Dans le sud-est de la France se trouvait une commune nommée Sercey, abritant une école primaire fréquentée par trois quarts des Sercenois. Un jour, Dylane et de nombreux autres élèves avaient été piégés par un groupe d'amis qui leur avait fait croire qu'Axel, le brunet aux cheveux bouclés, n'avait plus qu'une semaine à vivre. Les écoliers avaient tant pleuré.
La blague avait duré un jour, puis un autre, et encore un. Réalisant qu'il ne lui restait que quatre jours à vivre, Dylane lui avait écrit un mot qu'elle lui avait remis à la récréation. Axel l'avait lu avec ses amis. Elle lui avait naïvement écrit qu'elle aurait aimé le voir vivre pour faire sa connaissance. Ils en avaient ri. Longtemps.
Mais les semaines qui avaient suivi la blague, il était toujours en vie. Ses amis avaient fini par interpréter le mot comme une déclaration d'amour, l'embêtant alors à chaque récréation, jusqu'à la fin de la primaire, en scandant à tue-tête dans la cour : hou ! la menteuse. Elle est amoureuse. Dylane avait été très en colère contre Axel qui n'avait rien fait pour les arrêter.
Et puis, sa bonne attention avait pris un autre tournant quand Emma l'avait eu pour amoureux en CM1. Elle avait demandé aux filles d'arrêter de lui parler. Chaque fois qu'elle s'était fait une amie, Emma avait rendu l'amitié éphémère, sans qu'elle comprenne pourquoi.
Dylane s'était très vite réfugiée dans la solitude, qu'elle avait apaisée en lisant et en dessinant. Quelquefois, les garçons étaient venus l'embêter, mais elle était toujours allée en faire part aux professeurs.
Un surnom l'avait alors accompagnée pendant les deux années restantes de primaire. La cafteuse. Et puis au collège, les écoliers avaient été répartis dans des classes différentes. En début de sixième, ils avaient continué à la surnommer ainsi, mais la tendance récidivante avait rapidement pris fin.
Le plus important étant que les deux contraires s'étaient vus prendre en âge. Axel avait perçu les yeux expressifs de Dylane devenir ombrageux, et son visage se munir d'expressions presque aussi frigorifiantes qu'un critique.
Les autres avaient fait d'elle une élève assidue et réservée, bien différente de la première et dernière fois qu'elle eût été devant lui, le jour où il eût fait d'elle celle qu'il jugeait toujours, mais pour d'autres raisons. Quant à Dylane, elle avait vu la popularité d'Axel s'accroître.
Ses yeux vert jade s'étaient voilés d'un égocentrisme qui l'avait poussé à se mettre en scène. D'année en d'année, ses cheveux, qu'elle n'avait que trop bien connus, avaient pris en longueur. Ayant grandi dans une sphère qui ne l'avait jamais mise en valeur, le dessin avait été la seule activité qui lui avait fait oublier sa réalité. Alors, elle avait dessiné plusieurs dessins, dont certains qu'elle avait été fière de publier sur les réseaux sociaux.
Et puis un beau jour, l'un d'eux s'était retrouvé sur la bouche d'un flot de collégiens. Les regards, les mots, les rires, tout avait repris de plus belle. Mais personne ne lui avait dit en face de quoi ils parlaient tant. Arrivés en troisième, Dylane et Axel s'étaient retrouvés dans la même classe. Un jour, il avait pris son courage à deux mains et lui avait demandé si elle l'avait, par tout hasard, dessiné. Elle lui avait ri au nez, ripostant en disant que dans ce monde, tout n'était pas à propos de lui.
Seulement, après réflexion parasite, il avait semblé que le dessiné avait apparu sous ses traits de crayon, tels ceux qu'elle avait vus dans sa tête, tard dans la nuit ou dans la cour, elle n'avait pas su le déterminer sous le pêle-mêle d'émotions contradictoires.
Sans doute Dylane l'avait dessiné sans trop savoir pourquoi, et n'avait jamais osé lui avouer, après réalisation, qu'il se pouvait que ce soit lui pour ne pas gonfler son ego. Les deux avaient à peine échangé au cours de cette année scolaire. Axel avait eu de nombreuses conquêtes — c'était la seule chose qu'elle avait retenue, ou presque...
L'histoire était telle qu'il avait trouvé tant de traits beaux, mais jamais les siens. Ses lèvres en avaient touché tant d'autres, mais jamais les siennes. Ses oreilles avaient entendu tant de rires le confiner, mais jamais les siens. Ses yeux en avaient caressé tant d'autres de tendresse, mais jamais les siens. Axel avait répandu son amour çà et là, mais jamais sur elle.
Il ne l'avait jamais vue, ne s'était jamais intéressé à elle, quand elle avait réussi sans difficulté, même inconsciemment à travers son dessin, à trouver derrière ce profil d'égocentrique une petite pièce clair-obscur où était abrité un Axel étant fleur bleue, que même ses conquêtes n'avaient pas connu, tant bien même leur proximité.
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General Fiction"𝘜𝘯𝘦 𝘤𝘰𝘭𝘰𝘤𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯. 𝘛𝘳𝘰𝘪𝘴 𝘤𝘰𝘭𝘰𝘤𝘢𝘵𝘢𝘪𝘳𝘦𝘴. 𝘓𝘦 𝘥𝘦𝘳𝘯𝘪𝘦𝘳 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘤𝘦𝘯𝘵." À sa rentrée universitaire, 𝐃𝐲𝐥𝐚𝐧𝐞 fait ses premiers pas à Paris, emménageant dans un studio partagé avec 𝐃𝐢𝐧, streameur, et 𝐀𝐱𝐞𝐥...