La jeune fille partit de son habituel pas vif et Wulfried ne tarda pas à la prendre en filature. Il n'était pas Traqueur pour rien ! Certes, les indices laissés n'étaient pas très importants en ville, comparés aux vastes plaines qu'il avait l'habitude de parcourir. Cependant, il bénéficiait, comme tous ceux de sa guilde, d'une certaine aisance pour se dissimuler. La chasse à l'homme était ouverte ! Ou, plutôt, la chasse à la demoiselle !
De nouvelles ruelles, des étals de moins en moins nombreux et, bientôt, Wulfried se retrouva sur une allée qui ne contenait plus que des habitations décrépites. Ce quartier, bien plus paisible, quoique toujours aussi pauvre, ne donnait guère envie de s'y engager. Cependant, devant lui, la robe blanche d'Iscely continuait d'avancer avec légèreté.
Prudent, le jeune homme prit davantage de distance. La voie, peu fréquentée, ne lui offrait plus de cachette si l'apprentie se retournait. Les rares passants lui jetaient des regards méfiants et il espéra ne pas attirer l'attention. Un nouvel angle de rue et, soudain, Wulfried jura entre ses dents : par les Six ! Où cette fille était-elle passée ?
Il se trouvait dans une impasse. Devant lui, une dizaine de masures se pressaient les unes contre les autres, autour d'une placette ornée d'un arbre chétif et d'un banc de pierre. Personne en vue, impossible de demander si l'apprentie était entrée dans l'une de ces maisons.
Wulfried s'approcha sans bruit, mais certains volets étaient fermés et ceux qui ne l'étaient pas dévoilaient de petites fenêtres aux tissus huilés en guise de vitres. Impossible de regarder à l'intérieur des demeures. Quelques éclats de voix discrets, les pleurs d'un bébé, mais, autrement, le calme régnait.
Le jeune homme hésita. Devait-il attendre là ? Et puis, pour découvrir quoi ? Iscely pouvait simplement rendre visite à sa meilleure amie ou à son amoureux, non ? Quoique... Elle avait sous-entendu être assez seule, cette hypothèse ne tenait donc pas. Pratiquait-elle des soins en cachette ? Peu probable, puisqu'elle avait déjà fort à faire avec sa "tournée". D'autant que Marhra paraissait du genre à ne tolérer aucun écart et tout le monde savait qu'exercer en dehors des règles de sa guilde constituait une faute grave. Une apprentie n'avait pas à agir seule.
Alors, quoi ? Un petit trafic quelconque, comme ceux auxquels nombre de citadins de Mreoria se livraient ? Des herbes médicinales ? Certaines drogues se vendaient sans doute une fortune. Sous ses airs de gentille fille innocente, Wulfried était certain qu'Iscely devait bien cacher un côté un peu plus sombre : personne n'était entièrement irréprochable.
Un enfant surgit d'une porte et fila à travers la cour avant que le Traqueur n'ait pu le retenir. Wulfried décida de prendre son mal en patience. Tierce allait bientôt sonner et l'apprentie n'aurait d'autre choix que de sortir à son tour. Il s'installa un peu à l'écart de la place, sur des escaliers de pierre menant à une masure abandonnée.
De longues minutes passèrent puis, au moment où la cloche de l'église faisait sursauter Wulfried, une robe blanche bien connue se faufila hors d'une habitation.
Si le jeune homme avait eu dans l'idée de ne pas se montrer, il revint rapidement sur sa décision en voyant l'état d'Iscely : chancelante, la jeune fille entreprenait de traverser la cour. Chaque pas semblait lui coûter et la mener vers une chute de plus en plus probable. Que lui était-il arrivé ?
Sans plus se poser de question, Wulfried rejoignit l'apprentie pour la soutenir. Juste à temps, car elle s'affaissa à demi dans ses bras. Elle leva des yeux épuisés vers lui. Il remarqua qu'elle tremblait et que sa peau noire tirait vers le bleu nuit.
- Tu es blessée ?
Elle secoua lentement la tête et s'appuya sur lui.
- Qu'est-ce que tu fais là ? souffla-t-elle avec difficulté lorsqu'il l'eut aidée à s'asseoir sur le banc de pierre.
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Guérisseur
FantasyEn refusant de marcher dans les pas de ses parents, Wulfried pense faire le choix de la liberté. Passionné d'herboristerie, le jeune homme veut devenir guérisseur. Non, ce n'est pas l'amour de son prochain qui le porte, mais l'appât du gain ! Sans é...