Chapitre 50 : Epilogue

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Cinq ans se sont écoulés depuis la dernière fois que je l'ai vu et pourtant, aujourd'hui, il semblait me suivre n'importe où. Son visage, aussi grand que mon corps tout entier, me souriait de toute sa blancheur alors que je me tenais assise à l'arrêt de bus vide. Tous les ans s'étaient la même rengaine, ses yeux en amende arpentaient chaque mur, transport ou immeuble populaire de la ville, à croire que l'anniversaire de V devenait une fête nationale. Il en demeurait, d'ailleurs, de même pour l'ensemble du groupe. La première année je m'étais effondrée à la vue de toutes les affiches de l'homme que je ne pouvais plus enlacer, puis le temps et mes efforts avaient fait leurs chemins, m'amenant, à présent, la nostalgie de nos souvenirs heureux. Je lui rendis ce sourire qu'il ne pouvait que me dédier et grimpai les marches de mon bus. Malgré le monde, je réussis à me faufiler dans un coin, coincée entre deux lycéennes et un homme d'âge mûre. Les deux jeunes filles gloussaient tellement fort qu'il restait difficile de les ignorer, captant malgré moi, des brides de leur conversation.


Fille 1 (parlant coréen) : Faut qu'on aille au Line Friends café !

Fille 2 (parlant coréen) : Celui à Garosu-gil ?

Fille 1 (parlant coréen) : Oui ! Il dise que c'est là-bas que V a le plus de chance de venir ! C'est l'évènement le plus important, c'est obligé qu'il va venir !

Fille 2 (parlant coréen) : Oh mon dieu mon dieu mon dieu, mais le bus ne s'arrête qu'à Mapo-gu !

Fille 1 (parlant coréen) : On pourra prendre le métro jusqu'à Garosu-gil.

Fille 2 (parlant coréen) : Mon dieu, mon dieu, j'espère qu'on le loupera pas. Imagine il nous voit ? on fait quoi ?

Fille 1 (parlant coréen) : Je crois que je fais une syncope, où alors je lui avoues mon am...


Tant bien que mal je tentai de détourner mon attention de leurs commérages, mais leurs voix étaient bien trop haut perchées et notre proximité trop étroite pour que je n'en fasse pas les frais jusqu'à Mapo-gu. Je ne m'en trouvais pas si mal accommodée, leurs enthousiasmes avaient quelques choses de contagieux et je m'amusais d'entendre le portrait qu'elles dessinaient de mon ancien amant. Garosu-Gil, hein ? 


Conducteur de bus (parlant coréen) : Mapo-gu dernier arrêt, tout le monde descend.


En cinq ans, mon chemin pour rejoindre GRAYCO avait également bien changé. Sun-Hi avait insisté pour garder le siège à Mapo-gu, mais le bâtiment était tout autre. Le hall d'accueil étriqué avait laissé place à un 50m², immaculé et épuré, seule l'ancienne plante verte demeurait. Sun-hi pouvait désormais se déplacer dans son bureau sans marcher sur ses piles de dossiers. Pour être précise, elle s'était mise à rouler jusqu'à eux à l'aide de son fauteuil Lario Salotti Snc, qu'elle ne quittait plus. Quand a l'équipe, elle avait plus que doublé en l'espace de deux ans. Yumi avait fini par trouver le succès grâce à un titre que nous avions travaillé des semaines durant, un hit international, très populaire spécifiquement en Asie. De grosses collaborations ont alors, vu le jour, avec Hwasa ou G-Dragon, pour ne citer qu'eux. Depuis lors, Sun-Hi avait cessé de partir à la recherche de nouveaux artistes, les aspirants idoles affluaient par eux-mêmes, tellement qu'un système d'audition fut nécessaire. GRAYCO prospérait et je n'étais pas en reste. Ce succès m'avait valu quelques coups de fils intéressants de manager ambitieux pour leurs artistes, certains plus importants que d'autres. Je les avais tous refusé, préférant me consacrer sur Yumi et GRAYCO. Ils étaient ma famille et je ne voulais pas me rajouter cette pression inutile alors que j'étais heureuse et suffisamment rémunérée avec ce que j'avais. Néanmoins, à cause du nouvel emploi du temps de Yumi, les séances studios se faisaient de plus en plus rare. Elle partait en tournée, faisait beaucoup plus d'interviews et de shooting photos..., Sun-Hi avait donc fini par me proposer ce poste de juge pour les auditions, en parallèle de mes compositions. Je jugeais le chant, en compagnie de la professeure attitrée pour les rookies. Je n'étais aucunement chanteuse, mais Sun-Hi avait réussi à me convaincre que j'avais une musicalité hors-paire, très utile pour repérer les nouveaux talents.

Meet me halfwayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant