Le secret de Lenora (Malec AU)

Chapitre 30

‹ Magnus ›

Contrairement à la veille, ce matin je me suis levé assez tôt et ai quitté la chambre d'Alexander pour le laisser dormir. Bien qu'il soit tôt, c'est encore plus tard que ce dont j'ai l'habitude et je me sens assez reposé même si cette nuit a encore été, disons, agitée. Après être passé dans ma chambre pour me changer, je décide de me rendre dans les cuisines. Je redoute encore un peu de croiser Iris mais il faut bien que je mange car, je l'avoue, je compte encore m'entraîner à utiliser ma magie ce matin. Nos récentes découvertes m'intriguent à un point que je n'aurais pas cru possible. Les eons étaient tellement puissants, et pourtant chacun des livres ne parle que de leur générosité et de leur envie d'aider leur peuple à vivre au mieux, dans de bonnes conditions. Même les plus pauvres. Alors pourquoi ont-ils été massacrés ?

Comme je m'y attendais, quand j'entre aux cuisines, je tombe presque nez à nez avec la gouvernante qui fronce aussitôt les sourcils en me voyant. J'ai envie de lui faire remarquer que son plaisir est partagé mais, comme toujours, je me tais. Je l'ignore et me dirige vers la table encore garnie pour les femmes de chambre qui n'ont pas encore déjeuné, occupées qu'elles sont à préparer le lever de nos maîtres et des invités. J'attrape donc une pomme rouge et un petit pain encore tiède, mais quand je me retourne pour repartir, Iris est devant moi.

— J'aimerais vraiment savoir comment tu t'y es pris pour entrer dans les bonnes grâces du roi Robert.

— J'ai toujours été dans ses bonnes grâces, m'entends-je répondre un peu malgré moi. Je fais bien mon travail et je suis respectueux envers tout le monde.

Elle écarquille les yeux, choquée que j'ose lui répondre. Pourtant, c'est la vérité, la reine a toujours été la seule à me mépriser, le roi a toujours été bon envers moi.

— J'aimerais passer, continué-je comme elle ne bouge pas.

— Ne te fais pas d'idée, tu ne fais pas partie de leur monde.

— Je n'ai jamais dit que c'était le cas. Et vous n'en faîtes pas partie non plus. Rappelez-moi, où vous êtes-vous réveillée, hier matin ?

Les murmures derrière elle la font bouger, elle me laisse enfin passer, sans doute pour ne pas que les autres serviteurs m'entendent lui parler avec autant d'insolence. C'est assez jubilatoire de réussir à lui répondre enfin et sans craindre de représailles. Que pourrait-elle faire ? Je sais qu'Alexander ne lui laissera plus jamais exercer la moindre autorité sur moi et je ne me laisserai pas faire non plus.

Je ressors des cuisines et m'éclipse en direction de la porte. Quand je passe dans le hall, je croise la reine Camille et elle m'interpelle aussitôt. Je me crispe, me souvenant de la façon dont elle a parlé à Alexander hier, mais elle semble être redevenue la gentille femme que j'ai rencontrée dans les écuries.

— Où vas-tu de si bon matin ? me demande-t-elle.

— Je comptais me rendre dans les jardins.

Il me faut une seconde pour réaliser que j'aurais sans doute mieux fait de ne pas lui répondre, bien qu'elle ait l'air gentille et avenante, je me méfie un peu. Je recule d'un pas.

— Si vous me le permettez, je prends congé maintenant.

— Attends, Magnus, s'il te plaît. Je voudrais que l'on discute, tous les deux. Tu veux bien ?

Elle se rapproche un peu plus et passe son bras sous le mien. Je hoche la tête, résigné, et nous partons vers les jardins. Nous marchons durant plusieurs minutes, en silence, jusqu'à s'arrêter sur un banc en pierre. Quand elle me voit poser la pomme et le pain à côté de moi, elle hausse un sourcil.