Ils avancent à travers les dunes depuis plusieurs heures à présent. Les arrêts trop précoces des derniers jours, le refus des soldats de porter une tenue ruhnienne, les hommes qui subissent encore le contrecoup de leur faiblesse de la veille, tout cela les a retardés, mais a surtout impacté sans retour leurs réserves de vivres, et l'eau n'est pas loin de manquer.
Dans sa tenue ruhnienne bleue, précédant ses hommes, Keril rumine. Après avoir noué sur sa tête la longue bande de tissu, son époux a menti... pour la bonne cause. Sous couvert d'avoir déjà déjeuné, il a redistribué le repas qui lui était destiné aux soldats. Lui-même n'est pas capable d'un tel sacrifice, alors, que son Oméga y parvienne... Certes, Sidon n'a pas d'effort à fournir, assis dans la charrette, mais lui-même ne va-t-il pas à cheval ?
Des éclats de voix le ramènent au moment présent, et il tourne les yeux sur ses conseillers qu'il a un instant du mal à reconnaître, les prenant d'abord pour des ennemis dans leurs tenues semblables à la sienne. A l'exception d'Exef, qui arbore ces vêtements depuis plusieurs jours et a trouvé comment les porter sans paraître ridicule, les Alphas présents à ses côtés ressemblent à des enfants portant des costumes pour effrayer des monstres chimériques. S'il regrette ses pantalons de cuir qui mettent en valeur ses jambes musclées ou sa tunique sans manches et près du corps, il doit admettre qu'une fois passé le sentiment d'aberration de porter des vêtements longs et couvrants, qui plus est surmontés de cette écharpe enveloppante et longue comme trois hommes, la large tenue ruhnienne est plutôt agréable et protège du soleil avec une surprenante efficacité.
Mais ce qui le replonge dans ses pensées, est le souvenir des mains de Sidon s'activant autour de lui, frôlant sa peau, replaçant encore et encore le tissu. Concentré sur sa tâche, l'Oméga n'avait même pas remarqué qu'il l'observait, se nourrissant de son contact léger, de son doux parfum épicé, du plaisir de le voir si proche. A présent, alors que ses mains serrent les rênes de sa monture, il ressent encore la brûlure de son désir de le toucher, la tension dans ses muscles alors qu'il se retenait de tout mouvement, la sécheresse de sa bouche à vouloir posséder celle sombre de son époux.
_ Vous m'écoutez, Votre Majesté ? » sursaute-t-il de la voix d'Exef.
_ Non. Vous êtes plus avec le Prince Consort ? Ou à chevaucher avec lui ?
_ Deviendriez-vous possessif ? » le taquine-t-il.
_ Le Prince Sidon est mon époux. Mon Oméga. Et non le vôtre. » darde-t-il son regard d'or sur lui.
_ Votre Majesté, avec tout le respect que je vous dois, et avec tout celui que j'ai pour le Prince Consort, je pourrais être son père. Il est bien trop jeune pour moi ! » rit-il à gorge déployée. « Et puis, je vous l'ai déjà dit, depuis ma perte, je ne sais plus aimer.
_ Vous passez tout de même trop de temps avec lui.
_ Moins que les hommes que vous avez affectés à sa surveillance.
_ Eux passent pas leur temps à lui sourire.
_ Keril, regardez-moi. » talonne-t-il à peine son cheval pour se porter à la hauteur de son Roi et le regarder dans les yeux. « Vous ne voulez pas admettre qu'il est plus pour vous qu'une pièce sur l'échiquier de cette guerre, c'est votre choix. Pour ma part, j'estime qu'en tant que Prince, il a droit à meilleure compagnie que celle de simples soldats.
_ Je me souviens pas vous avoir autorisé pareilles familiarités. Que ce soit avec moi, ou avec lui. Et nous avons encore votre interposition d'hier à voir, Exef.
_ Il ne cherche qu'à nous aider.
_ Il cherche qu'à se venger de Parag. Tout ce qu'il fait est que dans ce but.
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La Vengeance d'un Oméga [Terminée]
RomanceAprès avoir vu sa mère être assassinée sous ses yeux, Sidon, le Prince de Ruhne, décide de fuir son royaume et de chercher de l'aide auprès de Keril, le Roi de Kaspaz, avec lequel son pays est en guerre depuis plus de vingt ans. Omégaverse médiévale