Chapitre 10

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Huit jours s'étaient écoulés depuis l'apparition de la Zone, que tous appelaient ainsi, désormais. Huit jours. Plus d'une semaine. Huit jours sans adultes. Sans pères, sans mères, sans professeurs, sans médecins, sans policiers. Huit jours sans téléphone, télévision, internet. Huit jours et toujours pas de secours à l'horizon. Huit jours de déprime grandissante. Les enfants, commençant à comprendre que personne ne viendrait les sortir de là, se résignaient tout doucement à la situation.

Sept jours depuis que Caine avait fait main basse sur la ville. Tout pile une semaine. Au début, le jeune homme avait été accueilli par la majorité avec entrain. Ils avaient besoin d'un chef, de règles, et il fallait bien avouer qu'il excellait dans ce rôle. Dès qu'il s'agissait d'asseoir son autorité, il faisait des merveilles. Tous étaient épatés de voir à quel point l'élève de Coates était doué dans ses fonctions. Il donnait presque l'impression d'être véritablement pour diriger.

Seulement, en à peine sept jours, le doute s'installait déjà dans les esprits. Un doute qui ne visait pas Caine et Diana, mais bel et bien Drake. Certains s'accordaient sur le fait qu'il fallait quelqu'un de poigne, quelqu'un qui inspirait un peu de crainte pour que les règles soient respectées. D'autres, même s'ils étaient d'accord sur le principe, objectaient que le chef de la garde leur faisait vraiment trop peur.

Comme Tressie l'avait craint, la violence devenait monnaie courante du côté des shérifs, qui abusaient de leur pouvoir sans en être inquiétés. Toute personne réfutant leur autorité se voyait frapper, molester, jeter au sol ou finissait, dans un cas, la tête dans les toilettes. La peur de l'inconnu depuis l'apparition de la Zone s'était changée en crainte de voir débarquer Drake ou l'un de ses soi-disant « gardiens de la loi ».

Depuis son accrochage à la mairie avec son ami d'enfance, soit quatre jours plus tôt, Tressie s'était appliquée à tout mettre en œuvre pour ne plus le croiser. Elle passait ses journées à la caserne avec Sam, Quinn et Edilio et ses soirées, quand elle n'était pas de garde, chez Stessie en compagnie de cette dernière, de son frère et parfois de Mike et Mikey.

Elle entendait bien sûr toutes les histoires à faire froid dans le dos au sujet des crimes perpétrés par Drake, mais faisait la sourde oreille. Elle refusait d'y croire. Malheureusement, une part d'elle savait que c'était vrai, qu'il était vraiment coupable de tout ce dont on l'accusait. Ça l'attristait, réduisant à néant ses espoirs de voir renaître leur vieille amitié qui paraissait bien morte et enterrée.

Leur soirée sur la plage s'étant prolongée chez elle lui semblait déjà si lointaine... Mais elle demeurait toutefois un souvenir agréable auquel la jeune fille se raccrochait en espérant toujours, dans un recoin de son esprit, que Drake reviendrait à la raison. En attendant, elle l'évitait autant que possible. Elle n'avait aucune envie d'avoir à la confronter une nouvelle fois et, étant donné qu'il jouait également les fantômes, elle devinait qu'il devait en faire autant de son côté.

Caine, pour en revenir à lui, avait contre toute attente suivi le conseil de Tressie en chargeant plusieurs enfants, par équipe de deux ou trois, d'aller fouiller les maisons inoccupées pour récupérer ce qui pouvait l'être. Les réserves de nourriture et de jouets pour la garderie avaient été renflouées et les petits ne risquaient donc plus de s'ennuyer. Ça confortait l'adolescente dans son idée que sa discussion houleuse avec le leader n'avait pas été inutile. Elle avait pris la bonne décision. Tant pis si ça signifiait qu'elle ait pour ça perdu son plus proche ami...

– Bon. Il faut d'abord faire bouillir l'eau, puis ajouter les spaghettis, annonça Quinn en posant une grosse casserole sur la cuisinière.

Tressie, sourcils froncés, retourna pour la énième fois le paquet entre ses mains.

Gone [T.1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant