1- Mon criminel de père

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Depuis le jour où la bataille de New-York a éclaté, il y a six mois maintenant, je fais quasiment le même rêve toutes les nuits. Un cauchemar, plutôt. Et pour être honnête, j'ai même la sensation que c'est pire qu'un simple rêve. J'ai la sensation, en réalité, qu'il s'agit d'une vision. Pas très claire, pas très sûre, mais une vision tout de même. C'est ce qui rend le rêve encore plus effrayant.

La prison du SHIELD à Washington défile sous mes yeux, mon esprit longe les couloirs remplis de cellules, elles-mêmes remplies de criminels de l'univers tout entier. Il fait nuit, aussi, seules quelques petites lumières éclairent le passage. Ces détails-là ne changent jamais : c'est toujours la même prison, toujours la nuit. Et c'est aussi toujours le même homme que je vois s'en échapper.

Ben Lewis. Mon criminel de père. Parfois il s'en sort en tuant des gardes, d'autres fois un homme dont je ne vois pas le visage l'aide à s'enfuir. D'autres fois encore, il se fait passer pour mort dans sa cellule jusqu'à finir par rejoindre la morgue et alors, il quitte la prison sans que personne ne réalise qu'il est vivant et en cavale. Oui, mes cauchemars reviennent chaque nuit depuis six mois maintenant et même si les moyens ne sont pas toujours les mêmes l'issue, elle, est en revanche toujours identique : mon père quitte la prison du SHIELD, avec en tête une idée bien précise : me faire souffrir. Me faire souffrir pour ce que je lui ai fait endurer en le livrant à Fury.

Cette nuit encore, je me réveille en sursaut, le dos transpirant et le pouls rapide. Il ne faut à l'homme allongé à côté de moi que quelques secondes pour réagir et se réveiller à son tour.

— Toujours ce cauchemar... ? me demande Bucky d'une voix endormie.

— Oui. C'est rien, dis-je alors, rendors-toi.

— Mais oui bien sûr, soupire Bucky en m'attirant à lui, les yeux toujours fermés. Qu'est-ce que tu ne dis pas, comme conneries...

Quand je fais ce cauchemar, je me sens toujours très mal. Je me sens coupable, comme si ce qui s'est passé était totalement de ma faute. Pourtant, je n'ai rien fait de vraiment mal. Même si j'ai livré mon propre père à un avenir fort déplaisant. Le seul moyen pour moi de me sentir mieux avec moi-même, c'est de voir le visage de Bucky tourné vers le mien. Même comme ça, la voix endormie et les yeux fermés, sans dire un mot, il est exactement ce dont j'ai besoin. Alors quand enfin, l'image de mon père quittant sa cellule s'évapore de mon esprit, je me glisse un peu plus près du corps de Bucky pour que celui-ci m'entoure de ses bras. Une fois là, blottie contre lui, j'arrive à nouveau à respirer.

Du moins, un peu. Pour le moment. 

L'univers de Joy - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant