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Cinq jours se sont écoulés depuis la longue soirée chez Rosalie. Selim n'a plus trop la notion du temps. Il trouve que l'été passe toujours plus lentement que les autres saisons, mais dès que la routine s'installe, que le travail l'occupe, les heures défilent à une vitesse indomptable.

Le mois de juillet amorce sa fin, et le brun est étonnement moins inquiet qu'à ses débuts. Peut-être parce qu'il est plus occupé, aussi... Il soupire, c'est toujours pareil... ça fonctionne toujours par phases.

« Ma psy m'a dit que c'était pas trop possible pour négocier les tarifs sur le long terme... mais elle veut bien t'offrir la première séance, pour que t'avises après. Je t'envoie son numéro, mentionne bien mon nom. »

Le message d'Anatole l'interrompt dans ses pensées. Selim est encore en pause, assis à une table en train de manger son sandwich italien. Il regarde autour de lui, les quelques clients qui éclatent de rire ou parlent de politique. Il finit par prendre une longue inspiration puis se dégonfle lorsqu'il doit taper le message. À quoi bon aller à une première séance ? Il va bien en ce moment non ? Une seule crise d'anxiété en deux semaines, c'est peu par rapport à avant... Et puis, d'autres personnes ont sûrement plus besoin d'aide que lui... Il ne devrait pas faire perdre du temps à cette psychologue, bloquer le temps des autres...

Selim sent intérieurement qu'il se cherche des excuses. Alors pour fuir ses pensées, il se concentre sur la mastication de son déjeuner. Une main tapote son épaule droite, et l'impression de déjà-vu s'amplifie considérablement quand il croise un regard qu'il connaît de mieux en mieux. Coline Duperré, en personne, à nouveau.

- Coucou !

Elle lance la discussion, pendant que Selim pose son sandwich entouré de papier alu. Il se relève pour lui faire la bise, mais réalise qu'il a peut-être un peu de pesto au coin des lèvres. Maladroitement, il lui fait une petite accolade.

- Ça va ? J'osais pas trop t'envoyer un message depuis... l'autre soir. Je voulais pas être intrusif, avoue-t-il en s'essuyant la bouche.

Coline répond par un autre sourire.

- Moyen, j'en ai marre de m'isoler chez moi... du coup, j'essaie de m'occuper et voir des amis.

Elle salue à distance son amie de la fac, occupée derrière le comptoir du bar.

- Oh, je te laisse retrouver Mona dans ce cas.

La blonde s'installe toutefois à la même table que lui.

- Non, non, je passais te voir toi.

- Moi ? réplique-t-il surpris.

- Y a pas 36 000 Selim dans le coin.

Il sourit aussi, pour le coup, flatté par sa visite surprise. Ça fait beaucoup de Coline en très peu de temps, mais il ne s'en plaint pas. Ça lui fait juste repenser au fait qu'Isidore ne répond pas à ses messages depuis lundi, augmentant un sentiment de culpabilité sous-jacent.

Non, Selim, t'es réglo, se rassure-t-il.

- Je finis mon service dans deux heures.

Elle sort alors son portable de sa poche, muni d'une paire d'écouteurs.

- Je suis en train de me refaire tous les épisodes de F.R.I.E.N.D.S en ce moment, t'inquiète. Je veux bien un verre de limonade aussi.

Selim acquiesce en se relevant. Il chasse toutes ses mauvaises pensées pour se concentrer sur son service. Une chose à la fois. Mettre de côté la fin de sandwich, le taf, Coline, puis peut-être, s'il a le temps, repenser à son état mental.

MinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant