Chapitre 14

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Camille


En temps normal, je n'ai aucun mal à finir mes projets, mais là, je n'arrive tout simplement pas à les commencer. Je suis sur ma tablette graphique, stylet en main, mais rien ne vient. Je me penche pour voir Amelia, mais elle est au téléphone et gesticule beaucoup. Depuis que j'ai raccroché avec Gabriel, je ne tiens plus en place. Je me lève, impatiente, et je fais les cent pas. Je descends et sors dans la rue afin de prendre l'air, avant de remonter me servir un verre d'eau, de m'asseoir dans la salle des employés. Je suis énervée sans savoir pourquoi. J'appelle la gardienne pour faire un appel visio avec Mila. Elle est toujours heureuse quand je fais ça dans la journée, pour la surprendre. Après lui avoir fait un câlin virtuel, j'appelle Carrie pour lui annoncer ma promotion et l'invitation du week-end à l'hôtel. Elle trouve géniale l'idée de sortir en famille, Mila adorerait l'expérience, elle en est certaine.

« Room service à volonté ? » demande-t-elle un sourire dans la voix.

— Affirmatif.

— Spa aussi ?

— Certainement.

— Massage, manucure et pédicure, coiffure... week-end chouchoutage ?

— C'est l'entente.

— Je ne sais pas, Camille. Est-ce que l'on devrait se laisser gâter comme ça ? » ironise-t-elle.

— On le mérite, je trouve. Pas toi ?

— Oh tu sais, moi les hôtels cinq étoiles et tout le service qui vient avec ce n'est tellement pas mon genre. Si j'arrive habillée en gothique, tu crois qu'ils vont avoir peur ?

— Ils vont t'adorer, justement !

— Pourquoi ? C'est quoi la contrepartie ?

— Ah. Je ne te l'ai pas dit. Je participe à la séance de signature, apparemment j'ai des fans et ils insistent pour me voir.

— Ma Camille a son public, ses premiers fans. Je suis heureuse pour toi, mon cœur.

— Merci amour. Il y a autre chose... Gabriel voudrait t'engager pour le week-end.

— Pour faire quoi ? Hôtesse ou pour servir au bar ?

— Il veut La Vampire. Il a fait un casting, mais n'est pas satisfait. Il veut l'original, donc tenues et accessoires !

— Comme une mascotte ? Je dois faire quoi ?

— Bah... je n'en sais rien en fait. Être là, menaçante, enjôleuse, buvant du sang. Des trucs de vampires », suggérégeais-je.

— Elle est comment dans le livre ? C'est une méchante, une tordue ?

— Je ne l'ai pas lu. J'avais les grandes lignes directrices. Elle est ancienne, origine inconnue, Europe de l'Est ou nordique. Il ne faut pas l'emmerder, elle a un caractère bien trempé et choisi toujours d'attaquer en premier. C'est aussi une amoureuse, une romantique.

— Mouais... je ne suis pas convaincue.

— Tu n'es pas obligée, tu sais.

— Ah mais je vais le faire, c'est clair ! Je vais te bricoler un truc, tu vas voir, les médias font te faire un buzz là-dessus.

— Vas-y, dis-moi.

— Imagine, tu discutes avec tes fans, tu signes des autographes. J'arrive, je te prends le bras pour te caresser, puis je te mords en faisant gicler du sang. Ensuite je m'attaque à ton cou. Du sang coulera, bien sûr. Je montre mes crocs et je disparais. Je vais te bricoler du faux sang dans une petite poche, un peu de fond de teint, personne ne verra rien jusqu'à ce que ça gicle. De simples effets spéciaux.

— Tu es diabolique.

— Vampirique ! Il faudra que tu fasses semblant de t'effondrer, que les gens aient un doute et paniquent un peu. Ensuite je reviens brusquement, tu te relèves, on salue et voilà.

— Génial. Par contre, si c'est un franc succès, on va au Salon du livre. Il faudra encore jouer à La Vampire.

— Je ne joue pas, Camille, je suis une vampire... là tu imagines que je t'hypnotise », dit-elle en riant. « Allez, je suis partante. »

« Vous avez votre vampire » textais-je à Monsieur Duval après avoir raccroché.

Lorsque Amelia sort de son bureau, je me dresse droite comme un suricate, à l'affût. Elle me voit, me sourit, me fait signe de la rejoindre dans la cuisinette. Dire que je me précipite serait vraiment exagéré. Je marche, rapidement c'est vrai, mais je reste digne et je ne cours pas, enfin presque pas.

« Comment va ma Camille aujourd'hui ?

— J'ai dû mal à me concentrer. Monsieur Duval m'a appelé.

— Oui, c'est vrai... j'ai oublié de t'en parler », dit-elle en jouant avec mes nerfs. « Il a vaguement mentionné une promotion.

— On s'en fout de ça. Je te parle de l'atelier.

— Je te reconnais bien là », me sourit-elle.

« Ça va être génial !

— Je sais, il m'a donné le projet. On va même faire des stages et des cours d'été. Tu vas former la prochaine génération de graphistes, repérer les talents. Tu vas aussi faire une mise à niveau des graphistes en place, ils vont devoir s'adapter à toi. S'ils n'y arrivent pas, il faudra les remplacer. Ton travail va changer, Madame La Directrice Artistique.

— J'ai besoin d'un câlin Amelia, là, maintenant », soupirais-je en l'enlaçant. « Merci d'avoir toujours été et d'être toujours là pour moi. Tu m'as offert mon premier emploi, tu m'as fait confiance et regardes où on va, ensemble. Je t'aime Amy.

— Tu ne le dois qu'à toi et ton travail, Camille. C'est mérité.

— Je dois t'avertir pour la séance de signature. Carrie va faire La Vampire, elle va faire un truc spécial, ça risque de faire un peu de bruit sur les médias sociaux, genre... il y aura des dents sur ma gorge et du sang.

— Belle publicité en effet », rit-elle, « tu fais bien de me prévenir, on ne sera pas pris au dépourvu comme ça. »

Sortant de la cuisinette ensemble, tous les employés de l'open space se lèvent et applaudissent. Il me faut quelques secondes pour comprendre qu'ils viennent de recevoir la note de service concernant ma promotion.

« Félicitations, Camille », se joint à eux Amelia.

Je souris, je rougis, je bafouille quelques mots, je pleure bien évidemment. C'est ce genre d'émotion qui vient me chercher le plus, l'affection des autres. C'est mon carburant, mon énergie. C'est ce que je vampirise chez mes amis et collègues.

« S'il vous plaît, temporise Amelia, j'ai une annonce à vous faire. Donc, « commence-t-elle alors que les applaudissements et sifflements cessent, « comme vous le savez maintenant, Camille vient d'être nommée Directrice Artistique du groupe. Cette promotion aura un impact sur notre département. Monsieur Duval, appréciant comme nous son travail, a de grands projets pour elle, un genre de top-chef ou de the Voice du graphisme. » Plus je l'écoute, plus je deviens cramoisie. « Bref, il commence à chercher un nouvel endroit pour relocaliser nos bureaux, nous rapprocher du centre, quelque chose de plus grand, afin que Camille puisse donner des cours, faire des stages avec des enfants, des ados.

— Elle va inspirer des jeunes, c'est bien », entends-je au fond, reconnaissant la voix de Caroline de l'accueil.

« Exactement. Donc, attendez-vous à ce que nous quittions ces bureaux prochainement. Le numérique étant une partie de l'avenir du livre, je vais trouver un moyen d'inclure notre expertise dans ses cours, vous serez donc aussi à contribution. »

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Myka

Mon adorable BossOù les histoires vivent. Découvrez maintenant