L'univers de Joy - Tome 3

30- Tant qu'on est tous les deux

Cela fait maintenant deux jours que je suis... revenue. Et j'entends par-là, depuis que j'ai recraché cette foutue puce qui m'a contrôlée pendant plus de soixante-douze heures. Je me souviens de tout. Je sais qui je suis, je sais ce qui s'est passé. Mais je ne me sens pas soulagée pour autant.

Bucky nous a ramenés à la maison, à Ancône, mais ça ne m'aide pas à me sentir mieux. Je n'ai pas parlé, depuis que je suis revenue. Je ne sais pas comment faire. Je ne sais pas... quoi dire.

Je n'ai pas eu le temps de souffrir, quand j'étais là-bas. Et plus important encore, je n'ai pas eu le temps de faire souffrir. J'entends par-là, de tuer.

Pour être honnête je ne me souviens même pas de ce que j'ai fait la plupart du temps. Mais avec du recul, je prends conscience de la situation dans laquelle j'étais, et de la situation dans laquelle j'ai mis Bucky. Et Sam. En réalité, c'est ça qui me rend malade.

Quelqu'un toque à la porte. Sam et les Gardiens de la Galaxie sont à la maison eux-aussi mais je sais bien que ce n'est pas l'un d'eux qui attend derrière. Alors, je me traîne jusqu'au bout de la pièce pour aller ouvrir. Quand je vois le visage de Bucky dans l'embrasure, je me sens un peu mieux.

— Salut.

— Salut, me répond-il. Je peux... entrer ?

Pour toute réponse, je hoche doucement la tête avant de retourner m'asseoir sur le lit. En face de moi à la fenêtre, je regarde les vagues ramener doucement le sable sur la plage. Regarder la mer me détend, un peu.

— Joy, si tu veux en parler...

— Je n'ai pas besoin d'en parler. Ça va aller. Il me faut juste... un peu de temps.

— Joy.

Bucky attrape mon menton et tourne ma tête vers lui, pour me regarder droit dans les yeux. J'aime cet homme, mon dieu, je l'aime plus que tout au monde.

— Je sais ce que c'est, me dit-il, je l'ai vécu. Peut-être pas de la même manière que toi, et...

— Je sais Bucky. Ça a été bien plus horrible pour toi, je le sais.

— Ce n'est pas ce que je voulais dire.

— Mais c'est ce que moi, je dis !

Bucky n'a pas l'air de comprendre. Alors, je lève un instant les yeux au ciel avant de secouer la tête.

— Je t'ai fait du mal, dis-je alors. Plusieurs fois. J'aurais pu te tuer.

— Mais tu ne l'as pas fait, me rassure Bucky en approchant son visage du mien. Joy, tu ne l'as pas fait. Je suis là, je vais bien, et tu vas bien.

— Je me sens... coupable.

— Je sais.

Buck me regarde avec une intensité particulière, comme s'il voulait me faire entrer dans ses plus profondes pensées. Je sonde son regard un instant, et je comprends. Tout comme il le dit, il sait. Il sait exactement ce que je ressens.

— Si je t'avais fait du mal, reprends-je, je ne me le serais jamais pardonné.

— Je vais bien, Joy. Et tu sais quoi ?

— Quoi ?

Bucky s'approche alors de moi, encore, et caresse mes cheveux avec douceur. Puis, il chuchote à mon oreille comme un secret :

— Tu es là, je suis là. Tant qu'on est tous les deux, et qu'on s'aime, tout ira toujours bien.