C'était un samedi matin. Je m'étais levé, enthousiaste à l'idée d'aller voir Harmonie dans l'après-midi pour lui jouer les morceaux que j'avais préparés. Je les avais beaucoup travaillés car je les trouvais magnifiques, et avais donc vraiment hâte de les lui montrer. Je descendis les escaliers, de bonne humeur. Je songeai à faire mes devoirs, comme je ne les avais pas commencés, mais me disant que j'aurais tout le temps de les faire le lendemain, je ne les fis pas. Je n'avais pas envie de faire quelque chose pouvant possiblement nuire à mon moral exceptionnellement haut.
Après manger, je pris donc avec détermination mon précieux instrument et les partitions de mon amie, et m'empressai de traverser la ville. J'allais montrer à Harmonie que j'avais bien travaillé ses morceaux. Je voulais voir sur son visage un sourire encore plus grand que ceux qu'elle dessinait habituellement, et je voulais voir ses mains applaudir encore plus intensément qu'habituellement. Même si Lise ne pouvait une fois de plus pas m'accompagner, je n'avais aucunement l'intention d'ennuyer mon public.
Elle m'accueillit chaleureusement, comme à chaque fois que je venais. Lorsqu'elle fut prête à m'écouter, assise à genoux sur son lit, avec Siegrfried entre les bras, elle me fit signe de commencer. Je jouai avec le plus de puissance que je pus, et avec mille fois plus d'émotion encore que lors de mes répétitions.
A la fin du troisième mouvement, elle m'applaudit avec autant de force que celle que j'avais mis dans ma performance, et la brillance de son sourire égalait celle du radieux soleil qui nous regardait depuis la fenêtre. Tout s'était passé à une vitesse incroyable, probablement car j'étais complètement absorbé dans ce que je jouais. Ses applaudissements et ses acclamations m'emplirent d'une grande fierté.
Je jouai les autres morceaux que j'avais préparés, elle eut la même réaction que précédemment. Une fois que j'eus terminé, je rangeai mon instrument. Nous commençâmes à discuter gaiement.
- C'était magnifique, bravo ! Tu les as bien travaillé, n'est-ce pas ?
- Oui... J'avoue que je les ai beaucoup appréciés, donc j'ai voulu qu'ils soient joués le mieux possible !
- Je vois ça ! Je les aime énormément aussi... Je suis heureuse que tu partages le même avis que moi !
Elle se leva, et alla s'asseoir sur une chaise à côté de moi.
- Je me permets de m'approcher, c'est plus simple pour discuter.
- Je t'en prie, c'est ta chambre !
- Je ne la considère pas vraiment comme telle, mais je suppose que je vais devoir m'y faire...
- Je comprends... Tu es là depuis assez longtemps, comme j'ai cru le comprendre ?
- Un petit mois, mais je pense que je n'en ai plus pour longtemps.
- Je vois...
- Sinon, tu as passé une bonne semaine ?
- Je ne sais pas... La situation entre mes amis et moi ne s'est pas vraiment améliorée, donc je me suis beaucoup ennuyé. Mais je jouais tes morceaux dès que j'arrivais chez moi, donc ça m'occupait.
- Je suis contente que tu aimes mes œuvres... Surtout que tu es l'un des seuls qui peut les écouter.
- Un jour, je suis sûr que beaucoup de gens y auront accès.
- Peut-être... J'aimerais bien.
Quelques instants s'écoulèrent sans qu'aucun de nous deux ne prononçât un mot. Je pensais au disque qui était en cours de préparation, en me disant qu'un jour il serait peut-être commercialisé. Elle a vraiment de l'avenir, décidément...
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Le Chant du Cygne
Short Story"L'avenir. L'avenir, c'est ce pour quoi l'enfant semble devoir vivre. Ce qu'il commence n'est commencé que pour être perfectionné dans le futur ; les études, l'acquisition de culture, les activités diverses en dehors de l'espace scolaire, tout n'ex...