Mot de l'auteure : La musique peut être déconcentrante puisque les paroles sont en français, alors je vous encourage à l'écouter avant ou après votre lecture. :)
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Eli referma la porte sur eux, les plongeant dans la noirceur. Ariel reconnaissait la forme d'un chevalet dans un coin de la pièce et de toiles posées par terre. Sa mère avait suspendu en travers de la grande fenêtre des rangées de petites lumières. Eli trouva une prise de courant dans laquelle il brancha le fil. Les minuscules ampoules illuminèrent la fenêtre, descendant le long du mur.
Suivant le courant des yeux, Ariel vit l'une des peintures qu'elle avait faite après la mort de Jean, appuyée contre le mur. C'était une grande toile carrée, barrée de traits noirs et rouges comme des coups de pinceaux rageurs. Les lumières qui n'avaient pas été suspendues formaient une flaque d'étincelles jaunes sur le sol, juste devant le tableau.
— Comment tu te sens? S'enquit Eli.
Son émotion était passée et elle se sentait fatiguée d'avoir autant pleuré tout à l'heure.
— Ça va... je suppose. Je pourrais jamais assez te remercier d'être venu avec moi ce soir.
— C'est normal.
— Tu te rappelles le Noël il y a deux ans? Poursuivit Ariel. Quand je t'ai appelé le matin du 25 pour t'annoncer la mort de mon père, tu es venu tout de suite après. Je surveillais ton arrivée par la fenêtre et quand que je t'ai vu, je suis sortie...
Dès qu'Eli était descendu de sa voiture, elle s'était précipitée hors de la maison, s'élançant vers lui. Elle portait un vieux t-shirt de Metallica, des joggings gris et elle était nus pieds. Elle ne savait pas pourquoi un détail aussi futile que son habillement l'avait marquée à ce point. Eli avait reçu en plein visage ses longues boucles brunes quand elle s'était jetée à son cou. Elle pleurait et n'avait pas cessé de répéter son nom. Eli, Eli, Eli, Eli, Eli. Comme une interminable litanie.
— J'ai jamais aimé personne aussi fort que toi, à cet instant.
Une émotion vive traversa le visage d'Eli.
— Pourquoi...
Sa voix flancha et il s'éclaircit la gorge.
— Pourquoi tu m'as pas répondu hier soir, quand je t'ai dit que je voulais plus que notre amitié?
— Je savais pas quoi te dire! J'ai peur qu'on vive une relation qui va se terminer dans trois ou quatre mois comme toutes mes autres relations amoureuses. Si on décide de sortir ensemble et que ça se termine mal, on pourra jamais retourner à ce qu'on avait avant! Tu es l'un des piliers les plus importants dans ma vie, Eli. Je supporterais pas de te perdre.
— Pourquoi, mais pourquoi, tu es persuadée que notre amitié est foutue? Tu nous condamnes à l'échec alors qu'on a rien fait encore!
— Et hier soir, c'était « rien »?
— Tu t'es enfuie avant que...
— Tu sais quoi? S'emporta soudainement Ariel. Ça a été extrêmement difficile de te repousser hier parce que j'avais pas du tout envie qu'on s'arrête! Je te voulais tellement que ça me faisait mal! Et pour ton information, j'ai pas appelé Myriam pour qu'elle me dise quoi faire, d'accord? J'avais besoin de parler à quelqu'un de ce qui s'était passé parce que je sentais que je pouvais pas t'en parler à toi.
Ariel sentait que ses joues étaient en feu et son souffle était court. Son ami, d'ordinaire si facile à lire, avait une expression indéchiffrable.
— Je serais complètement perdue sans toi, Eli.
— Je suis là, Ariel.
Elle sentit les muscles de son ventre se contracter en l'entendant prononcer son nom. Il tendit la main vers elle et lui frictionna doucement le bras. Elle sentait la chaleur de sa main à travers la laine de son chandail. Elle releva le menton et sa bouche trouva celle d'Eli comme si elle avait fait ça des millions de fois. Ariel fut désarmée de voir à quel point ça lui paraissait normal de l'embrasser, de prendre son visage entre ses mains, de sentir sa barbe piquante sur ses paumes.
Eli lui rendit son baiser et Ariel sourit.
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Les anges de neige n'aiment pas voler
RomanceEli et Ariel retournent à Québec pour les Fêtes. Eli vient de rater une audition pour sa maîtrise en musique et il est inquiet de l'annoncer à ses parents qui espèrent voir leur fils se trouver enfin un vrai travail. Pour Ariel, le temps des Fêtes...