Suite

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La vision d'un poing qui me fracassait la gueule me fait subitement sortir de ma léthargie, les mêmes sensations reprennent le dessus, le poids sur mon estomac et la boule dans ma gorge se faisaient plus insistant, cette fois l'air était totalement irrespirable, j’étais à deux doigts de ne plus sentir mon existence, quoique je ne la ressentais pas vraiment dernièrement...
Les bruits indescriptibles emplissaient la salle et je me préparais à recevoir le choc des décharges électriques pour me remettre d'aplomb. Cependant, au lieu de me sentir mieux, elles font revenir en moi des souvenirs que je voudrais oublier, les viols, les coups, Diane, mon amour pour Viola, la fameuse nuit puis plus rien... J’étais encore perdue mais je ne voulais plus l’être. Je me répétais que j'allais devoir faire face à mes souvenirs pour me rappeler que je n’étais pas une lâcheuse. J'ai passé toute ma vie à me battre pour être quelqu'un, pour que l'on me respecte malgré celle que j’étais, il n'est plus le temps pour moi de tout abandonner maintenant, pas après avoir goutté au bonheur.
J'essaye d'ouvrir mes yeux après ce discours optimiste et j'y parviens. Mes douleurs physiques accompagnaient mon réveil ainsi que les larmes que je versais dans mon subconscient.
La première chose que je remarque en ouvrant mes yeux c’était une silhouette assise en califourchon sur le canapé de la chambre, recouverte d'un plaid gris avec des écouteurs vissés aux oreilles. C’était elle...
Je ne savais si elle dormait ou si la musique résonnait trop forte pour qu'elle m'entende mais je l'appelle d'une petite voix en grimaçant à cause d'une douleur lancinante à la tête. Elle se relève violemment en faisant tomber le plaid pour me rejoindre. Son visage n’était pas très beau à voir, elle s’était même rasée le crane. Des cernes ornaient ses yeux et son teint que je connaissais éclatant était devenu terne, blafard. Viola me gratifia d'un petit sourire qui m'enleva le moindre de mes peines et me fit une petite caresse sur le visage. Je fermai mes yeux satisfaite d'avoir aujourd'hui vaincu la mort et de m’être réveillée devant celle que j’étais destinée à aimer.
Elle m'abandonna un instant et je pus me remettre un peu de mes émotions. Une minute plus tard, un médecin faisait son entrée dans la chambre suivi d'une infirmière.
Il m’ausculte et me parle gentiment, il donne des directives à l’infirmière qui prend des notes en acquiesçant à tout ce que le docteur disait. Elle m'injecte des trucs dans le sérum après le départ du docteur et s'en alla sans daigner me regarder.
Je pousse un souffle de soulagement en m’étirant assez lentement pour ne pas me faire mal. J'essaye de m'asseoir sur le lit quand je fus interrompu par Viola qui rentrait avec un plateau en main.
- Qu'est-ce que tu fais, rallonge-toi. Me dit-elle en déposant le plateau sur la table de chevet.
- J'ai mal au dos. Lui répondis-je d'une petite voix.
- Tu sais que tu as fait deux crises cardiaques en deux jours? Tu dois te ménager et reprendre des forces.
Je me rallonge et lui fais une place à mes côtés. Elle s'asseye, saisit le bol et s’apprête à me donner une cuillerée de sa soupe. Je grimace car elle n'avait aucun goût, trop peu d'assaisonnement. Elle le remarque et me dit :
- Ne t'en fait pas pour le goût, c'est une soupe revigorante, elle contient des vitamines et beaucoup de protéines.
- Tu pouvais au moins l’assaisonnée.
- Le docteur a dit, et je cite:" le sel à quantité modéré".
- Là il n'y en a pas du tout.
Je boude dans mon coin mais ouvre la bouche à chaque nouvelle cuillerée de sa soupe dégueulasse. Viola me félicite après qu'elle m'ait forcé à engloutir tout le contenu du bol. Elle s'allonge ensuite à mes côtés et me prend dans ses bras en me caressant les cheveux.
-Tu m'avais tellement manqué Line. Ta voix, ton regard. Je me pointais ici chaque jour, priant, espérant que tu te réveilles.
- Chaque jour?
-Le médecin ne t'a pas parlé?
-Si mais... J'ai dormi combien de temps?
- Tu ne dormais pas Line... On m'a dit que tu étais dans un coma à cause d'un coup violent que tu avais reçu à la tête qui t'a causé un traumatisme crânien. Tu as passé 2 semaines sans jamais te réveillé.
Là, je perdais le nord... Ce n’était pas vraiment ce à quoi je m'attendais. Ce qui s’était passé semblait tellement récent pour moi que j'avais du mal à croire que tout ce temps s’était écoulé depuis.
- Ah bon! Lui répondis-je simplement.
- Oui, tu t'en souviens?
Je cache mon visage au creux de son cou et secoue la tête de bas en haut, comme pour lui répondre un oui silencieux.
- Je suis fatiguée. Lui dis-je.
Elle fait mine de se lever mais je la retiens en lui disant de rester près de moi. Elle me répond un d'accord sans voix et me rapproche plus près de son cœur que j’entendis battre calmement. Sa chaleur se mélange à la mienne et l'odeur qu'elle dégageait m’était familier, je ferme les yeux et me laisse emporter dans un long sommeil sans rêve et sans cauchemar.
Le lendemain semblait prometteur, entre mon fabuleux réveille accompagné de baiser sur toutes les parcelles de mon visage ainsi que la dispute enthousiasmée entre mon infirmière et ma copine sur qui allait me donnait mon bain, je ne savais plus où donner la tête.
C'est évident que Viola l'avait remporté sur elle, je ne voulais pas non plus qu'elle me touche, déjà qu'elle me lançait des regards méchants quand personne ne la regardait, me retrouver seule dans un espace fermé en sa compagnie ne m'enchantait pas  plus que cela. 
Son touché et la sensation de ses douces mains qui prenaient lentement possession de mon corps m’avaient manquer. L'eau, pourtant froide, me brûlait la peau, le regard doux qu'elle posait sur moi était insoutenable. J'avais tellement envie qu'elle me fasse l'amour, dans cette salle de bain d’hôpital. Au diable mes blessures et mes douleurs, l'envie que ses gestes ô combien chastes me procuraient était au dessus de tout.
À contre cœur, je me laisse envelopper dans une serviette blanche et suivi ma Viola pour me rhabiller d'une robe d’hôpital. Elle m'aide ensuite à me rallonger et me rejoint sur le lit.
-Tu vas mieux?
- Oui, mais j'ai trop hâte de rentré.
- Moi aussi ma puce, tu m'avais trop manqué.
Ses doigts se posèrent sur ma joue et son regard allait de mes yeux à mes lèvres. J'avais envie qu'elle m'embrasse, comme avant, que je ressente encore son amour par ses baisers. Viola hésitait mais, incapable de lui résister, je franchissais les millimètres qui nous séparaient. Cette délivrance... Ce cri silencieux d'une nouvelle liberté qui était mienne. Je ressentis toute sa passion pour moi dans sa manière de me presser contre elle tout en évitant de me faire mal. Sa langue au contact de la mienne faisait naître les mêmes décharges électriques à l'origine de mon réveil. Mon cœur battait à se rompre alors que sa main traçait sa route vers ma taille pour me garder fermement au plus près de son corps. Viola m'avait tellement manqué, tout cela me manquait terriblement.
Le son d'un raclement de gorge nous pousse à nous séparer.
- Ici ce n'est pas un hôtel, espèce de ... Sifflait l’infirmière, dégoûtée.
- Gare à toi si tu insultes ma femme. Lui coupe Viola.
- Ce sont vos médicaments. Répond-elle en me les envoyant à la figure.
Viola est rentrée dans une colère noire, et, le temps pour moi de l’arrêter, elle giflait déjà l’infirmière en la poussant hors de la chambre. Elle revient vers moi ensuite, m'embrasse le front puis ramasse les pilules éparpillées sur le lit.
- Je vais te chercher de l'eau.
Je secoue la tête et elle sort, la colère encore présente dans le fond de ses yeux.

Chronique de ViolineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant