Petites histoires d'Hometown

[OS#18] L'air d'un mort

Il ne voulut pas se lever ce matin-là, mais il le fit quand même. Devant le miroir, rien de nouveau, ce même visage pâle sans relief toujours épuisé et cerné. Depuis quand avait-il commencé à faire des nuits incomplètes ? Il ne s'en souvenait même plus, cela a dû commencer quand il devint aigri au possible. Il se sentait si lourd qu'il se demandait comment il pouvait supporter chaque nouvelle journée sans tomber en morceau, comme une vulgaire poupée désarticulée. Un soupir traversa ses lèvres alors qu'il commença à brosser lentement sa chevelure épaisse, ils étaient trop longs selon sa mère, mais au moins il pouvait se cacher derrière. Son retour dans son monde avait marqué le retour de son apathie habituelle, le jeune homme se demandait si cela n'était pas devenu un problème. Mais que dire, ça n'intéresse personne.

" Kris ! Dépêche-toi tu vas être en retard !" Cria Frisk à travers la porte.

Il ne répondit pas et se traina jusqu'à la porte, il descendit démarche de zombie et s'arrêta à la cuisine juste pour prendre un jus d'orange. Il détestait le café, il avait essayé. Mais cela ne l'aidait même pas tant que ça, qui sait, peut-être qu'un jour à force d'en prendre chaque matin il se sentirait vraiment plein d'énergie. Kris regarda autour de lui en prenant son sac, Toriel rangeait tout pour le départ, Chara dessinait encore et Frisk regardait avec intérêt l'oeuvre de sa soeur. La brune était douée, il le reconnaissait, cette passion elle la tenait de leur père, Kris trouvait cela très triste en sachant comment sa famille avait tourné. Soudain l'annonce du départ fut donnée, Chara ferma son cahier et Frisk courut jusqu'à la voiture. Cependant Kris ne bougea pas, fixant un point fixe dans le vide. Le jeune homme eut mal à la poitrine, mais il fit comme si de rien n'était.

" Kris, nous y allons." Lança posément Toriel en se dirigeant vers la sortie, mais il ne bougea pas.

" Je...je veux marcher. Vous pouvez y aller" Fit-il d'une petite voix, il se tenait dos à Toriel.

" Tu seras en retard, ne sois pas irresponsable, je vais te conduire." Insista sa mère.

" Vous pouvez y aller'' Répondit Kris neutralement.

" Hier tu as séché tout l'après-midi alors qu'Alphys t'avait demandé des craies. Fais au moins preuve de sagesse en arrivant tôt." Reprit-elle en perdant lentement patience, mais pour lui ça ne faisait aucune différence.

" Maman, je veux y aller seul d'accord ? "

Toriel soupira et ouvrit la porte ayant visiblement capitulé.

" On suppose donc que tu sais ce que tu fais jeune homme" Fit-elle d'une voix visiblement déçue.

Je te décevrai toujours de toute façon, pensa l'adolescent en toussant dans sa main. Quand sa mère ferma la porte il s'effondra comme une masse sur le sol agonisant sur une douleur bien trop intense, il se tordit dans la souffrance en hurlant malgré lui. Pourtant, la partie semblait finie hier, pourquoi fallait-il que ça continu ainsi ? Cela se suivit d'une sensation d'étranglement, de nausée et de maux de tête, ce n'était pas la première fois, cela faisait deux ans désormais. Kris se redressa l'expression emplie de surprise et d'incompréhension, hyperventilant et essayant de calmer ses battements de coeur. Le garçon se releva et s'appuya sur une chaise à proximité, et s' il dormait tout simplement ? Il ne manquerait à personne à l'école et se faire sermonner par sa mère ne serait pas une nouveauté. Alors il se débarrassa de son sac et prit la direction des escaliers.

" Retournons-y demain d'accord ?"

Susie, il avait oublié. Elle voulait y retourner, lui aussi d'ailleurs. Il se sentait un autre Kris là-bas, un plus courageux, un moins anxieux, un peu plus expressif quoiqu'il ne changeait pas plus que dans son monde à lui, un peu plus apprécié. C'était tout juste hier, comment avait-il pu oublier qu'il avait vécu une aventure digne de celle qu'il avait imaginé avec Asriel ? Il regarda son état, sa petite crise était passée, il pourrait peut-être supporter l'école. Il grogna mais pour Susie et une certaine princesse, il ferait tous les efforts possibles. Il prit donc son sac et alla vers la sortie se sentant toujours aussi mal mais aussi toujours aussi vide. Il n'avait jamais eu d'ami, il était seul et ne parlait jamais à personne. Noëlle n'était qu'une fille gentille qu'il connaissait depuis son enfance, Berdly était le dernier des enfoirés avec lui bien qu'il y ait eu des fois ou il était sympa, les autres n'étaient même pas une option pour lui. Kris s'était renfermé à son entrée au lycée et la seule qu'il ait jamais considéré fut Susie alors même que sa réputation était terrible.