Les Racines du Saule ~1. La Tige~

Chapitre 2

Nuage de Tige s'élança vers le guerrier ennemi d'une démarche mal assurée.

— Qu'est-ce que tu fais sur le territoire du Clan Tournoyant !?, s'exclama-t-elle.

Le chat ondoyant ne bougea pas et la regarda de haut.
Il s'agissait de Poil de Rivière, et sur la rive ondoyante l'attendaient Œil de Poisson, Nuage de Galet et Nuage d'Écume. En s'approchant, la novice se rendit compte avec fureur qu'il avait dans la bouche un moineau, et que le chat arborait une mine satisfaite.

— Retourne sur ton territoire !, s'écria à nouveau la chatte pour le faire fuir.

Elle jeta un coup d'œil derrière elle pour localiser Poil de Lumière, mais le guerrier restait invisible.

Les membres de la patrouille adverse s'avancèrent vers la rive en ricanant, et Nuage de Tige sentit son pelage la brûler de honte. Était-ce d'elle qu'ils étaient en train de se moquer ? Et ne se rendaient-t-ils pas compte que Poil de Rivière enfreignait le code du guerrier ?

Celui-ci se tenait en équilibre sur une racine d'arbre, et il dévisagea longtemps la novice avant de répliquer sur un ton hautain.

— Je suis dans mon droit.

L'autre, bouche-bée, ne sût que répondre.
Cette attitude était plus que provocante.
Le guerrier sourit, et miaula.

— C'est tout ce que le Clan Tournoyant a à nous donner ? Une pauvre petite apprentie qui ne ferait pas de mal à un poisson ?

Nuage de Tige sentit son pelage s'hérisser, mais son cœur meurtri garda la remarque en lui comme une cicatrice indélébile.
Elle était inutile.
Elle n'était qu'une incapable.

Et ça, même Poil de Rivière l'avait remarqué.

Ce fut ce moment que choisit Poil de Lumière pour arriver, et il feula.

— Si elle ne te suffit pas, je vais te rabattre le museau moi même, sale de face de poisson, lâcha le chat.

Nuage de Tige recula pour se protéger derrière le guerrier blanc orangé, qui était suivi de deux autres chats.

— Il est même venu chercher de l'aide pour te chasser de notre territoire, déclara Bourrasque de Jais.

Flèche de Coquelicots souffla dans l'oreille de Nuage de Tige.

— Merci de les avoir retenus si longtemps.

Mais l'autre n'avait rien fait, et son sentiment de honte dans le ventre le lui expliquait bien. Elle n'avait servi à rien.

— Tu n'es pas le bienvenu sur nos terres, Poil de Rivière, grinça Bourrasque de Jais.

Le guerrier adverse secoua la tête, et se justifia.

— Je n'étais pas sur vos terres, regarde, je me tiens sur une racine du Grand Saule, déclara-t-il en désignant le bout de bois sur lequel il se tenait.

Son camarade, Œil de Poisson, ajouta.

— Et vous savez tout aussi bien que nous que les racines du Grand Saule n'appartiennent à aucun des Clans.

— C'est vrai !, renchérit Nuage de Galet en s'avançant.

Nuage de Tige préféra laisser faire les guerriers et entreprit de fixer d'un regard noir les apprentis.

— Sors immédiatement de notre territoire..., gronda Flèche de Coquelicots. Et surtout, n'ose plus jamais insulter ainsi le Grand Saule en te servant de lui comme excuse à la fourberie du Clan Ondoyant !

Poil de Rivière retourna de son côté de la frontière dans une lente démarche provocante.

— Nous retenons que le Clan Tournoyant ne respecte pas la loi des racines, dit-il une fois de l'autre côté, nous en tiendrons compte, la prochaine fois.