CHAPITRE 16

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Nous embrassons une dernière fois les parents d'Abi sur le pallier de la porte, et lorsque Katharine est suffisamment proche de mon oreille, elle me murmure ses derniers mots : « réfléchis-y chérie ». Je l'embrasse à mon tour, n'oubliant pas de grogner en guise de réponse.

D'humeur bougonne, je mets mon casque pailleté, un cadeau au goût douteux d'Abi, puis monte derrière elle. Elle démarre sa vielle moto, et nous entamons une lente course sur le chemin de la maison.

-Qu'est-ce que t'as, demande mon amie au dessus du bruit infernal de sa machine.

-Rien, je dis trop sèchement.

Elle eut un mouvement de recule, puis elle ne dit plus rien. Elle a le don pour savoir quand je vais mal, et pour le coup, je suis énervée. Ou plutôt frustrée. Même blessée à vrai dire. Lorsque j'aidais Katharine à débarrasser la table de ce somptueux repas que nous avions dû repousser -à cause de mes mésaventures avec la personne que j'aimerai ne pas citer le nom- elle a trouvé bon de me prendre à part pour me faire la morale.

Quelques minutes auparavant.

« -Viens par là ma puce, elle m'avait dit gentiment. Je suis heureuse de ce que tu accomplie en si peut de temps, tu devrais être fière de toi. En tout cas, nous le sommes tous pour toi Théïa. Elle s'arrête là par peur que sa voix ne se brise.

Je regarde le sol, ses yeux emplis de larmes ne m'enchantent pas. Si je vois quelqu'un que j'aime pleurer, je pleure à mon tour. Je ne supporte malgré tout pas cette faiblesse, même si elle est un membre à part entière de ma famille. Elle pose ses douces mains sur mes épaules dénudés, puis me prend dans ses bras. Quelques secondes, voir minutes passent. Son odeur savonneuse me rassure comme à chaque fois, et je me laisse bercer dans ses bras maternelles.

-As-tu récupéré ton diplôme, elle me dit l'air chantant.

Un fin sourire s'empare de mes lèvres. Je sais pourquoi elle me demande ça.

-Pourquoi me demandes-tu ça Katharine, je demande joueuse.

Elle s'écarte de moi, et voit immédiatement mon sourire. D'une tape sur l'épaule, elle ricane.

-Tu sais très bien pourquoi Mademoiselle Robert, je souhaite l'accrocher au mur. Juste à côté des photos de famille dans le couloir de l'entrée. Je veux montrer à mes invités à quelles point j'ai des filles surdouées, une lueur espiègle passe dans ses yeux.

Je ne peux retenir mon rire, et je lui dit que j'ai apporté comme par hasard un exemplaire de mon diplôme. Elle est trop prévisible. Mais je pense tout de même que c'est pour faire jalouser sa sœur qu'elle souhaite l'afficher. Nous nous rendons à la cuisine ou nous entendons Abi et son père Johan se disputer sur le dernier morceau de gâteau.

-Je sais que c'est un sujet qui fâche. Je me fige. Mais que comptes tu faire maintenant, elle demande doucement.

Je me retourne, elle est adossée contre le plan de travail, les bras croisés. Évidemment, cette question était inévitable. Comment lui dire que je travail à nouveau dans ce café alors que je suis diplômé de ce beau cursus, m'offrant sans aucun doute plus d'opportunités de job qu'un simple café pour retraité ?

-Mhmmm, je bafouille.

Je sens son regard sombre planté sur moi.

-Rodolphe m'à proposé un poste à l'université, je lâche d'une traite.

Son visage s'illumine, mais je ne laisse pas sa joie perdurer.

-J'ai refusé.

Je regarde à nouveau le sol, trop lâche d'affronter son regard déçus. Un silence d'aplomb règne dans la cuisine.

Væ Victis - ThéïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant