Piégés

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"Jordan regarde devant toi !"

L'intéressé se retourna et continua de s'enfoncer dans le noir avec son ami. Il avait lu la vérité dans les yeux de Nabil, et regrettait son geste. C'était peut-être la dernière fois qu'ils se voyaient. Et voilà ce qu'il en retiendrait ? Quel dommage. Il sentait Maxime aussi perdu que lui, mais la pression de tomber face à Julien avait remplacé tout le reste.

A pas de loup ils progressaient dans l'obscurité, sans allumer la lampe torche pour ne pas risquer de se faire repérer par les hyènes. Le hangar paraissait s'agrandir au fur et à mesure que les agents avançaient. Jordan fut interrompu par le bras de Maxime tendu devant lui.

"Pourquoi t'avances plus ?

- Je sais pas, j'le sens mal mec.

- On va bientôt tomber sur la sortie, Max, t'inquiète.

- J'ai un sentiment bizarre."

Au même moment, un bruit le fit sursauter. Sans le vouloir, Maxime poussa Jordan qui, ne voyant rien, chuta sur le dos. Maxime, paniqué, alluma la lampe par réflexe pour vérifier l'état de Jordan.

"Je vais bien, éteint cette lampe avant qu'ils nous vo..."

Jordan tourna la tête : à droite, à gauche, face et derrière lui, des hyènes les encerclaient. Une vingtaine. Depuis combien de temps étaient-t-ils suivis ? Avaient-elles entendu Nabil dire qu'il s'enfuyait ? Que risquait-il ? Et qui avait envoyé toute ces hyènes ? Amixem éclaira au fur et à mesure chaque visages. Jordan put ainsi distinguer les traits de Tibaud qui, sous son plastron de hyène renforcé avec des épaulettes, portait un long tee-shirt gris vert et une lentille bleue à l'œil droit pour compenser sa myopie. Tibo InShape... en chair et en muscles. Maxime éclaira ensuite un autre visage, plus féminin : c'était Andy, Andy Raconte. Avec un petit gilet gris, des boucles d'oreilles et son maquillage, on aurait presque dit qu'elle n'avait pas changé. Mais le plastron noir faisait tâche sur son corps élancé. Au teint de sa peau et à ses tics, Jordan compris tout de suite qu'elle était tombée dans la drogue, profondément, mais sans apparemment s'en rendre compte. Les hyènes s'écartèrent pour former deux colonnes et laisser ainsi passer leur chef. Cyril, un sourire narquois au lèvres. Suivit de Théo.

"Bienvenue chez les hyènes ! Qu'est-ce qui vous amène par ici, dites-moi ?

- Julien ! Il est où ?!"

Maxime, la main sur son arme, défiait son ancien meilleur ami, maintenant pire ennemi, d'un jeu de regard.

"Bien au chaud dans ses appartements ! Mais il m'a prévenu de votre arrivée, et je me suis dit qu'on se devait de bien vous accueillir, pour rendre cette visite mémorable, qu'en pensez-vous ?

- Où ils sont ses appartements ?!

- Oh, Max, max, lâche lui un peu la grappe, non ? Il vous a trahi, c'est sa vie, c'est son choix, hein ? Et puis, je ne te penses pas en mesures de demander quoique ce soit.

- T'es ridicule ça devient ennuyant..."

Jordan avait choisit de répondre à la provocation par la provocation.

"Et elle va faire quoi, la bonne du président ?"

Les hyènes rirent en cœur.

"T'auras jamais mes compétences.

- Tu penses ça ? Sur tes petites affiches partout dans la ville, t'arrive bien à plaire, t'as du style, mais dans le fond t'es juste inutile ! Et tu sais pourquoi ? Ha ! Dis leur donc, Théo !"

La boule au ventre, Jordan porta son regard sur son ancien frère de cœur, et constata avec tristesse qu'il était encore plus brisé que la dernière fois qu'il l'avait vu. Le regard noir, vide, il répondit à Cyril.

"Tu veux pas leur présenter l'équipe, d'abord ?"

Il lui chuchota, quelque chose, et Jordan distingua trois mots : "pas","encore","prêts".

"Bien sur que si, je suis sur qu'ils vont apprécier perdre leur temps ici !"

Il désigna d'abord Tibaud.

"A ma droite, mon garde du corps officiel de confiance !

- De confiance ? Pourtant j'ai de source sûre qu'il a déjà tenté de s'emparer du pouvoir ! Il s'est juste placé du côté qu'il pense gagnant à tort."

Les mots de Maxime semblèrent agacer Cyril, qui poursuivi comme si de rien n'était.

"A ma gauche, Andy, responsable d'entraîner les hyènes avant les mission. Faites gaffe, elle déteste être sous-estimée sous prétexte d'être une femme.

- Qui aime ça ?"

Andy s'adressait à Cyril, qui haussa les épaules.

"D'ailleurs, je la remercie du travail qu'elle a fait en vitesse avant de venir ici. Vous comprenez, il a fallut réagir vite, on ne savait pas que vous alliez arriver, prévenez la prochaine fois, ok ?

- Les hyènes qui nous encerclent n'ont pas l'air très entraînées, pourtant !

- Oh, mais mon cher Maxime, je ne parles pas d'elles."

Et là, Jordan vit soudainement Maxime brandir son arme tout droit sur le chef. Il se leva, la peur dans son regard avait été remplacé par de la rage intense. Il hurla:

"DIT-MOI IMMEDIATEMENT OU ILS SONT !

- Mais voyons... Ils sont déjà partis !"

Et c'est la que Jordan compris. Ils s'étaient fait prendre au piège, retenus par quelques hyènes misérables, pendant que les autres partaient en direction de leur base. Mais quelque chose échappait à Jordan.

"Vous ne savez pas où est notre QG !

- NON MAIS ILS SAVENT OU J'HABITE ! JULIEN LEUR A TOUT DIT!"

Maxime ne contrôlait plus son corps. Il pensa à sa femme et sa fille. Sa fille, toute seule face à une armée de monstres.

"Alors, que vont-elles faire sans leur sauveur, hein ?

- T'ES UNE PUTAIN D'ORDURE !"

Dans un élan de lucidité, il sortit le téléphone qu'il utilisait pour échanger avec Jenny du QG. Il tapa rapidement : m.a.  f.a.m.i.l.l.e  e.s.t  e.n  d.a.n.g...

"A ça non, Max !"

D'un signe de main, Cyril envoya Tibaud, qui renversa Maxime, arracha le téléphone de ses mains et le jeta par terre, après quoi il l'écrasa de tout son poids. Mais Jordan savait qu'il ne fallait pas toucher aux proches de Max et il le vit se relever en un éclair, et il envoya de toute sa force son poing dans le ventre du garde du corps. Cyril, surpris, cria à son tour:

"Dispersez-vous, même en courant ils ne pourront pas rattraper l'escouade que nous avons envoyé, ils sont d'ailleurs sûrement déjà arrivés !

- Barrez-vous, le chef vous a dit de pas risquer vos vies !"

C'était Théo. Jordan s'approcha de lui, un gun à la main.

"J'espère que tu te rends compte de ton énorme erreur !

- C'est vous qui êtes fou !"

Cyril avait prit la parole pour défendre son conseiller qu'il savait instable.

"Vous voulez recréer le passé qu'on hait. Le manque de solidarité pendant l'épidemie nous a juste dégouté, avec ce gouvernement de merde qui n'a rien mit en place pour guérir les contaminés !

- C'est grave, ton désir de vengeance l'emporte sur ton bon sens.

- Non, j'ai juste perdu foi en l'humanité, et tu tarderas pas à en faire de même.

- On sais tous ici que se battre contre un ami tue de l'intérieur !

- Sauf qu'on est plus pote, Jordan, depuis longtemps maintenant."

Il entendu dans sa voix une sorte de crispation. A cet instant, Maxime, après avoir tenté de tirer sur quelques hyènes sans succès, arriva par derrière et attrapa Cyril par le col. Rouge de colère, les yeux brillant de larmes, il lâcha sèchement :

"Et bien, mon cher, cher ennemi, pour ton bien, retiens bien ça : NE TOUCHE PLUS JAMAIS A MA FAMILLE !"


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