Intrigué par la boite mystérieuse que Marhra avait posée sur le sol dallé du cachot, Wulfried oublia rapidement les états-d'âme d'Iscely.
- Aujourd'hui, mon garçon, nous allons commencer par visualiser nos propres Fils. Ensuite, je te montrerai comment faire avec un autre organisme.
Malgré sa curiosité, le jeune homme eut envie de rétorquer qu'il était épuisé. Il s'abstint, cependant, et étouffa un bâillement.
- Je sais que tu es fatigué, reprit Marhra avec un sourire railleur. Mais, justement : il te sera plus facile de lâcher prise ainsi et de me laisser entrer dans ton esprit. Ce sera moins douloureux.
Enfin une bonne nouvelle ! Un peu rassuré, Wulfried se décida à obtempérer. Il ferma les yeux et abandonna ses mains à la vieille femme.
L'étau désormais habituel se forma, pesant. Le jeune homme tâcha de l'accepter. La pression sur ses tempes enflait, comprimait son front. Wulfried se força à respirer lentement. Cette fois, la lame se matérialisa aussitôt et pénétra en lui comme un couteau bien aiguisé. La souffrance, aigüe, se retira aussitôt.
Le néant.
Puis son Fil de Vie, étincelant.
A sa base, celui de Marhra croissait calmement, en circonvolutions couleur de suie.
- Parfait, l'encouragea la voix lointaine de la guérisseuse. Maintenant, suis-moi.
Les entrelacs de la vieille femme rampèrent au sol, entrainant les lumineuses spires du jeune homme.
Plus loin, Wulfried découvrit un grouillement luisant. Un écheveau de Fils mélangés qui, à première vue, lui inspira un recul instinctif.
- Dans la boîte, se trouvent des cafards, expliqua Marhra sans tenir compte du mouvement de crainte de son élève. Chacun possède un Fil rudimentaire. Tu vas commencer par t'en approcher doucement.
Muselant son appréhension, Wulfried obéit. Du moins, il essaya. Son instinct lui interdisait tout contact. Son propre Fil résistait, réticent devant cette peur primaire.
Le jeune homme insista, concentré. A nouveau, sa tête le faisait souffrir. La douleur irradiait dans tout son corps.
Puis, comme si une digue se rompait, son Fil bondit en avant et se jeta contre l'amas grouillant. Les circonvolutions de Marhra collèrent aux siennes et la vieille femme grogna :
- Doucement...
Trop tard. Des Fils brisés se recroquevillèrent puis ne bougèrent plus. Au plus profond de lui-même, Wulfried sentit la mort faire son nid. L'obscurité prit de l'ampleur, lui saisit le cœur, glaciale, et...
- Ouvre les yeux, idiot ! cria Marhra en lui assenant une claque monumentale.
Sonné, Wulfried mit un instant à recouvrer ses esprits. Il avait l'impression désagréable que la couchette vermoulue sur laquelle il était assis se dérobait sous lui. Ses dents claquaient tant il tremblait de froid.
- Ce ne sont que quelques cafards, je te rappelle, le gronda la vieille femme avec mauvaise humeur. Tu ne vas pas te laisser perturber par leur mort, non ? Tu as besoin de t'entrainer.
Wulfried passa une main dans ses cheveux pour tenter de se ressaisir. Il grelottait, était trempé de sueur et une boule au ventre le taraudait, lui donnant envie de vomir.
- J'ai... j'ai eu l'impression... Je ne sais pas...
- Que la mort elle-même venait te chercher ? C'est normal, et va falloir t'y faire. Enfin... j'espère surtout que tu vas arrêter de tuer les Fils que tu approches. Tu es trop brutal.
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Guérisseur
FantasyEn refusant de marcher dans les pas de ses parents, Wulfried pense faire le choix de la liberté. Passionné d'herboristerie, le jeune homme veut devenir guérisseur. Non, ce n'est pas l'amour de son prochain qui le porte, mais l'appât du gain ! Sans é...