Call me Lady

Chapitre 28.

Je n'ai pas réussi. Les yeux rivés sur le plafond de mon petit appartement, je laisse mon esprit accepter ma défaite. C'est aujourd'hui. Aujourd'hui que je vais le perdre pour toujours. Et je ne suis pas parvenue à ouvrir ce foutu carnet. J'ai été démotivé au dernier moment, quand l'idée que ces pages ne seraient après tout pas destinées pour moi s'est insinuée dans mon cerveau. Je tourne difficilement la tête vers ma table de chevet pour lire l'heure. 8h30. A cette heure ci ils doivent déjà tous êtres tirés à quatres épingles dans la grande demeure familiale et prêt à rejoindre l'église de la ville. La cérémonie ne devrait pas tarder maintenant. Après tout les mariages se déroulent le matin vers 10h, 10h30, peut-être 11h ? Je réussis enfin à m'extirper de mes draps et traîne les pieds vers ma cafetière pour me faire couler le remontant dont j'ai bien besoin. Mes yeux manquent plusieurs fois de se refermer alors que je patiente debout près de la machine. C'est le résultat de mes nuits d'insomnies à fixer le petit carnet brun plein de promesses mais aussi plein de dangers. Je soupire en saisissant la tasse brûlante. Je n'ai pas été assez courageuse et je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. Aujourd'hui cette histoire sera définitivement close et je serai obligé de passer a autre chose. Mes pas me ramènent malgré moi vers mon lit sur lequel je me laisse tomber. Je trempe le bout de mes lèvres dans le café quand un bruit dans le couloir me sort de ma torpeur. Il est immédiatement suivi par des coups contre ma porte, je sursaute. Je me précipite pour ouvrir et pousse un cri de stupeur en voyant Thomas et Sara débouler dans mon unique pièce. J'ouvre la bouche pour leur demander la raison de leur présence mais Sara ne m'en laisse pas le temps. Elle me tends une housse de protection et s'exclame :
—Faut arrêter d'avoir peur Victoria. Tu vas mettre cette robe et récupérer Heathcliff !

Je prends la robe sans vraiment réaliser. Alors que je descends le zip de la housse pour découvrir une superbe robe bleue canard, mon amie pousse Thomas devant elle :
—Tommy a été engagé comme photographe, donc tu vas y aller avec lui pour pouvoir entrer.

Puis elle sort une paire d'escarpins de son sac ainsi qu'une trousse de maquillage pleine à craquer.

—Vous avez pensé à tout... je bégaie, tout en réfléchissant à toute vitesse a une excuse pour me défiler.

—Comme ça tu n'as aucune raison de ne pas aller jusqu'au bout, réplique Sara avec un air satisfait, aller dans la salle de bain pour t'habiller !

Elle me pousse jusqu'à la salle de bain puis m'enferme dedans. J'appuie sur l'interrupteur, sonnée, mais commence tout de même à sortir la robe de la housse. Je la dépose sur le bord du lavabo pour retirer mon pyjama que je laisse en boule a mes pieds. La tenue est en fait constituée de deux pièces : une petite robe courte à fines bretelles qui me colle au corps puis une sorte de sur-robe en fine tulle foncée qui se referme comme un peignoir autour de ma taille. Je me penche vers le miroir pour mieux inspecter mon reflet. Étonnement, je me trouve belle, cela me grandit et me donne un air digne que je n'ai pas habituellement.J'ouvre la porte de la petite pièce pour faire apparaître le visage de Sara qui m'attend derrière, un pinceau de maquillage déjà en main. Elle me fait asseoir devant mon bureau et passe trente bonne minutes appliquée sur mon visage quand Thomas la presse.

—Dépêche toi, je vais vraiment être en retard ! il grogne.

J'essaie de me tourner vers lui malgré mon emprisonnement entre les mains de Sara.

—Au fait Thomas comment as-tu fait pour être engagé comme photographe du mariage ?

Ma gorge se noue sur ce dernier mot mais je fais comme si de rien était.

—A la journée plage j'ai parlé avec Margareth et quand elle a appris que j'étais photographe elle était enchantée car elle n'en avait pas encore trouvé, il explique tout en s'asseyant sur une chaise.