Nos Âmes Aux Crépuscules - Tome I

14 - La bouchée de la tentation

Étant donné le bal d'automne, McGonagall décida d'organiser les ASPICS blancs plus tôt cette année, car elle savait qu'avec la fin d'octobre qui approchait, il serait bientôt question d'autre chose que les examens.

Malgré le stress que de tels examens avaient provoqué, les élèves de dernière année relâchèrent bien vite la pression en pensant au bal qui approchait.

À présent, c'était les vacances et la plupart des élèves rentraient chez eux. Hermione resta à Poudlard, n'ayant pas de familles chez qui aller de toute façon. Aller chez les Weasley ce serait risquer de recroiser Ron et de provoquer un incommensurable malaise et cela, elle ne le souhaitait pas. Neville voulut présenter Luna à sa grand-mère et Luna partit donc avec lui. Quant à Drago, il n'était toujours pas revenu à Poudlard. Selon les rumeurs, il serait tombé gravement malade et avait dû être envoyé à Sainte Mangouste. Hermione se demandait ce qui avait bien pu se passer car la dernière fois qu'elle l'avait vu, il semblait en parfaite santé. Ce mal soudain semblait étrange, mais de toute manière, même s'il était à Poudlard ce n'est pas comme si elle pourrait l'approcher. Si on les voyait ensemble cela semblerait louche et elle aurait des ennuis.
Hermione resta donc seule pour la première semaine de vacances. Cependant, sa solitude ne la dérangea pas tant que cela, elle y trouva même du réconfort. Elle était toujours très fatiguée cependant et avait mal partout.

Un soir qu'elle sortait de la bibliothèque, elle croisa Ruthven, qui, aussitôt qu'il la vit, s'arrêta net.

- Miss Granger, je vous croyais partie en vacances, lui dit-il.

-Oh non...Je préfère resté ici, pour les ASPICS, vous comprenez...

Il plissa les yeux un moment et mit son index sur son menton.

- Miss Granger, puis-je vous montrez quelque chose dans mon bureau ?

- C'est-à-dire qu'il est tard...Il faut que j'y aille...

- Cela ne prendra qu'un instant, je vous l'assure, insista Ruthven.

Hermione fit la moue mais finit par céder et suivit Ruthven à son bureau. En entrant dans son bureau, il se dirigea vers une table basse et invita Hermione à s'asseoir sur un fauteuil en acajou capitonné, en face de lui. Il sortit un service à thé de porcelaine noire et remplit les tasses de thé d'un coup de baguette magique.

- Je vous en prie, servez-vous, c'est du thé de Chine, un grand cru.

Hermione porta la tasse à ses lèvres et sirota une gorgée.

- C'est délicieux, merci. Dit-elle.
- Pardonnez-moi mais pourquoi m'avoir fait venir dans votre bureau, professeur ?

Il se dirigea vers les étagères qu'il avait faites installé et fit coulisser sa main le long du dos des livres. La pièce était aménagée dans un style victorien et sentait les vieilleries.

- Voyez-vous, commença-t-il en fouillant parmi ses livres, je comptais vous en parler pendant la conférence mais...nous avons été pris de court.

Il prit un gros livre à la reliure en cuir et à la tranche jaunie par le temps et le posa sur son bureau.

- Qu'est-ce que c'est ? Demanda Hermione.

- Ceci, Miss, est un livre que j'ai écrit il y a longtemps, d'où son état, mais je pensais qu'il pourrait peut-être vous intéressez...Lui dit-il en lui tendant le livre.

Hermione saisit le livre et lut en lettres d'or: La Philosophie du Bien et du Mal, une étude par Darvell Ruthven.

- Eh bien...Merci, le remercia Hermione. Je le lirais avec plaisir, cela me fera de la lecture pour les vacances.

Il la dévisagea avec intensité.

- Vous savez ce que je vois lorsque je vous observe ? Lança-t-il.

Hermione resta interdite.

- Je vois une jeune femme, seule et différente, qui au-delà de son intelligence semble à la recherche d'un savoir plus grand.

Elle fronça les sourcils avec un regard interrogateur.

- Vous savez, j'ai connu beaucoup de gens qui, comme vous, étaient avides de savoir mais aucuns ne furent capables de le maîtriser car ils n'avaient pas la détermination qui est la vôtre.

- Où voulez-vous en venir ? Demanda-t-elle en prégnant une autre gorgée de thé.

- Ne serait-ce pas merveilleux, Miss Granger de posséder la connaissance de toutes choses ? Après tout ne dit-on pas que le savoir est pouvoir ? murmura-t-il, les mains dans le dos, en se tournant face au vitrail, devant son bureau.

- Si, bien sûr, il est vrai que, souvent le fantasme de posséder le savoir absolu m'ait traversé l'esprit, admit Hermione. J'ai toujours aimé ardemment apprendre mais je sais qu'il y a des choses que je ne pourrai jamais savoir...Dit-elle avec un brin mélancolie dans la voix.
L'idée que je ne puisse percer les secrets de l'Univers me rend malade et me donne parfois l'envie de mourir.

Hermione se livrait avec telle aisance envers Ruthven que cela en était déconcertant. Tous ses ressentis, elle n'en avait jamais parlé à personne. Elle voulait les garder en elle comme on cache des secrets dans un journal intime, mais ce soir Ruthven en avait déverrouillé l'accès. Elle ne sut pourquoi elle lui révélait tout cela alors qu'elle avait si longtemps pris soin d'enfouir ses envies de grandeurs au tréfonds de son subconscient.

- Que donneriez-vous pour percer les secrets de l'Univers? Demanda Ruthven en se retournant.

Hermione sentait petit à petit une sensation de se détacher d'elle-même l'envahir, comme si on l'arrachait de son corps. Les yeux dans le vague, et ses paupières clignant de plus en plus lentement, elle regarda Ruthven fixement de ses yeux larmoyants.

- Je crois que je donnerai tout ce que je possède, admit-elle.

- Vraiment ? Demanda Ruthven d'une voix rauque. Un sourire se dessina sur son visage et il se rapprocha d'Hermione. Il avait la même expression perfide que dans le couloir avec Rogue. C'était comme s'il avait ôté un masque, et pourtant à cet instant, elle ne le craignait pas, elle avait confiance en lui.

- Seriez-vous...Vraiment...Prête...à...tout ? Continua-t-il en appuyant sur chaque syllabe. Il effleura sa main glacée sur la joue d'Hermione qui restait immobile, toujours dans cet état second, à semi-consciente.

À partir de cet instant, Hermione était plongée dans un état de torpeur avancé, elle avait fermé ses yeux et entendait de tant à autre Ruthven prononcé des mots, et elle s'entendait lui répondre dans un écho lointain.

Hermione émergea soudain de sa transe, et regarda autour d'elle un instant; elle prit le livre et sortit du bureau de Ruthven, puis de la salle de Défense contre les Forces du Mal, comme si rien ne s'était passé...