𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 2

Chapitre 4

J'ai un mauvais pressentiment quant au repas de ce soir. Je n'ai pas envie d'y assister et sincèrement, je pense que je vais partir plus tôt que prévu. Je devrais être rentrée à Ecclosia il y a de cela quelques mois encore et je suis toujours ici, à ne rien faire de ma vie et à me contenter d'exister.

Je pose mon ombrelle sur mon lit en entrant directement dans ma chambre. Je me dirige vers le dressing où une petite valise rouge est rangée –ma valise favorite–, je la saisis de mes frêles bras et reviens ensuite dans ma chambre.

Distraite, je laisse mes yeux aller et venir tout autour de moi. Ma chambre est assez grande et spacieuse. Les murs sont recouverts d'une tapisserie blanche ornée de motifs bleu foncé et le sol en parquet brun. Le lit à baldaquin trône au centre tel le roi de la pièce et il y a deux commodes placées contre le mur. Ma coiffeuse en face du lit, juste à côté une porte se dessine pour laisser place au dressing et à la salle de bains. À droite du lit, il y a une baie vitrée donnant sur un petit balcon et j'aime m'y glisser tard le soir, lorsque je me mets à penser et réfléchir à tout-va.

Quoiqu'il en soit, cette chambre va peut-être me manquer, mais ma maison m'attend. Je fais quelques va-et-vient entre le dressing et la chambre, des nouvelles affaires dans les mains à chaque fois. Quand je suis arrivée ici après qu'Eileen soit venue me chercher à Ecclosia, je n'avais aucune affaire alors la famille royale m'a fait commander de nouveaux vêtements. Je ne pourrais pas tout emporter alors je ne prends que mes choses préférées.

Une fois les vêtements faits, je me dirige vers ma table de nuit où une boule à neige trône au centre. Ma gorge devient sèche lorsque je tends le bras pour la saisir. Entre mes doigts, je dévisage l'homme à l'intérieur, enlaçant une fille dans ses bras. Ils ont l'air heureux et j'aimerais sincèrement que cela soit le cas pour ma vie mais ça ne l'est pas. Je secoue la boule à neige et des flocons se mettent à se mouvoir de partout.

Dans ma vie, j'ai rarement pu voir la neige. Avec Eileen, nous habitions dans la partie sud d'Ecclosia et par conséquent, il ne neige jamais. Et cette petite boule est une promesse faite. La promesse qu'un jour, je puisse voir des flocons de mes propres yeux en étant pleinement heureuse. La promesse qu'un jour, je sois délivrée de toutes mes souffrances. La promesse qu'un jour, ma vie reprenne un sens.

Je repose la boule à neige, une larme roulant sur ma joue sans que je ne m'en aperçoive. J'ai le cœur brisé. Je suis épuisée mentalement, comme physiquement. De devoir tous les jours paraître naturelle, souriante, heureuse, me détruit chaque minute qui s'écoule un peu plus.

D'un mouvement de rage, j'essuie de ma manche mes larmes et revient à ma valise. Cette boule à neige restera ici. Les promesses faites à Lucrenda resteront à Lucrenda. Je pousse un soupir en revenant à ma valise, mes doigts effleurant le bord et lorsque des pas retentissent dans ma chambre, je sursaute.

— Nous t'attendons pour dîner.

Je lève la tête. Je m'attendais à voir Eileen mais ce n'est pas elle, c'est Ander qui me fait face, le visage impassible, l'air impénétrable. Ses cheveux bruns sont impeccablement coiffés et ses yeux perçants me scrutent attentivement.

— Je... Oui, j'arrive.

Je ne le connais pas très bien. À dire vrai, je n'ai jamais eu l'occasion de le connaître. Je sais juste qu'Eileen est comblée avec lui, et ça me suffit de savoir ça, je suppose.

Il fait un pas dans ma chambre, un de plus et je réalise que ma valise est toujours sur mon lit. Il va comprendre et mon petit jeu de fille parfaite et heureuse va tomber à l'eau. Ses yeux dévisagent mon bagage et il relève la tête vers moi.

— Il y a un problème ?

Son ton est maladroit, je crois qu'il n'est pas doué pour discuter des problèmes avec les gens.

— Non, aucun.

Ses yeux alternent entre moi et la valise. Il a l'air un peu confus et il reprend :

— Je sais qu'on ne se connaît pas très bien toi et moi, mais si tu as un problème, je suis là, tu peux me parler.

Ça me touche dans le fond. Je suis touchée qu'autant de gens me proposent leur aide. Entre lui, Eileen, Lina, la reine et Rewind, je n'aurais aucun souci à me faire. Mais je ne peux pas en parler, ça me bloque. Je suis mieux ainsi, à tout garder pour moi.

Si je commence à en parler, les souvenirs vont refaire surface. Les gens vont me prendre en pitié, je serais considérée comme "la pauvre petite Bianca", qui a souffert par le passé et qui a du mal à s'en sortir. Et puis, quel serait l'intérêt d'en parler ? Des dizaines de femmes ont dû vivre ce que j'ai vécu, il est très probable que ma situation soit un cas normal. En parler ne ferait qu'aggraver les choses.

J'ajoute une brique à l'édifice que je me suis construis tout autour de moi, et je réponds :

— Merci, c'est gentil, mais j'ai juste eu un petit coup de mou. Ça va aller, j'arrive pour dîner.

Il hoche la tête, peu convaincu puis me fait signe de venir. Je jette un coup d'œil au miroir, vérifie ma tenue. Je me suis changée pour une vulgaire robe blanche moindre mais je n'avais pas prévu d'assister à ce repas, alors tant pis. Mes cheveux reposent toujours sur mes épaules lâchement et j'ai le visage terni, fatigué, lassé.

Je rejoins Ander en poussant un soupir et lui offre un sourire réconfortant. Nous sortons tous les deux et marchons côte à côte dans les couloirs. Je ne sais pas pourquoi Eileen n'est pas venue me chercher directement. J'aurais préféré sa présence. Ander me rend nerveuse et j'ignore comment me comporter avec lui. Je ne lui ai que rarement parlé alors nos conversations sont toujours signes de gênance.

Et alors que nous descendons les escaliers, je me prépare mentalement à affronter la famille royale de Socrenia, dont un plus particulièrement : le voleur d'ombrelle.

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Hey! j'espère que vous allez bien :)

Je pense m'en tenir à un chapitre par jour pour l'instant avec le concours que j'organise ça va être compliqué de poster +

N'hésitez pas à voter et à commenter, ça booste toujours le moral ^^

À bientôt

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