HÉROS

CHAPITRE 38 :

Les brochettes de porc accompagnées de riz blanc au jus de citron avaient cuit doucement prêt du feu. Nous les avions mangées d'une traite, dévorant les bouchées deux par deux. Rassasiés, nous nous étions assoupis dans nos duvets. Comme à mon habitude, le sommeil ne venait pas. Je me levai. Temio s'était endormi devant le coin du feu, adossé à un arbre. Le reste de flammèches gardaient encore un peu au chaud mon frère endormi. Je pris la direction de là où je m'étais rendue la dernière fois pour chercher les brindilles. Quand soudain, quelque chose m'attrapa la cheville. Manquant de hurler de frayeur, je me tournai et vis le visage du blondinet. Renji était encore dans son matelas.

« J'étais certain que tu voudrais vadrouiller encore une fois. Chuchota-t-il. »

Il relâcha sa prise, et je me dégageais de lui. D'un regard mauvais, je le fixais en train de se relever, sortir de son duvet et se mettre à côté de moi.

« Je peux t'accompagner dans ton excursion nocturne ?
-Non. »

Ma réponse sèche me surpris moi-même. Les yeux étonnés de Renji me firent ressentir une pointe de culpabilité. Il ne faut pas qu'il me suive, je n'arriverai pas à m'entraîner sinon. Il prit une profonde inspiration et me passa devant.

« Dans ce cas je vais t'y contraindre.
-Je t'ai dit que... »

Il posa violemment sa main sur ma bouche. Sans pouvoir produire ne serait-ce qu'un cri, je me rendis compte qu'il fixait farouchement Temio adossé au tronc. C'est vrai qu'il dort et qu'on fait beaucoup de bruits. Voyant que Renji était obstiné à venir avec moi et que je ne voulais pas réveiller mon frère, je retirai la main de Renji et avançais en direction du chemin. Renji me suivit dans mon sillage.

En revenant sur mes pas de la journée, j'arrivais devant l'arbre aux branches tombantes. Renji s'assit sur un rocher qui n'était pas couvert de mousse à ma droite. Je fis face à l'arbre et dégainais ma cimeterre. Je retirai mon foulard et ma forme féline apparut. Je jetai un coup d'oeil discret dans la direction de Renji et me rendis compte que celui-ci contemplait encore les étoiles. Il a l'air d'aimer ça... Je secouais ma tête de de droite à gauche, chassant mes pensées obsessives. Je voulais m'asseoir à côté de lui, sans comprendre forcément pourquoi, mais je savais que j'avais plus important. M'entraîner pour devenir forte. Je pris une profonde inspiration et je sentis l'électricité m'envahir le corps. Je me forçais à canaliser mon électricité dans mes jambes et sautais. En l'air, j'aperçus un rayon de la Lune. Je brandis mon épée vers celui-ci et vis le reflet de lumière se poser sur l'arbre. Touché. Dans ma retombée, j'assénais un coup vertical avec mon épée et tranchais au passage quelques branches. Pourtant, je sentais mon électricité faiblir et s'évaporer. Je ne suis pas assez concentrée à cause de lui. Je vis Renji se lever du rocher où il s'était posté.

« Tu es trop lente, un ennemi au bout portant t'aurais eu encore en l'air. De plus, tu ne savais pas où trouver ton rayon de lumière. Également... »

Il s'approcha de moi et pointa de son index ma queue qui s'agitait en entendant les remarques d'Aloïs.

« Tu es incapable de combattre véritablement sans ta forme féline. Travailles davantage sur ton combat en tant qu'humaine et pas en tant que félin.
-Je n'ai pas besoin de conseils, je sais quoi faire. Répondis-je, provocante.
-Tu n'as pas besoin de t'entraîner dans ta forme féline, tu la maîtrises déjà parfaitement. Rétorqua-t-il sèchement, les yeux accusateurs. Tu ne veux juste pas sortir de ta zone de confort, mais il va bien falloir que tu le fasses.
-Je rêve... »

Je sentais une colère noire monter en moi. Je m'approchai davantage de Renji et je brandis mon poing vers lui. Voulant lui infliger un coup de poing mérité dans sa joue, je sentais que je ne voulais plus le voir. J'en avais assez. Je suis tellement faible... Cette simple pensée me ramena une boule dans la gorge que j'avais pu ressentir quelques heures auparavant. En assénant le coup, il le stoppa en mettant la paume de sa main dans ma trajectoire. Buttant dans sa main, je sentis un sentiment écrasant prendre la place de ma colère. C'est injuste...