L'univers de Joy - Tome 3

9- Tu n'iras nulle-part

L'endroit dans lequel nous devons retrouver l'informatrice de Batroc est absolument noir de monde. Il s'agit d'une énorme boite de nuit sur plusieurs étages, dans laquelle la musique est très forte et, d'après moi, très désagréable. Apparemment, Bucky est de mon avis.

— Comment font les gens pour danser là-dessus ? bougonne-t-il les sourcils froncés.

— Tu es trop vieux pour ce genre de soirées, James, lui répond Batroc avant de se prendre un coup dans le ventre.

L'endroit est tellement bondé que je ne sais pas par où commencer. Batroc nous a prévenus que cet endroit n'était pas fréquenté que par de gentilles et sages personnes, aussi nous conseille-t-il de nous faire le plus discret possible.

— Ok, finit par demander Sam, c'est quoi le plan ?

— Le soldat de l'hiver et toi, dit Batroc, vous restez là et vous surveillez les gens qui s'approchent de nous.

— De « nous » ? demande-je.

— Oui, me répond Georges en souriant, de nous. Viens ma belle, on va danser.

Alors que Batroc commence à me tirer vers la piste de danse, Bucky l'attrape de son bras en vibranium et l'empêche de bouger. Pour toute réponse, Georges secoue doucement la tête en souriant.

— Discrets, Barnes, dit-il, tu sais ce que ça veut dire ?

— C'est bon, dis-je à Bucky en hochant la tête, ça va aller. Quand son informatrice nous verra, elle nous rejoindra et vous pourrez vérifier les environs. D'accord ?

Sam n'a pas l'air enchanté, Bucky encore moins, mais tous deux finissent quand même par hocher la tête. Bon, très bien : alors allons-y.

Batroc m'emmène au centre de la piste de danse et nous commençons à danser, l'un en face de l'autre. Quand il se rapproche, j'effectue un mouvement de recul mais il m'empêche de me défiler en me rattrapant. Ici, il plonge son regard dans le mien.

— Tu n'iras nulle-part, me dit-il alors en souriant. Mon amie ne tardera plus à arriver, et pour qu'elle se montre il faut qu'elle nous voie... en action. Proches. Tu comprends ?

— Je comprends, oui, mais ça ne me dit rien. Désolée, je vais plutôt...

— Stop.

Alors que j'essaie de me dégager, Batroc serre mon bras et me tire vers lui avec force. Il pose ensuite la main sur le bas de mon dos, et recommence à danser. Je suis mal à l'aise, et en colère, si bien que dans d'autres circonstances je lui aurais probablement déjà coupé les deux bras.

Cependant on dirait que je n'ai pas à faire quoique ce soit. Alors que Georges rapproche son corps du mien en souriant, je peux voir Bucky traverser la pièce en marchant droit devant nous. Son regard est sombre, encore plus sombre que dans ses pires moments, et je sais ce qui va se passer avant-même que ça ne se produise. Bucky arrive devant moi, me tire des bras de Batroc avant de lui envoyer une énorme droite dans la figure. Le bras en vibranium fait son effet, et Batroc se retrouve propulsé à plusieurs mètres de là. Mais ça ne s'arrête pas là. Bucky commence à marcher vers lui, les poings serrés. Le soldat de l'hiver s'est réveillé.

— Buck ! crie-je à travers la foule jusqu'à le rattraper. Bucky, c'est bon, laisse tomber il...

Un autre coup. Autour de nous les gens commencent à s'attrouper et regardent Bucky mettre une raclée à Batroc, avant que celui-ci se relève et commence, lui aussi, à se battre. Je me tourne donc vers l'arrière et appelle Sam en renfort. Celui-ci arrive et à deux, nous arrivons à les séparer assez longtemps pour que je rejoigne Bucky et le sorte de force de cet endroit. Quand je plonge mon regard dans le sien, durant quelques instants j'ai la sensation de ne pas le reconnaitre. Et quand ensuite, je pose la main sur sa joue, mon esprit divague et je ne suis plus dans cette boite de nuit.

Je vois Bucky dans son ancienne tenue de combat, le regard absolument vide. Je le vois se battre contre des gens sans même que ceux-ci puissent se défendre, je vois la rage et la mort partout autour de lui. Quand ma vision est terminée je recule d'un pas, et il me faut quelques secondes pour reprendre mes esprits.

Bucky me regarde, et je crois qu'il sait exactement ce que j'ai vu car l'instant suivant il baisse les yeux et ses lèvres se pincent. Il a l'air... malheureux. Tellement malheureux.

— C'est bon, finit par intervenir Sam, ça suffit. Maintenant on sort d'ici. Aucune chance pour que l'informatrice de Batroc se montre, maintenant. Bravo Buck, tu as été le champion ce soir.