et je monte doucement les escaliers pour me tenir devant la porte de Scott. Aucun bruit n'en échappe, je pourrais presque l'entendre respirer à travers le mur qui nous sépare. Je toque nerveusement et n'attends pas de réponse pour entrer.

Il est avachi sur son lit et ne me jette même pas un regard. Je pensais que me revoir lui ferait un autre effet, mais il faut croire que je me suis encore bien trompée sur son cas. Moi qui pensais qu'il m'aimait peut-être autrement que comme une amie, je me suis bien fait avoir, encore une fois. Ce qu'il m'a raconté cette nuit-là est probablement faussé à cause des quelques grammes d'alcool qu'il avait dans le sang. Pourtant, en y ayant pensé un certain temps quand j'étais enfermée entre quatre murs à l'hôpital, je me trouvais bête d'avoir réagi de la sorte. Peut-être que moi aussi, je ressentais quelque chose pour lui finalement. Je me trouve bête d'avoir pu espérer qu'il se passe quelque chose de plus entre nous.

Je m'assois sur le lit et me mets dos à lui. Il contemple son plafond comme si c'était la plus belle chose qu'il n'ait jamais vue de sa vie. J'aperçois d'un léger coup d'œil sa jambe dans le plâtre et un large frisson me parcourt le corps entier. Il doit passer ses journées ici à penser à la même chose que moi. Seulement lui, il ne peut pas se déplacer.

Rôles inversésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant