Chapitre 43

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620 Holloway Rd, Archway

Des coups de feu. Il y a eu des coups de feu. Il a tiré. J'ai tiré. Roy est tombé. Est il mort ? Je ne le sais pas.
Al m'a emmené dans sa chambre, celle cachée derrière son bureau. Je crois avoir perdu connaissance. Ma tête me tourne. En regardant l'heure sur la montre je remarque qu'il est presque cinq heures du matin. La pièce est plongée dans la pénombre et je ne vois pas grand chose. Je cherche mon téléphone dans la poche de ma veste en cuir et il n'a plus de batterie. Comme si c'était pas déjà assez compliqué. Sérieusement...

Je me lèves péniblement et pousse le plus doucement possible la porte de la chambre donnant sur le bureau. La pièce est vide. Je pensais y trouver Al mais il n'est pas là.
Je me glisse à pas de loup dans pièce principale mais là non plus, il n'y a personne.
Combien de temps s'est écoulé depuis cette fusillade ?

La dernière chose dont je me rappelle c'est de Al me tenant dans ses bras après que j'ai tiré sur Roy. C'est tout.

L'obscurité règne et je peux retracer les évènements en un rapide coup d'œil. Le reste de mon gâteau d'anniversaire trône sur la grande table en bois, accompagné de quelques assiettes vides. Des cadavres de bouteilles sont sur les canapés et jonchent la table basse. Mais pour la plupart, ils sont éclatées au sol. On pourrait croire en ne voyant que cela, qu'il ne s'agissait que d'une soirée ordinaire qui été un peu mouvementée mais les impacts de balles ayant éventré le canapé ne trompent pas. Le verre brisé recouvre le sol et lorsque je marche, mes pas font du bruit malgré moi.
La seule lumière que je perçois provient du comptoir du bar. Une silhouette sombre est éclairée par un briquet allumant une cigarette. Un instant après la pénombre reviens.
- Tu as beau être discrète Vi, je t'entends très bien. Ne sois pas ridicule vient t'asseoir près de moi. Tu veux boire quelque chose? Histoire de finir cette soirée en beauté.

Mon coeur rate un battement lorsque je me rend compte que cette silhouette n'est autre que Edgard. Le bassiste se tourne pour me faire face et je le rejoins non sans laisser derrière moi un bruit de craquement de verre. Je m'installes sur un des tabouret en bois qui a résisté à ce massacre.
- Whisky ou Vodka ? Me demande Edgard de sa voix suave après avoir allumé la petite lumière du bar.

- Peu m'importe tu sais ... à ce stade. Je boirais de l'essence.

- Je peux te trouver ça au garage si c'est ce que tu désires.

- C'est gentil mais du Whisky fera l'affaire tout compte fait. 

Il dépose deux verres entre nous et les remplis à ras bord. Il entrechoque son verre contre le miens et le descend cul sec avant de se resservir.
Son air amusé me fait sourire légèrement. Avec son visage pâle et ses cheveux qui encadrent son regard, il ressemble trait pour trait au protagoniste de The Crow. Il est très charmant.
- Bon Vi! Qu'est ce que tu vas faire ?

- Et bien... écoutes je ne sais pas ce qu'il s'est passé. Ni où sont partis les gars. Je ne sais pas ce qu'il est advenu de Roy. Je ne sais rien. Alors pour l'instant je vais boire avec toi mon ami...

- Aïe...

J'avais l'air si attristé que ça ? J'ai tenté de ne pas laisser transparaître tout ça pourtant.
- Laisse-moi te raconter tu veux.

- Je suis tout ouïe Éric Draven.

Edgard s'assied en tailleur sur le comptoir, dégageant élégamment son manteau en cuir de manière à ne pas l'écraser. Ses bottes résonnent sur le bois et ses bagues tintent contre son verre lorsqu'il s'en saisit.
- Alors, d'abord tu l'as joué à la Jane Smith et tu as tiré sur ce connard atrophié. Il est tombé red mort et Gordon a tiré en l'air pour mettre une halte là à tout ce merdier. Il prend une gorgée de Whisky avant de reprendre. Tu t'es évanouie. Du moins ça en avait l'air. Al t'as soulevé tel Tarzan avec Jane. C'est vrai qu'en y repensant ça y ressemblait pas mal...

- Edgard tu t'égares. Sans mauvais jeu de mots.

Le corbeau pouffe de rire avant de reprendre son récit sanglant. 
- Il t'as amené quelque part et est revenu vêtu d'un gilet par balle et d'un fusil à pompe. Sauf que tout les petits bikers du rabougrit étaient venus entre temps. Al a tiré dans le tas sans réfléchir et en a tué quelques uns. Sauf que les autres en face ont tirés aussi. Un de vos gars, un chauve, a été touché je ne sais pas si il s'en est sorti.

Cornelius ....
- En voyant qu'ils étaient en mauvaise posture, les Pagans ont filés mais les Hell's les ont suivit. C'était il y a trois heures. Peut être quatre.

- Et pourquoi toi tu es là?

- Je suis resté pour te faire parvenir les mots de Al. Il m'a dit de te demander de fuir. De t'en aller. Il a ajouté que tout devenait tendu et qu'il ne voulait pas que tu sois mêlé à ça. Il y a une station de métro juste en haut de la rue. Et il m'a laissé ça pour toi.

Edgard me tend une petite boîte et j'y trouves le glock avec lequel je m'étais entraîné ainsi qu'une bague. Elle est en or rose et porte une petite pierre de quartz fumé encadrée de deux lunes. J'y trouves un petit mot écris de la main de Al. On ne perd pas les bonnes habitudes.

Je t'aime, sois à moi à jamais je t'en supplie.

Mes yeux s'emplissent de larmes et Edgard me regarde en sirotant son Wisky.
- Si tu veux mon avis tu devrais l'écouter. Il t'aime et il ne veux pas qu'il t'arrives quelque chose. Enfuis toi Vi.

Je passes la bague à mon annulaire droit, pensant que si elle devait avoir une autre place j'attendrais que Al la mette lui même, si je peux le revoir un jour.
- Plus haut dans la rue la station tu as dis ?

Edgard hoche la tête avant d'ajouter:
- Mais si j'étais toi je changerais de tenue. Les Pagans savent comment tu étais habillée, ça serait bête qu'ils te retrouvent à cause de ton look à la Effy Stonem.

Je hoche la tête et files dans le bureau de Al pour trouver des vêtements. J'y récupère un pull bleu marine semblable à celui que je lui empruntais souvent il y a quelques temps. En humant son parfum, je me rend compte qu'il s'agit de ce pull là précisément. Al l'a porté. Je l'enfiles et me débarrasse de ma veste en cuir. Je place le glock à l'arrière de mon jeans, comme l'aurais fait Al. J'attache les cheveux dans un chignon serré et redresse la capuche son ma tête.
Je passe mon poing américain dans une de mes chaussures et récupère mon téléphone sans vie ainsi que mon porte feuille avant de quitter le lieux, non sans un remerciement pour Edgard.

Bloody HandsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant