L'amant des autres [Terminée]

Chapitre 2 : Stéphane et moi

C'est lundi matin. Et comme tous les lundis, je suis fatigué. Pas tant à cause des cours à venir, d'un weekend trop festif, ou d'une surcharge de devoirs à rendre. Non, je suis fatigué parce que je n'ai pas bien dormi. Pourquoi ne trouve-je jamais personne pour passer la nuit avec moi le dimanche soir ? Se rendent-ils compte que leur argument du ''y'a cours demain'', n'est pas valide ? Ce n'est pas comme si, le reste de la semaine, ça leur posait problème, ou que je n'avais pas cours moi aussi. Passons... Ce soir, si tout va bien, j'aurais quelqu'un pour me prendre dans ses bras.

Après un rapide passage à la cafétéria pour prendre un café, j'avise, sous les arcades de l'immense cloître qui nous sert d'université, un groupe de trois garçons, et je m'empresse de les rejoindre.

_ Salut, beauté ! » me lance l'un d'eux, imité sans attendre par ses camarades, chacun y allant du petit surnom qu'il aime me donner.

_ Coucou, mes chéris !

Cette brève interruption passée, la conversation reprend son cours, m'y incluant. Nous sommes loin d'appartenir à la même section, et moins encore à la même promotion, mais ce n'est pas l'important. Notre université a à cœur la mixité des branches autant que possible, ainsi que l'entraide entre les différentes spécialités. En gros, ils nous encouragent à nous créer un réseau de relations au-delà de notre petit univers. Et leur méthode a déjà fait des miracles, avec des collaborations aussi invraisemblables que fructueuses. Mais si c'est ce qui nous a permis de nous rencontrer, ce n'est pas non plus ce qui nous réunis tous les lundis matins.

Non, ce qui fait qu'ils sont là tous les trois, c'est qu'ils attendent ma décision, mon choix. Ils me couvent tous du regard, et je souris à chacun, tout en sirotant mon noir breuvage. L'un me dit ne pas être disponible vendredi soir, un autre demain. Je note leurs emplois du temps dans un coin de ma tête, organisant petit à petit ma semaine, et, en un sens, les leurs.

Mais, pour ce soir, j'hésite. Ce sont tous de très bons amants, et j'aime passer du temps avec chacun d'eux, même en dehors de mon lit. Mais là, je suis encore en train d'émerger de ma mauvaise nuit, et je ne sais pas encore dans les bras duquel j'aimerai dormir ce soir. De toute façon, j'ai le temps, la journée commence à peine.

_ Bonjour, Joe. » souffle une voix dans mon cou, alors que des mains se posent sur mes hanches.

Si je sursaute un peu, je n'en soupire pas moins en laissant aller ma tête sur le côté, alors que des lèvres se posent sur ma gorge, et qu'un corps viril mais doux se colle au mien.

_ Bonjour, Stéphane. » ferme-je les yeux pour profiter de ses baisers.

_ Et voilà, on sait avec qui tu passes la nuit ! » soupire l'un des trois autres avec un air mélodramatique.

_ Si tu voulais la place, il suffisait de me faire un câlin, James. » lui adresse-je un sourire taquin. « Tu sais bien que je tiens compte de vos suggestions.

_ C'est mieux pour mon orgueil quand tu me choisis de toi-même.

_ Et résultat, c'est moi qui vais lui faire des câlins cette nuit ! » réplique Stéphane, triomphant.

Nous rions tous les cinq, alors que je me laisse aller dans les bras du grand cuivré derrière moi.

Après quelques minutes supplémentaires à discuter de tout et de rien, la sonnerie retentit, et j'avale le reste de mon café en me dirigeant vers ma salle de dessin, ma main dans celle de mon futur amant.

_ Comment tu fais pour boire ce truc ? Il est fort et flotteux à la fois !

Je ne peux m'empêcher de rire. C'est vrai que le café de l'université est infect, mais ce qu'ils appellent thé n'est selon moi qu'une vague infusion.