La question n'était pas bien difficile et la réponse à la portée du premier venu. Wulfried expliqua aussitôt comment désinfecter une plaie :
— Les simples que l'on peut choisir ne manquent pas. La plupart du temps, je préfère une infusion de fleurs de soucis, ou éventuellement des feuilles froissées si je ne peux chauffer d'eau. Le plantain est aussi efficace, on le trouve plus facilement dans la nature.
La vieille acquiesça sans paraître impressionnée. De fait, le jeune homme avait évoqué des remèdes courant que toute personne avec un minimum de connaissances médicinales maîtrisait.
— Pour des maux de tête ? reprit-elle, sans cesser de l'observer de ses yeux inquisiteurs.
— De l'achillée... d'ailleurs j'aurais aussi pu citer cette plante comme désinfectant. Mélangée avec du vinaigre, c'est efficace pour les coupures et autres petites blessures.
S'il voulait être exhaustif, il lui faudrait y passer la nuit. Et encore... Wulfried réprima un bâillement : il n'était pas là pour aligner les banalités ! Seulement, comme de ses réponses dépendait son lit douillet, il reprit aussitôt :
— Pour les maux de tête, j'y ajouterais des feuilles de framboisier, même si la cause est évidemment à prendre en compte.
Marhra eut une moue appréciatrice. Iscely déposa trois tasses fumantes devant eux et acquiesça en souriant. Cette dernière devait aussi connaître cette infusion : pas de quoi être fier, estima Wulfried, si même cette gamine savait que le jeune homme avait vu juste.
Mais la vieille n'avait pas dit son dernier mot :
— Et qu'utiliserais-tu pour raviver un cœur un peu trop faible ?
Wulfried s'efforça de cacher sa surprise : il ne s'agissait plus là de remèdes de grand-mère couramment utilisés et sans réel danger. Il fallait une vraie connaissance du corps du malade pour employer de telles plantes à bon escient. Le guérisseur mit quelques secondes à réfléchir pour évoquer ce qui lui paraissait le plus approprié.
— Je tenterais un mélange d'aubépine pour aider au fonctionnement du cœur et de mélisse pour réguler les battements.
La vieille plissa les yeux, comme si elle évaluait ce qu'il venait de répondre. L'impression désagréable d'être jaugé se fit plus forte, jusqu'à ce qu'elle insiste :
— Et s'il y a urgence ? Que le cœur va lâcher.
— J'emploierais de la digitale. Les feuilles, à très petite dose. Le remède peut être pire que le mal.
Le jeune homme eut enfin le plaisir de voir Marhra satisfaite. Il s'accorda une gorgée de tisane où il reconnut des notes de camomille et de fleur d'oranger. Puis il prit conscience de sa situation : pouvait-il boire cette préparation en toute confiance ?
Comme si elle lisait dans son esprit, Iscely, lui fit un signe d'encouragement pour avaler sa tasse. Toujours ce gentil sourire. Wulfried le lui rendit, un peu nerveux. Personne n'était aussi avenant avec un parfait étranger. Qu'attendait-elle de lui ?
Cependant, Marhra n'en avait pas terminé. Il savait qu'il l'avait impressionnée, mais cela ne devait pas suffire. Elle eut, l'espace d'un instant, un rictus mesquin et ajouta, après avoir soufflé sur sa tisane brûlante :
— Et pour enfanter ? Aider la mère au travail ?
Sans doute espérait-elle le prendre en défaut. Nul n'ignorait que les accouchements étaient une affaire de femmes, la plupart du temps. Nombre de sages-femmes et d'accoucheuses mettaient simplement les hommes à la porte lorsque les premiers signes du travail apparaissaient. Quant aux médecins, ils préféraient bien souvent laisser le soin à ces dernières d'intervenir.
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Guérisseur
FantasyEn refusant de marcher dans les pas de ses parents, Wulfried pense faire le choix de la liberté. Passionné d'herboristerie, le jeune homme veut devenir guérisseur. Non, ce n'est pas l'amour de son prochain qui le porte, mais l'appât du gain ! Sans é...