Call me Lady

Chapitre 5.

Contrairement à ce que je craignais, le dîner se passe plutôt calmement, si l'on excepte les multiples piques de Heathcliff, auxquels Edward essaie de répondre tant bien que mal, mais sans la même verve que son aîné. Celui-ci m'ignore totalement pendant l'entièreté du repas, j'en profite donc pour discuter avec la très aimable Margareth, assise à ma gauche. J'apprends qu'elle est issue d'une autre noble famille britannique, les Westdown, qui sont amis avec les Neville depuis de nombreuses années. Elle connaît ainsi son fiancé depuis leur plus jeune âge, même si elle m'avoue qu'ils n'ont commencé à vraiment se parler que depuis leur fin d'adolescence.
Mais après que je l'ai questionné rapidement sur sa relation avec Heathcliff, je sais que c'est mon tour de passer à la casserole, je ne suis donc pas surprise quand elle me demande :
—D'ailleurs, comment Edward et vous, vous êtes rencontrés ?

Heureusement, nous avons abordé le sujet plus tôt, dans la voiture, je récite donc l'histoire que nous avons inventé :
—A un vernissage d'une de mes amies. Il faut croire que nous aimons tous les deux l'art moderne !

—Je suis heureuse pour Edward qu'il vous ai rencontré ! Je crois que ses aventures successives n'enchantaient pas M et Mme Neville ! elle me souffle, de sorte que je suis la seule à pouvoir l'entendre.

—Je croyais être la première à rencontrer ses parents ? je demande du même ton, heureuse d'en apprendre plus sur la vie amoureuse de mon prétendu petit ami.

—J'ai entendu qu'ils en ont rencontré d'autres, mais pas de leur plein gré si vous voyez ce que je veux dire...

Avec ce que m'a raconté Edward, sur sa passion d'importuner et de choquer constamment sa famille, cela ne m'étonnerais pas que les rencontres infortunes de ces demoiselles aient été orchestrées par ses soins. Après tout, c'est ce que nous faisons aujourd'hui mais de manière plus officielle, ce qui fera peut-être encore plus de mal à sa famille une fois la supercherie découverte. Je ne peux m'empêcher d'avoir un pincement au cœur en pensant au mal que ma présence est susceptible de faire à cette famille. Mis à part Heathcliff qui est fidèle aux dires de son cadet, les parents Neville et Margaret ne me semblent pas si terribles que ça. Il est vrai que Mme Neville n'est pas la femme la plus drole et la plus amicale du monde, mais elle n'a rien d'une diablesse, et son mari est simplement inexistant.

—Sur quoi complotez-vous toutes les deux ?! nous interrompt Heathcliff.

—Victoria me racontait comment Edward et elle se sont rencontrés. répond Margaret en tapotant délicatement le coin de sa lèvre avec sa serviette.

—Voilà un sujet qui m'intéresse également !

—Oui, racontez-nous, Edward, comment vous vous êtes connus ! s'exclame Mme Neville en posant sa cuillère.

Il prend ma main sur la nappe pour plus de théâtralité et commence :
—J'ai eu la chance de rencontrer Victoria a un vernissage d'art moderne auquel j'étais invité. Nous avons tous les deux été charmés par une des œuvres présentes et nous avons commencé à discuter de notre goût pour l'art. Enfin, rien de plus excitant que ta rencontre avec Maggie.

Je vois les sourcils de Heathcliff se froncer à cette attaque évidente, et il n'a pas l'air prêt à se laisser faire :
—Je ne savais pas que tu te passionnais pour l'art moderne Edward.

Son frère répond avec un sourire en coin :
—Il y a beaucoup de choses que tu ignores de moi. Tout comme je crois que tu n'es pas le dernier à avoir des secrets.

Il faudrait être aveuble pour ne pas remarquer la mâchoire de l'ainé se crisper et sa bouche s'entrouvrir prête à se battre. Mais Mme Neville, attentive au début de conflit entre ses deux fils, clôture la conversation avec calem :
—Voyons Edward, tu sais que ton frère est quelqu'un de très introverti, c'est même parfois une qualité ! Sur ceux mes très chers invités, j'espère que vous avez passé une bonne soirée et que ce repas vous a autant enchanté que moi !