CHAPITRE 6

63 5 0
                                    





Je décide de me lever de bonne heure ce lundi matin. Mon téléphone affiche qu'il et à peine neuf heure, et que je n'ai aucun message ni appel manqué. C'est pas comme si j'avais beaucoup d'ami. L'esprit de compétition à la Fac empêche toute familiarisation avec les élèves, je suis donc dans l'obligation de rester dans mon coin. Après tout, ce n'est pas plus mal parce que je n'ai aucune distraction. Je ne sors pas souvent, mais quand je le fait, j'en profite un maximum. Je côtoie quelques fois les amie d'Abi qui est cent fois plus sociable que moi. Puis je préfère largement ses potes complètement dingue que mes camarades coincés du cul. heureusement qu'Abi est là, avec moi, sous le même toit. Elle m'est indispensable à vrais dire. La solitude n'est pas faite pour moi.

Je file sous la douche lorsque Abi fait son apparition derrière le rideau.

-C'est toi Théïa, me demande la voix endormit de ma colocataire.

Je prend une voix grave et murmure:

-Non, c'est un cambrioleur.

Un blanc s'en suis et je me retiens de rire. Mon rideau de douche se fait limite arracher tant on tire dessus, et je vois le visage apeuré de mon amie avec une ventouse à toilette tendu vers moi. Je cache tant bien que mal mon corps dénudée, et je vois son visage se détendre lorsqu'elle me reconnaît. Évidemment que c'est moi Abi. Elle a vraiment cru que quelqu'un c'était introduit chez elle, et qu'en plus se douchait dans sa salle de bain. Je pouffe alors de rire devant son expression vide. Je décide l'arroser avec le jet de douche, et elle réagit au quart de tour :

-Mais putain t'es trop conne, elle s'éloigne vite de moi et marmonne des insultes.

J'en connais une qui s'est réveillée du mauvais pied. Je la taquine en lui envoyant à nouveau de l'eau alors qu'elle s'était éloignée, la salle de bain est déjà inondée à cause de la fuite, alors un peu plus d'eau au sol ne changera rien. Sa réaction ne se fait pas attendre : elle me hurle d'arrêter, puis me lance avec toute sa force la ventouse qu'elle avait dans les mains. Je n'ai pas le temps de réagir qu'elle vient de loger dans le rideau de douche, laissant un trou au passage. C'est à mon tour de l'incendier, lui hurlant que son comportement est trop violent. Voici notre quotidien, toujours à chercher l'autre et la m'être à bout.

Je finis ma douche et enfile une petite robe fleurie. Sa couleur orange fait ressortir ma peau dorée par le soleil. Je laisse mes cheveux encore mouillés sécher à l'air libre et fait l'impasse sur le maquillage, ne préférant pas ressembler à un panda en vu de la chaleur excessive. Abi avait insisté de nombreuses années pour que je maquille, mais je trouve cela trop embêtant. Alors je n'en met qu'à certaines occasions.

Un sourire m'échappe lorsque je repense à toute les fois où elle me prenait pour une poupée à maquiller. Depuis aussi longtemps que je me souvienne, mon amie a toujours été passionnée par la mode. Nous nous amusions à faire des défilés devant nos parents lorsque nous étions pas plus haute que trois pommes, dans nos maisons en France. Sa famille d'origine anglaise s'était installée dans l'hexagone pour être auprès de la grand-mère d'Abi, « mamie muffin » comme nous la surnommions. Elle avait toujours ses muffins fourrés au chocolat lorsque nous venions la voir chaque soir en rentrant de l'école. Habiter dans le même quartier nous a bien rapproché, à tel point qu'elle est devenue ma grand-mère de coeur. Malheureusement, sa maladie l'a emporté quelques années après. Abi et moi avions très vite sympathisé, puis nous étions chacune fille unique, on se comprenait mieux. Son intégration s'est faite très rapidement, surtout qu'elle avait de bonnes bases en français comme sa mère était parisienne.

Quand à moi, je suis née en France. Mes parents, Rinn et Florence étaient encore étudiants lorsqu'ils se sont rencontrés. Mon père était un passionné d'archéologie, c'est pour cela que nous étions dans le Nord de la France, à côté de nombreux centres de fouille. Il est arrivé en France pour y faire ses études, il préférait se rapprocher des pays dont il entendait parler à chacun de ses cours d'antiquité. Avant de m'avoir, mes parents ont fait le tour des continents, il me parlait de leurs voyages avec des étoiles dans les yeux. Ma mère elle, était folle amoureuse, et le suivait de partout. Elle a toujours été très fragile avec des tendances dépressives, mais elle avait trouvé son âme sœur, son bouclier qui serait là pour la protéger. Malheureusement, lorsque  mon père est décédé, ma mère n'avait plus ce pilier pour l'aider à tenir debout, elle n'avait plus ce bouclier qui la protégeait des mauvaises choses et des mauvaises personnes. C'est comme cela qu'elle à finit par sombrer.

Abi me fait brusquement sortir de mes pensées en m'enlaçant le dos. Nous faisons à peut près la même taille, elle cale sa tête dans mon cou. Je reste les bras battants, et reprends mes esprits.

-Tu repensais à... elle ne finit pas sa phrase de peur de me brusquer.

Je reste muette, la boule à la gorge. Comment a-t-elle pu savoir que je pensai à mes parents ? Elle réponds à ma question muette comme si elle l'avait entendu :

-Tu te grattes nerveusement le flanc dès que tu y penses, elle murmure toujours dans mon dos.

J'enlève ma main qui grattait effectivement mon ventre, frustrée d'être trahie par ce geste incontrôlé. Je me dégage de son étreinte puis me referme, comme à chaque fois que ce sujet vient sur le tapis. Je toussote légèrement, puis prend mon sac pour lui montrer que je vais m'en aller.

C'est ça, fuit, comme toujours.

-Tu sais, le rendez-vous avec Madame Perry est la semaine prochaine, elle marque une pose en cherchant mon regard qui est planté au sol, c'est normal de se sentir...

-Non c'est bon, tout va bien, je relève les yeux vers les siens, inquiet. Pour de vrais, j'essaye plus de me convaincre moi-même.

Je lui dis que je serai de retour après mon rendez-vous au tribunal, lui expliquant vaguement que j'ai envie de sortir seule pour cette journée.

Une fois dehors, je reprend mon souffle, comme si ma respiration s'était coupée. Le sujet de mes parents est toujours aussi sensible, d'autant plus que la séance annuelle avec ma psychologue, Madame Perry approche à grand pas.

Abi me connaît assez pour savoir que cette période est dure pour moi, et la pauvre fait tout ce qui est en son pouvoir pour me changer les idées. Mais lorsque le sujet revient sur le tapis, je me referme et fuit, comme une trouillarde. Parce que oui, j'ai la frousse d'en entendre parler. Je préfère garder cela au fond de moi en espérant peut-être un jour oublier. Juste oublier toute cette tragique histoire qui me tue à petit feu.

Ma main trouve son chemin sur mon poignée, ou le mot pentos y est encré en grec ancien. Le deuil. Très ironique pour une fille qui n'arrive même pas à tourner la page.

Mon téléphone vibre dans mon sac en bandoulière, je m'en empare et découvre un message de ma grand mère :

« Bonjour ma chérie.comment vas-tu @fait il chaud à londres'ici tout va bien.nous espérons te voir très vite papi et moi.de gros bisous de la francE ».

Je ricane en voyant qu'elle a eu du mal à m'écrit ce message. Pourtant je lui ai expliqué un bon nombre de fois comment mettre la ponctuation. Mais bon, le tactile ne convient pas à tous le monde. Surtout à des octogénaires.

Mamie Janine est papi Gilles habitent dans le sud de la France, dans la ville campagnarde où je suis née. Plus le temps passe, et moins je vais les voir. Pourtant, ils restent ma vrais seule famille. Un élan de tristesse me prend à la gorge. Je devrais profiter d'eux, qui sait ce qu'il peut arriver. Surtout que la mémoire de mon grand-père fait des siennes. Ce soir, je planifierai un vol pour les revoir, et surtout pour faire un retour au source, après mon rendez-vous chez la psy.

Je décide d'appeler ma grand-mère après avoir acheté un thé glacé et mettre mise à l'ombre dans un parc, non loin du centre ville.

——————————————————

🌼 J'espère que ça vous plaira, n'hésitez pas à commenter 🌼

Væ Victis - ThéïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant