NÉGUENTRIA (Les Transformés - Tome 1)

Chapitre 8

Après leur rencontre avec Sunlight, les cinq amis revinrent vers les stands de créateurs, auprès desquels ils étaient passés en coup de vent une heure plus tôt. Cette fois, ils n'étaient pas pressés et déambulèrent donc dans les allées avec plaisir. Les tentes étaient magnifiquement décorées et les tables croulaient sous les créations artisanales. Il y en avait pour tous les goûts. Ici, un fabricant d'armures en cuir exposait ses plastrons, épaulières et diverses protections sur des mannequins ; à côté de son stand, un collègue d'une autre région suspendait à des cintres tuniques médiévales, foulards ou capes, et tentait de trouver un espace libre pour entasser ses différentes sacoches, bourses et besaces en tissu ou en cuir. Plus loin, un couple spécialisé dans la fabrication et la décoration de sublimes grimoires en parchemin discutait avec les exposantes voisines, deux illustratrices au style graphique très différent.

Judicaël s'attarda devant un présentoir à bijoux, les yeux brillants, ravi d'apercevoir des symboles celtiques gravés sur tous les colliers, bracelets, bagues, broches et épingles à cheveux exposés. Athénaïs et Axel, eux, s'étaient arrêtés devant une multitude de petits objets destinés aux joueurs de jeux de rôles qui voulaient vraiment se plonger dans l'ambiance de leurs aventures. Alors que la jeune femme admirait les différentes collections de dés colorés, les flacons d'encre et leurs plumes élégantes, le cosplayeur de Zeik s'extasiait face à d'épaisses ceintures en cuir où s'alignaient des dizaines de minuscules fioles contenant des liquides, des herbes, des poudres... Un parfait matériel d'alchimiste !

Quant à Varian et Liam, ils se trouvaient quelques mètres plus loin, occupés à examiner des reproductions d'armes. Les épées, masses et autres haches exposées paraissaient authentiques. Le visage du transgenre, dissimulé derrière le masque d'Ash, était aussi impénétrable que ses yeux d'un noir insondable. Il fixait en silence un portoir vertical rempli de dagues et de couteaux. Son ami était parti discuter avec l'artisan. Ils n'avaient pas tardé à sympathiser, et le forgeron moustachu avait permis à Varian de prendre en main l'une de ses épées pendant quelques instants. Le jeune homme avait soupesé la lame puis l'avait lentement élevée devant ses yeux, admiratif. Les armes blanches étaient pour lui une passion qu'il n'avait que peu l'occasion de mettre en avant. Il regardait en boucle des vidéos de spécialistes sur Internet, mais aucun club ou association d'escrime n'existait près de chez lui, et il était trop limité financièrement pour s'offrir ce genre d'objets.

Varian savoura encore un peu l'agréable sensation de la lourde garde gainée de cuir dans le creux de sa paume, puis rendit l'épée à son fabricant avec un sourire reconnaissant. Ses yeux noisette scintillaient de mille feux, comme un petit garçon devant ses cadeaux de Noël.

— Merci beaucoup !

— Y'a pas d'quoi, mon gars.

En prenant tout leur temps, les cinq amis mirent deux heures à errer de stand en stand. Leurs estomacs se rappelèrent à leur bon souvenir en début d'après-midi, les faisant pouffer. Longeant le côté gauche du château, ils jetèrent un œil aux différentes nourritures proposées – et surtout aux interminables files d'attente qui les firent grimacer avec un bel ensemble – puis se résignèrent à faire la queue. Ils se séparèrent en deux groupes : Axel et Liam patientèrent d'un côté pour acheter leurs boissons, tandis qu'Athénaïs, Judicaël et Varian attendaient de l'autre pour récupérer quelques hot-dogs et des barquettes de frites. Les repas de convention n'étaient certes pas les plus diététiques qui soient, mais ils faisaient partie intégrante de l'esprit et de l'atmosphère de ce genre d'événements.

Dédaignant les tables installées à l'ombre du château, trop peu nombreuses et déjà prises d'assaut par des dizaines de personnes, le petit groupe s'éloigna, traversa l'espace des créateurs et s'installa plus loin, dans l'herbe, le long d'un mur. Juste derrière celui-ci, un concert se jouait, mais les vieilles pierres absorbaient les bruits et rendaient le volume sonore agréable. Assis en demi-cercle, les cinq amis partagèrent nourriture et boissons. Ils mangèrent en observant autour d'eux et en discutant gaiement.