Chapitre 21 : bienvenue dans la politique naine

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On donna à Géraud la charge de « responsable des défenses et de la protection du territoire nain » ce qui l'amena à présider deux fois par semaine une assemblée d'une quinzaine de consultants, dont cinq officiers, neuf conseillers et un secrétaire. Cette assemblée votait à la majorité des propositions de décrets, puis les transmettait au roi et au Haut-Conseil, pour ensuite les appliquer dans tout le pays.

La nuit avant cette première assemblée, Géraud ne parvint pas à fermer l'œil. Jusqu'aux premières lueurs de l'aube, il ne fit que réfléchir aux systèmes de défense qu'il connaissait, et aux faiblesses du pays nains.

Dans la salle du conseil, les différents partis l'attendaient déjà. Le jeune homme salua avec toute la contenance dont il était capable. Il devait avoir contracté une maladie, car son ventre le faisait terriblement souffrir et des sueurs froides lui coulaient sur le front et dans le dos. L'Héritier des Marches voulut commencer son exposé et montrer comment serait progressivement construite la défense. Mais un conseiller le rappela à l'ordre : le protocole demandait à ce que chaque personne fasse un court rapport de la situation, et de son point de vue sur les choses. Géraud réprima un soupir et donna la parole à la première personne à sa droite.

Le premier conseiller commença à exposer ses idées d'un ton qui se voulait empreint d'une grande sévérité. Sous couvert d'un langage soutenu, le nain se perdait dans des circonvolutions inutiles, dans lesquels il définissait par exemple l'usage particulier qu'il faisait d'un mot afin qu'on ne se trompât pas sur ses intentions. Ces parenthèses rendaient le discours peu compréhensible et cachaient la teneur générale du propos. Géraud crut comprendre cependant que ce premier conseiller mettait en avant l'importance de l'économie dans le développement de la cité. La défense ne devait pas trop coûter à la capitale. Au bout de vingt minutes il eut fini, et donna la parole au nain suivant, qui se lança dans le même type de discours.

Aucun rapport n'exposait des faits ; il s'agissait plutôt de requêtes déguisées, et dont le déguisement en question faisait perdre un temps précieux. Lorsque chacun eût exposé son idée, la matinée s'était écoulée. Enfin, l'après-midi, Géraud commença à expliquer les dispositions qu'il voulait prendre :

« Il faut que nous construisions rapidement des postes avancés aux frontières, une quinzaine je dirais. Malheureusement le bois sera un matériau prohibé : les loups-garous peuvent brûler ce qu'ils touchent. Des constructions en pierre restent pour moi la seule alternative, en mobilisant suffisamment de personnes pour construire un abri solide en un ou deux jours, maximum. Par ailleurs...

- Je vais être obligé de vous interrompre ici, déclara soudainement un des conseillers. Je me le permets, et vous m'en excuserez, car –et pourtant il me semble l'avoir exposé clairement, mais je peux m'être trompé- car disais-je, vous paraissez avoir oublié un point crucial de mon compte-rendu, qu'il faut bien évidemment entendre, et que, par conséquent je vous demanderai de davantage prendre en compte. J'ai évoqué auparavant la topologie des frontières –elles sont loin d'être des plaines, comme vous le savez- une topologie accidentée donc ...» et le nain continua à répéter ce qu'il avait déjà dit le matin.

« Venez-en à l'essentiel. » coupa Géraud.

Le nain ne sembla guère apprécier la remarque. Il fit quelques raccourcis et en vint à l'important : construire tant de postes avancés, dans un tel lieu, avec de tels matériaux, coûterait bien trop cher. La défense n'était pas la priorité dans un pays en paix.

« Des attaques ont lieu continuellement sur vos frontières ; des paysans doivent se battre et ne peuvent cultiver leurs terres sans se faire tuer. Vous n'êtes pas en paix. » rétorqua Géraud.

La légende d'AscalonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant