Chapitre 58

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Étonnamment, je rouvre les yeux. Une douce lumière vient m'accueillir et m'aide à relever lentement les paupières. Ma bouche me paraît pâteuse, et mes sens sont aux aguets. Sous mes mains, je sens la surface moite d'un lit et la douceur de draps. Une odeur de cannelle s'émerge de ce qui semble être ma chambre. J'ouvre alors pleinement les yeux et mets quelques secondes à m'acclimater à la lumière du jour. Je suis effectivement dans une suite royale et la décoration me fait immédiatement penser à Imir. Les rideaux orientaux ou encore les tapis rouges ornés de motifs en arabesque me rappelle mon petit séjour passé là-bas. Qu'est-ce que je fais ici ? Et pourquoi ai-je l'impression d'avoir la tête lourde, comme si j'avais dormi pendant une longue sieste ?

Je me redresse dans mon lit et un nœud se forme dans mon ventre. Je plisse les yeux, le temps de me réveiller pleinement. Une atmosphère chaleureuse se dégage de la pièce, et des bruits à l'extérieur piquent ma curiosité. Je sors de mon lit mais à peine ai-je mis un pied au sol que je m'étale de tout mon long par terre. Je me redresse tant bien que mal, m'agrippant au rebord de fenêtres. Puis j'ouvre les rideaux. La lumière vient m'aveugler alors que je balaie le jardin d'Imir d'un coup d'œil. Des enfants chahutent dans l'herbe alors qu'un stand a été installé et que Danïa, la grand-mère de Rewind, le tient. Des silhouettes familières m'interpellent. En bas, Eileen et Ander sont assis sur l'herbe, contre un arbre. Ma sœur lit un livre tandis qu'il lui touche les cheveux, enroulant ses mèches autour de son doigt.

Je cligne plusieurs fois des yeux. J'ignore ce que je fais ici, et pourquoi la lumière me paraît aussi éblouissante mais je sais qu'Eileen me manque. Je traverse la chambre à petits pas, me tenant à tour ce que je peux, les jambes flageolantes. Je sors alors de la pièce et arpente les couloirs du palais d'Imir, le visage crispé à cause de l'intensité du soleil. Personne ne fait attention à moi alors que bientôt, je suis dehors, vêtue de ma simple chemise blanche comme si... comme si j'étais malade ? Qui m'a mis au lit ?

Je fais un pas avant qu'une intense douleur se fasse ressentir dans mon estomac. Je fronce les sourcils, baisse les yeux sue mon ventre puis apporte mes mains au tissu. Puis soudain, tout me revient en flash-back. Ternera, Rewind, la trahison de... William, la tentative de me violer de Lorcan, le poignard lancé sur Rewind. Tout. Je me revois au sol, agonisante, gisant dans mon propre sang, la vie s'échappant de mon corps. Tout me revient d'une brutalité qui me cloue presque au sol. Je m'accroche au mur en assimilant ces souvenirs. Puis je lève les yeux de nouveau. Je dévisage Eileen et Ander, leur attitude presque parfaite, ces enfants qui courent dans le jardin et que je ne connais pas. Je vois Danïa tenir ce stand à gâteaux comme si elle avait fait ça toute sa vie. Je trouve que l'herbe est trop verte, le ciel trop bleu.

C'est donc ça, le Paradis ? Une version améliorée de la vie de manière générale ? Non... Ce n'est pas possible. Je passe la main sous ma chemise pour sentir la cicatrice. Je ne suis pas morte. Ce n'est pas possible.

Des aboiements me tirent de mes pensées. Je remarque alors que Tic et Tac sont en train de courir vers moi, leurs oreilles se dressant vivement. Ils viennent chahuter entre mes jambes en même temps qu'un corps masculin émerge du jardin. Je lève la tête et mes yeux croisent deux pupilles vertes. Mon cœur s'arrête. Il se tient là devant moi, la peau plus bronzée que d'ordinaire, les lèvres pleines et rosées, ses cheveux rejetés en arrière me paraissent plus longs. Il porte un t-shirt blanc, moulant ses muscles à la perfection, détonnant de son look autrefois stricte et protocolaire.

Lorsqu'il me voit, il lâche le panier qu'il tenait dans les mains jusqu'ici et se rue vers moi. Je le vois gravir les marches et puis soudain, la chaleur de son corps se diffuse contre le mien et ses bras m'enveloppent. Au loin, j'entends Eileen s'exclamer et bientôt, ses bras se rajoutent.

— Bianca, tu es réveillée ! s'exclame-t-elle.

Elle recule alors qu'une émotion lui peint le visage. Ander juste derrière elle, trois paires d'yeux se braquent sur moi.

𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant