DIX-SEPT

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Les vêtements qui m'ont été apportés me déplaisent au plus haut point. Non pas qu'ils soient laids, ils sont splendides. Mais pas sur moi. J'aurais du m'y attendre, je suis dans le domaine d'un vieil homme riche, évidement qu'il n'allait pas avoir de tenue de chasseuse à disposition. Mais j'aurais au moins aimée disposer d'un pantalon, sa petite fille aurait pu m'emmener ses vêtements à elle. Mais mes dieux. Cette robe est affreuse. Je n'en porte jamais donc en plus d'être ridicule je ne m'y sens pas du tout à l'aise. La jupe n'est ni moulante ni bouffante. Je ne sais ce que c'est. Une sorte de voile ? Ce n'est pas transparent donc je ne sais si je peux le décrire ainsi mais la texture est similaire. C'est un tissu très léger tout en étant épais. Il flotte autour de moi mais me colle au corps quand je ne bouge pas. La robe en elle-même est noire de jais et brodée de gris. J'ai l'impression d'être apprêtée pour un enterrement.

J'espère que je pourrais bientôt me changer. Je regarde ma faux avec peine, impossible de la porter. J'opte donc pour un poignard que j'accroche à ma cuisse, mes lanières en cuir peuvent être décrochées et accrochées où bon me semble, elles sont très pratiques pour ce genre de choses. Mon poignard ainsi coincé dans la lanière qui m'enroule la jambe il est impossible pour moi de le perdre peu importe mes mouvements. Je ne crains donc rien. Je laisse la jupe retomber sur mon corps, elle a le mérite de bien cacher mon arme. C'est le seul mérite que je lui trouve.

Les marches qui mènent à la salle à manger sont en colimaçon. Bâties dans le marbre et recouvertes d'un tapis mordoré, elles semblent s'enfoncer dans un trou sans fond. Bien évidement elles ont une fin et lorsque je saute la dernière marche un esprit me passe brusquement au travers. Le froid qu'il laisse dans son sillon perdure quelques secondes avant de s'évaporer dans l'air comme un mauvais rêve. Je reste immobile quelques secondes, les esprits dont j'ai l'habitude sont collants et suppliants. Ceux-ci ont simplement acceptés leurs morts, ils errent ici car ils le veulent. C'est une bien curieuse façon de hanter le monde des vivants. Je secoue la tête, sort de mes pensées. Un repas m'attends et mon ventre commence à gronder. Tout en marchant je trace du doigt les runes brillantes sur mon avant-bras. C'est ma chance de demander leurs signification.

La salle à manger est vaste, bien plus que n'importe quelle pièce de ce manoir. La table s'allonge sur plusieurs mètres, le vieil homme y est déjà assis. Il me regarde et pousse délicatement la chaise la plus proche de la sienne. Je m'y assois à contre coeur. La salle est sombre, les chandeliers au plafond brillent fébrilement, leurs flammes aussi inutiles que les pierres qui ornent les bras des luminaires. Je baisse les yeux sur mon assiette, elle est vide mais les plats sur la table eux ne le sont pas. Viande au miel, tartes salées, boissons et desserts chocolatés je me retrouve à saliver malgré moi.

"Je ne pensais pas vivre assez vieux pour un jour voir les yeux d'un chasseur pétiller ainsi." Marmonne le vieil homme à côté de moi en coupant sa viande encore saignante.

"...J'apprécie la bonne nourriture." Dis-je simplement en essuyant maladroitement mes lèvres.

Je me sers et commence à manger. Un silence particulièrement embarrassant comble le vide entre nous pendant plusieurs minutes.

"Alors...La blonde est votre petite fille ?" Engagé-je en piquant hasardeusement dans mon plat.

"Je n'ai pas d'enfants." Il s'essuie les mains dans son mouchoir et s'installe plus confortablement dans sa chaise. "C'est une garce mais je l'élève depuis qu'elle est gamine alors je suppose que ça fait de moi son tuteur.

-N'avez-vous pas eu de femme ?" Je ne réalise l'indiscrétion de ma question qu'après l'avoir posée. "Enfin, je veux dire...Vous vivez seul ici... ?

-Ne t'embarrasse pas avec des formalités, ça ne va pas très bien avec ton statut." Ricane t-il en me servant un verre de vin.

"Je ne bois pas.

Black Blood #1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant