Ce fut la première fois que Laureline vit les domestiques aussi réactives et agitées. Le bruit de leurs pas et leurs murmures l'avaient arrachée de son sommeil. Il n'était même pas neuf heures du matin.
Quand l'humaine sortit de sa chambre en direction de la salle à manger, elle les observa courir dans tous les sens, les mains chargées de nappes, de couverts et de chandeliers. On aurait dit des fourmis au service de leur reine capricieuse et pressée. Une telle agitation de si bonne heure... Laureline descendit les escaliers d'un pas lent, la vision encore floue. Elle s'exciterait plus tard, par rapport à ce soir.
Monsieur Lyraispaix était là, devant l'âtre éteint de la cheminée, les yeux rivés sur son hebdomadaire. Il la salua d'un simple hochement de la tête quand il l'entraperçut, son élève se dirigea vers la table où la nourriture l'attendait déjà. Elle se fit un petit-déjeuner consistant – un café comme à son habitude, avec des tartines de confiture sur du pain frais, le tout accompagné d'un yaourt – avant de quitter de table, les servantes débarrassaient déjà son assiette en se hâtant. Laureline ne sut pas quoi faire pour tuer le temps et, en la voyant attendre sans ne rien faire en fixant les domestiques qui nettoyaient la table avec de grands coups de torchon humidifié, l'Indomptable remarqua à voix haute :
— Tu sais, tu ne feras pas avancer les choses en te contentant de les regarder.
— Certes...
Elle s'approcha et s'assit dans le fauteuil en face de son professeur, comme elle en avait pris l'habitude. Il ferma son journal d'un mouvement lent, tout en lui parlant :
— Pas besoin de se presser pour ce soir, tu sais. Les premiers convives ne vont pas arriver avant dix-neuf heures.
— Alors pourquoi vois-je des domestiques courir de partout dès que je me suis levée ?
— Car elles sont pressées, elles. Pas toi. Je ne te demande pas que ma demeure soit nettoyée de fond en comble à ce que je sache. Il faut que tout soit irréprochable avant ce soir. Mais toi, tu n'as rien à faire.
— Hmm. Je vois. De toute manière, je ne m'apprêtais pas à sortir ma robe dès ce matin.
— Ça serait du gâchis. Et je n'imagine pas la catastrophe si tu parvenais à la tâcher par mégarde.
— Que doivent faire les servantes aujourd'hui, plus exactement ?
— Le ménage, le repas du midi et une partie de celui du soir – et tu imagines bien qu'il sera beaucoup plus imposant que celui qui nous sera uniquement réservé –, la mise en place des tables, la préparation de la soirée avec l'organisation des services et j'en passe... disons qu'elles n'ont pas de quoi chômer.
— Elles doivent être surmenées, déclara l'humaine, les yeux rivés sur une domestique qui passa le salon à toute vitesse, en direction des cuisines.
— Ah, et certaines auront la tâche de te préparer pour ce soir. C'est la même chose pour Morgane et Julien. Ça me rappelle que j'ai une troupe de patrouilleurs qui va arriver, vers treize heures...
— Des patrouilleurs ?! Vous voulez dire des soldats ?!
La surprise de Laureline en étonna presque son maître, qui répondit d'un ton assez plat, comme si cela était une évidence :
— Il vaut mieux payer quelques gardes que ne rien faire et voir les événements virer à la catastrophe.
Mais qui serait assez fou pour s'attaquer à vous ? Je ne vous comprends vraiment pas, parfois. Toutefois, l'humaine s'efforça à hocher la tête comme signe d'approbation. L'Indomptable se massa le cou avant de se le faire craquer bruyamment. Il laissa échapper un grognement.
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Laureline et le Nouveau Colisée
FantasiPour aider son père et ses plus jeunes sœurs, Laureline n'hésite pas à tout abandonner pour rejoindre la capitale, Valiroma, pour y faire fortune dans des combats féroces et périlleux, mélangeant humains et Horribiles, des êtres dotés de pouvoirs dé...