Manon : Un mojito s'il vous plait, signalais-je au serveur.
Philippine : Et un verre de vin blanc pour moi, demande-t-elle timidement.
Manon : Un verre d'alcool lors d'un premier rendez-vous ? Tu n'as pas l'air de suivre mes conseils, la taquinais-je.
Philippine : Tu peux parler, un mojito ? dit-elle en levant un sourcil.
Manon : On n'a pas la même tolérance à l'alcool Madame Proust... riais-je. Je vous rappelle que je vous ai déjà vu dans un sale état...
Philippine : Je peux en dire autant...
Le serveur arrive avec nos consommations. Nous le remercions, et il s'éclipse. Nous sommes mardi soir, il n'y a pas grand monde dans le bar tranquille où j'ai décidé d'inviter Philippine. Notre début de semaine s'est bien passé. J'appréhendais qu'elle ne me traite plus comme avant, qu'elle ait pitié de la femme affaiblie que je lui ai laissé entrevoir. Or, ce n'est pas ce qu'il s'est passé. Bien sur, j'ai bien vu qu'elle s'inquiète pour moi, mais je sais me ressaisir vite, et elle s'en est bien rendue compte. C'est pourquoi elle ose ce genre de remarque aussi tôt... J'apprécie vraiment.
Manon : Alors un partout, balle au centre, dis-je en levant mon verre.
Nous trinquons, et après une gorgée, je vois bien que ma petite protégée se questionne encore une fois. Lassée qu'elle ne prenne pas les devants, je lui lance.
Manon : Je vais bien, je t'assure, tu peux me poser n'importe quelle question Philippine...
Philippine : Tu as eu des nouvelles de ta famille ?
Manon : J'ai répondu à mes petits frères, mais toujours pas de nouvelles du côté de mes parents ou de mes aînés... je bois une gorgée et continue. J'hésite même à me retirer du groupe watts app de la fratrie...
Philippine : Ah ça Manon, c'est hors de question, s'oppose-t-elle. Ce n'est pas à toi d'avoir honte et te faire toute petite, ce sont eux qui devraient avoir honte de leur réaction...
Manon : Tu as raison, qu'est-ce que je ferais sans toi ? dis-je un petit sourire malicieux sur les lèvres. Et toi, tu ne m'as jamais parlé de ta famille.
Philippine : Je n'en ai pas parlé parce que je n'ai pas de famille, dit-elle sur un ton détaché, comme si ce n'était pas grave.
Manon : Oh, je suis désolée... me précipitais-je en me maudissant d'avoir mis les pieds dans le plat.
Philippine : Il n'y a pas à être désolée, ma mère est partie en prison quand j'avais 11 ans, et mon père ne voulait pas s'occuper de moi, alors il m'a confié à la DAS. Et comme personne ne veut d'un enfant de cet âge-là, j'ai été baladée de foyer en foyer, m'explique-t-elle.
Manon : Oh, mais c'est terrible, tu n'as jamais essayé de retrouver ta mère ?
Philippine : Si, mais elle ne valait pas mieux que mon père. A mes 18 ans, j'ai voulu la retrouver, et ai appris qu'elle est morte d'une overdose. Mon père quant à lui, est allé en prison, et y restera un petit bout de temps...
Je ne sais pas comment réagir. C'est un très lourd passé que ma stagiaire a. Mais elle a l'air de ne pas s'en soucier du tout... Comme si le jour où ses parents l'ont abandonné, elle l'a accepté, et ne s'est jamais retournée. Enfin si, une fois, pour constater qu'elle avait bien fait de ne pas le faire avant cela...
Philippine : Ça fait cet effet là à tout le monde quand je raconte mon histoire, rit-elle.
Manon : Je ne sais pas quoi te dire en fait... avouais-je décontenancée.
Philippine : Il n'y a rien à dire, c'est derrière moi, et je suis fière de ce que je suis devenue malgré le mauvais départ de ma vie.
Manon : Je confirme, tu t'en sors à merveille... nous trinquons.
Mardi soir, 22h30, point de vue de Philippine :
J'avais vraiment peur qu'après avoir raconté mon histoire, Manon se braque, ou qu'elle me prenne en pitié. Mais ce ne fut pas le cas. Au contraire, elle posait un regard nouveau sur moi. Mais pas dans le sens mauvais du terme. Elle me regardait enfin comme si j'étais quelqu'un de fort, qu'on peut, ne pas ménager.
Le reste de notre rendez-vous s'est divinement bien passé. En effet, Manon est une superbe oratrice, elle raconte les anecdotes comme personne. Elle aurait pu être humoriste, en tout cas, à en croire les fous rires qui m'ont secoués pendant toute la soirée.
J'ai aussi pu voir son regard changer de temps à autre, lorsque je surprenais ses yeux détaillant mon décolleté. Elle ne faisait même pas semblant de regarder ailleurs, elle assumait totalement ses gestes et me fixait ensuite dans les yeux avant de revenir sur un autre sujet. C'est dommage que la soirée soit déjà finie, quoi que, elle n'est pas obligée de se terminer si vite...
Philippine : Voilà, on est arrivé devant mon appartement...
Manon : Effectivement, confirme-t-elle amusée.
Philippine : Tu veux entrer boire un dernier verre ? demandais-je.
Manon : C'est gentil, mais on a du travail demain, je te raccompagne à ta porte et je rentre chez moi.
Philippine : Tu sais il ne m'arrivera rien dans mes escaliers... riais-je.
Manon : On ne sait jamais... sourit-elle.
Nous montons donc les étages et arrivons devant ma porte. Je la regarde et lui demande encore une fois.
Philippine : Tu es sûre de ne pas vouloir rentrer ?
Manon : Sûre, non, mais je dois rentrer... dit-elle, bien que je surprenne encore ses yeux sur mon corps.
Philippine : La soirée n'est pas obligée de se terminer ainsi, audacieusement, j'attrape une de ses mains et la tire doucement vers moi.
Puisque ma porte n'est pas ouverte, je me retrouve plaquée contre celle-ci. Manon est extrêmement près de moi. J'attends que ce soit elle qui fasse le premier pas, c'est peut-être bête, mais j'aimerais qu'elle le fasse, m'assurer qu'elle le veuille vraiment...
Manon glisse lentement une main sur ma hanche, une autre derrière ma tête, et m'attire doucement jusque ses lèvres. J'ai l'impression que le chemin jusqu'à celles-ci est interminable, pourtant, lorsque nous entrons en collision, des papillons envahissent tout mon être.
A mon grand étonnement cependant, ce baiser est chaste, presque timide. Et il se termine bien trop tôt à mon goût. Je sens les mains de Manon quitter mon corps. Cependant, celle-ci replace une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et m'attrape la main. Elle repose un rapide baiser sur mes lèvres et me chuchote.
Manon : A demain Philippine.
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Piccola Forza
RomanceManon, 26 ans, grande, blonde aux cheveux bouclés est une femme charismatique, indépendante et fière de l'être. C'est une femme d'affaire qui évolue rapidement sur la scène internationale, tout en respectant ses propres valeurs. Cependant, elle entr...