Je colle ma tête contre la vitre du train pour mieux apercevoir la mer se dessiner au loin. Cette longue bande bleue arriverait presque à me faire sortir de ma morosité. En effet, il a fallu des efforts à Sara pour me persuader de venir à cette ultime sortie plage. Selon Cassandra, la journée plage de début septembre est presque une institution pour tout Londonien qui se respecte. Les deux amantes ont donc organisé notre voyage en détail, comme en attestent le sac en osier rempli de sandwichs Marks & Spencer qui repose sur mes genoux et la valise pleine de serviettes et de bouées gonflables que traîne Thomas depuis notre départ de Londres. Parce que Thomas a aussi été convié à cette excursion. A la gare, ce matin il avait l'air tout aussi enthousiaste que moi à l'idée de cette sortie à Brighton. Au moins, notre humeur maussade est contrebalancée par l'excitation bruyante de Sara et Cassandra qui ne cessent de piailler depuis notre installation dans le train.
—Oh la mer ! Regarde Victoria, on voit la mer ! couine Sara en attrapant mon épaule.
Je hoche silencieusement la tête pour qu'elle me laisse tranquille et replonge dans la lecture de l'article affiché sur mon téléphone. Quelques minutes plus tard, le bleu de la mer est remplacé par le gris de la ville alors que le train pénètre dans la gare de Brighton. A peine sorties du wagon, le vent marin nous fouette et je resserre ma longue veste en lin contre moi. Le peu de personnes qui voyageaient avec nous ne tardent pas à disparaître du quai et nous nous retrouvons bientôt juste tous les quatre, avec nos affaires de plage. Et notre sensation de solitude ne fait que s'accroître quand nous nous dirigeons vers la plage qui est presque vide.
—Une institution, vraiment ? Je lâche, sarcastique.
Cassandra appuie sa main sur son crâne pour empêcher le vent d'emporter sa casquette et tire la langue, d'un air confu :
—Une institution juste chez les Neville apparemment.—Au moins nous avons toute la place que nous voulons ! clame joyeusement Sara en amorçant sa course vers le sable.
Mais sa copine la retient par le bras et pouffe : —Je sais que je suis quelqu'un de simple chérie, mais la journée plage de septembre n'est pas une simple journée plage. Nous allons là.
Elle termine sa phrase en désignant du doigt le somptueux hôtel qui trône près de la mer. Sa pierre immaculée tranche avec le gris du ciel et je peux voir d'ici les dizaines de parasols qui jonchent la plage privée.
—Alors pourquoi avons nous pris tout ça ?! je brandis le sac de nourriture, alors que nous nous dirigeons vers le batiment.
—Ça fait plus convivial ! grimace Cassandra, consciente de ses excentricités.
Quand nous pénétrons dans le hall entièrement carrelé de l'hôtel, même Thomas ne peut retenir un sifflement admiratif. Notre admiration redouble quand un majordome nous mène à l'arrière du complexe, où est aménagé un véritable espace thermal, avec une piscine à moitié sur la plage, des salles de soins et de massages de tous côtés et plus loin la plage privée de l'hôtel et ses transat rembourrés.
—Vous ne pensiez pas qu'on allait s'asseoir par terre quand même ?! s'insurge notre leadeuse tout en s'asseyant sur un lit d'extérieur surmonté d'un toit en palmier séché.
Je soupconne ce toit de davantage protéger de la pluie que du soleil, mais malgré le ciel maussade je me laisse tomber sur une chaise longue abritée par un parasol noir. Thomas jette son dévolu sur le siège près du mien puis demande timidement :
—Alors, que fait-on lors d'une journée plage ?—On se détend, soupire d'aise Cassandra en étirant ses jambes.
Thomas scrute les alentours comme un chiot perdu. Je tente quelques minutes de m'occuper avec mon portable, mais rien a faire, je m'ennuie.
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Call me Lady
RomanceVictoria quitte sa campagne irlandaise natale pour partir vivre à Londres où elle a été engagée comme journaliste dans un magasine très en vogue. Le premier dossier de Victoria est un article sur l'aristocratie britannique qu'elle doit dépeindre sou...