Enfin. Un signe.
Être séparé de lui était la pire des tortures. Cela faisait quatre mois déjà qu'il était parti, ses beaux yeux brun baignés de larmes, écarquillés sur des images qu'il ne parvenait pas à chasser. Il avait claqué la porte avec violence, après avoir hurlé une promesse terrible, un sort scellé à jamais. Je ne l'avais pas cru. C'était impossible. Il ne pouvait pas faire ça... Le pouvait-il ? Après tout, qu'est-ce que j'en savait ? Cette situation ne s'était jamais présentée en plusieurs milliers d'années.
Il ne m'avait même pas laissé le temps de me justifier. Rien n'était arrivé par hasard. Rien. Mais je n'avais pas pu le lui dire. Pourtant, j'avais tenté de le calmer, de lui parler, le désespoir me dévorant au fur et à mesure que je comprenais que je l'avais déjà perdu.
Anéanti, il avait refusé de l'écouter, puis avait proféré cette malédiction d'une voix pleine de rage, de douleur, de déception. Jusqu'à ce moment-là, je n'avais pas compris qu'il irait au bout. Pour moi, il était évident qu'il allait revenir. On prendrait alors le temps de s'expliquer, enfin il admettrait le fait qu'un ennemi nous menaçait en tentant de détruire notre lien. Après tout, ensemble, on avait traversé des situations tellement plus dangereuses... Rien ne pouvait les séparer. Rien.
Cependant, on était maintenant séparés depuis cent vingt jours qui m'avaient semblé s'étirer plus que les siècles que j'avais déjà parcourus. Le vide avait envahi mon quotidien, vide que je n'avais pas cherché à combler. Même la musique m'avait abandonné. Mes doigts, sur les touches du piano, restaient inanimés. Le silence s'insinuait partout. Dans chaque interstice de ma vie, dans chacun de mes souffles que je n'entendais plus la nuit. Son battement de cœur me manquait, son rire, ses chants incessants. Cette absence terrible me rendait fou, contractait chacun de mes muscles à l'intérieur de moi. Un seul but me poussait à me lever le matin, depuis ce jour funeste : le retrouver, lui demander de m'écouter enfin, d'accepter ma version des faits. Je l'avais cherché partout à la surface de la planète, espérant une trace infime, un indice.
D'habitude, je l'entendais dans ma tête ; il me parlait, même quand il partait loin. C'était notre lien, notre union parfaite. Nos voix ne se quittaient pas, nos pensées demeuraient reliées. Ainsi, on n'était jamais séparés. Toujours fusionnés, pour l'éternité. Mais depuis son départ, je ne l'entendais plus, il avait fermé son esprit. Était-il mort ? Non, impossible ! Il ne pouvait pas mourir sans moi !
Et enfin, un signe.
Je l'avais finalement perçu en plein sommeil. Un cri d'agonie terrible qui s'était répercuté contre les parois de mon crâne, me réveillant en sursaut. Hagard, j'avais fouillé du regard les ombres de ma chambre, cherchant à comprendre. Je l'avais rêvé ? Peut-être, et pourtant... Le cri se répéta, et cette fois j'étais bien conscient. Il avait rouvert son esprit un bref instant, une brèche dans le silence, et je pouvais distinguer où il se trouvait. Je connaissais le lieu qu'il contemplait. C'était à seulement quelques kilomètres de là ! D'un geste brusque, je repoussa les couvertures, trébucha en me précipitant vers la fenêtre.
En toute hâte, je pris mon envol, avalant la distance à tire-d'aile. Je l'avais retrouvé. Le soulagement balaya mes mois d'angoisse. Ma raison de vivre était tout près désormais, j'allais le rejoindre, le sauver, le serrer dans mes bras, lui promettre que plus jamais je ne le décevrait... Je ne pouvais plus entendre ses pensées, mais je savais où l'atteindre, et bientôt on serait réunis. Le soleil du matin réchauffa mes plumes, la brise me poussait en avant, comme solidaire de mon effort.
Je fit un grand cercle au-dessus de la roche blanche qui reflétait les rayons de l'aube. Mon regard perçant scrutait chaque détail du paysage.
Tout à coup, je le vis, et mon cœur fit un bond. Quelque chose n'était pas normal. Il était couché au pied de la falaise, au bord de la mer. Ses cheveux avaient foncé à cause de l'eau qui montait puis descendait autour de sa silhouette pâle, le recouvrant en rythme d'une pellicule brillante sous la lumière naissante. Ses jambes et son cou formaient un angle bizarre avec le reste de son corps. Brisé. Il ne respirait plus. N'était plus... J'étais arrivé trop tard. Aussitôt un vertige me saisit, la bile remonta dans ma gorge. Qu'était-il arrivé ? Pourquoi ? Si j'avais pu, à ce moment-là, j'aurais hurlé ma détresse, mon désespoir, mais les oiseaux ne hurlent pas.
Je ferma brièvement les yeux en planant au-dessus de la plage. Pourtant, le soleil annonçait une si belle journée... Le ciel s'étirait à l'infini, parfaitement bleu, uni à la mer qui scintillait joyeusement sous la lumière d'été, pailletée d'or et d'argent. Mon ombre à moi, immense, se reflétait sur les vagues dansantes que je survolais. Un parfum iodé mêlé à celui des fleurs flottait dans l'air. Du laurier rose. Tout embaumait le laurier-rose. Non, personne ne devait mourir par une journée pareille. Le monde était tellement vivant !
Je savais que je ne pouvais pas vivre sans lui. Il ne pouvait pas mourir sans moi. Alors, le cœur saignant de douleur, je replia mes ailes et me laissa tomber comme une pierre dans les flots. « À bientôt, mon ange », songeais-je tandis que l'eau se refermait derrière moi, telle une tombe mouvante et glaciale. La lumière dorée s'atténua dans les profondeurs, ainsi que les bruits de la vie. Bientôt, j'oubliai tout et me perdit dans les ténèbres...
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Bonjour tout le monde ! Me revoilà ! ^~^
Oui ça fait pas longtemps que je vous ais laissé mais bon, il me tardais de commencer cette réécriture !
D'ailleurs, les chapitres risquent d'être un peu plus court mais rien d'alarmant. J'espère que cette histoire va vous plaire, que les personnages aussi et que vous aller prendre plaisir à lire ^-^
Sur ce bonne lecture et bienvenus dans le monde de "Memories"~
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Memories | [MarcoxAce]
FanfictionAce a déménagé en Provence avec ses parents et y commence sa première année d'université. Passionné de musique et de théâtre, il mène une existence normale. Jusqu'à ce qu'il fasse cette troublante série de rêves dans lesquels un homme lui parle, et...