30. mutilă

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— Elle n'est pas morte, lança calmement l'Indomptable sans lever son regard de son journal. J'ai eu l'information de Gwenn lui-même, ce matin.

Puis, ses yeux se posèrent lentement sur son élève. En entendant cela, Laureline n'eut aucune réaction apparente. Elle reste stoïque, droite comme un piquet, alors que sa rétine lui brûlait atrocement. Pas question pour elle de pleurer devant son professeur, même si c'était de soulagement. L'Horribilis ferma son hebdomadaire.

— Elle est dans un sale état, mais elle a survécu. Je t'avais vue converser avec elle à multiples reprises, dans l'arène ou dans les gradins... je me suis bien douter que quelque chose s'était créée, entre vous deux. Et que tu l'as crue morte.

— Oui, articula simplement l'humaine.

— D'après Gwenn, elle est à l'hôpital de la capitale.

— Je vois. Est-ce lui qui est venu directement vous donner ces informations, en personne, Professeur ? fit-elle après un moment de silence.

— Non. J'ai envoyé une domestique au Nouveau Colisée, ce matin, pour en savoir un peu plus.

— D'accord.

Laureline inspira profondément. Elle revit Tess, mutilée et ensanglantée, à chaque fois qu'elle fermait les yeux. Tess est vivante, se répétait-elle, encore et encore. Mais à quel prix ? L'humaine ne voulut pas se concentrer sur les conséquences de tout ça. Le principal, c'était la vie, mais...

— Pauvre fille, grogna l'Indomptable à voix basse. Son quotidien ne va pas être simple à présent. J'en ai vu, des choses... mais alors ça... l'Horribilis qui l'accompagne a eu beaucoup plus de chance, au moins.

L'humaine virevolta et s'en alla sans demander son reste. Elle poussa les portes, traversa le hall entre ces servantes qui passaient le balai, puis monta l'escalier. Morgane et Julien dormaient encore. Un certain calme régnait, à l'étage. Elle s'enferma dans sa chambre avant de se laisser glisser contre la porte.

Des larmes chaudes, remplies d'une triste allégresse, coulèrent le long de ses joues. L'humaine resta cloîtrée jusqu'à l'heure du déjeuner.


Assez excentré de Valiroma, l'hôpital était un bâtiment en béton nu, en forme de U dont les ailes partaient vers l'arrière, et dressé sur plusieurs étages, où une ambiance triste et morose s'extirpait à chaque fois que les portes principales étaient ouvertes. Laureline leva les yeux pour observer la bâtisse dans son intégralité, avant de soupirer. Les murs étaient tapissés de fenêtres pour rendre le séjour des patients un peu moins difficile.

À pieds, elle avait pris plus d'une heure à venir jusqu'ici. Monsieur Lyraispaix lui avait accordé une journée de repos, après tout, l'humaine la méritait bien. Laureline ignora la douleur qui tiraillait chaque millimètre de ses muscles et rentra dans l'hôpital. Le hall désert était plongé dans un calme angoissant, une femme d'un certain âge était entourée d'une vitre de protection, dans cet îlot central qui servait de réception. Elle leva son regard froid vers l'humaine quand cette dernière s'approcha de l'îlot, Laureline s'empressa de lui demander si c'était possible de rendre visite à son amie.

Au début, la femme leva un sourcil, comme méfiante. Puis elle baissa son regard dur vers des papiers qui jonchaient son bureau, qu'elle semblait trier avant d'être dérangée par une adolescente aux yeux rouges de fatigue – en principe.

— Ah, vous voulez parler de mademoiselle Hundeiker ? Celle que nous avons admise d'urgence, juste après ce maudit tournoi ? poursuivit-elle en fouillant dans ses papiers sans prendre le temps de lever la tête vers l'humaine, Laureline acquiesça, muette, d'un mouvement net de la tête. Chambre C58, au troisième étage. Prenez l'escalier de droite.

Laureline et le Nouveau ColiséeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant