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29 août, temps presque gris. Selim court. Il fonce. Essoufflé, il sent ses muscles chauffer, des picotements traversant tout son corps au moment où il boit de l'eau. Le sport l'aide ces jours-ci, à encaisser les événements : la mort, l'enterrement, les deuils de chacun, les appels à l'étranger, le vide laissé.

Pour Selim, le deuil de son père passe par le besoin de retrouver la vie. Alors il court, car s'éprouver par le sport lui procure ce dont il a tant besoin. Un cap, du défoulement, un sens et non-sens. C'est difficile car Selim tente toujours de dépasser ses limites. Mais face à ces obstacles, il se sent profondément heureux d'être en vie. Limité, mais illimité, vivant, mais ailleurs. Tout est réuni pour qu'il ressente ce que cela fait d'exister.

Mais être en vie et vivre ne signifient pas la même chose. Et l'acte de vivre recèle une dimension active que Selim tente sans cesse de réactualiser. Pourquoi vivre ? Comment vivre ? Dans ces questionnements sur le sens de la vie, le jeune homme réalise bien qu'il est incapable d'y répondre seul. Peut-être n'y a-t-il même pas de réponses. Ce qu'il cherche n'est peut-être pas un contenu, une manière de vivre appropriée en quête du bonheur. Au début de l'été, les petits détails lui suffisaient. Au milieu, les personnes et les paysages lui redonnaient du baume au cœur. À la fin, ce sont l'authenticité et la sincérité qui lui donnaient la force d'avoir moins peur.

Aujourd'hui, à cet instant t, Selim réalise ce que n'est pas tant un but qui est à définir, mais le geste même d'imprimer dans son existence une direction, une action qui se nourrit de la vie d'autrui.

Il court pour essayer de comprendre ce qu'il ressent. Il court pour comprendre ce qu'enseigne ses peurs. Il court pour traverser l'épreuve de l'expérience.

En rentrant, épuisé mais apaisé, il envoie un message à Anatole. Quelques mots pour lui indiquer qu'il a envie d'aller voir une psy pour aller mieux. C'est dans ce geste que Selim pense, pour l'instant, réussir à prendre soin de lui pour prendre ensuite soin des autres. Tout ceci afin de, peut-être un jour, comprendre la différence entre vivre et mourir.

MinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant