Chapitre 22 : Défaite

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Keril a beau le tenir contre lui, Sidon n'en a pas moins l'impression que son époux cherche à éviter son contact, alors qu'ils remontent la file des soldats. Est-ce dû à cette rumeur qui dit qu'il n'est qu'un imposteur ? Ou est-ce en lien avec ses paroles de la veille, quand Keril a dit que leur union n'était qu'une façade ? S'il ne doute pas une seconde de la raison des regards haineux portés sur lui, il n'arrive pas à définir ce qui tend à ce point son Alpha.

Malgré le doux parfum épicé qui monte jusqu'à ses narines dans la chaleur de cette journée, il n'arrive pas à le désirer, à souhaiter être aimable à son endroit.

Il s'était promis de ne plus laisser son époux venir sur le front. Mais pas pour le protéger, comme il l'a dit à Exef. Si la survie de son Oméga lui importe, elle n'était pas sa priorité à ce moment-là. Non, ce qu'il voulait éviter, c'était que Sidon ne reprenne la parole, qu'il se mette à nouveau en avant, qu'il soit une nouvelle fois celui par lequel arrive la victoire, sans la moindre goutte de sang... Même si lui-même apprécie de ne pas avoir à combattre. Mais être une nouvelle fois dépendant de ses paroles, dépendant de lui. Cela lui hérisse le poil.

Sans compter que, comme il vient de le lui dire, il a besoin qu'il convainque ce capitaine, qu'il se montre à lui, qu'il lui parle et le persuade qu'il est bel et bien en vie, et non exécuté par Parag, comme cet homme l'a entendu dire. Car lui-même n'a aucun doute sur l'identité du ruhnien qui porte sa marque. Sidon est trop instruit pour être autre chose que ce qu'il prétend. Et comme il le lui a déjà dit, qui d'autre qu'un Prince reclus dans son palais aurait réchappé de l'Epuration ?

Ils arrivent auprès de Mared, toujours en discussion avec son homologue retranché derrière les hautes parois de pierre ocre. Derrière Sidon, Keril est plus tendu que jamais. Si l'autre n'ouvre pas les portes, leurs vivres seront insuffisants pour qu'ils retournent en Kaspaz et leur sort sera scellé.

Sur le visage du capitaine de la frontière, l'Oméga peut lire le découragement, mais quand il pose son regard sur le nouvel arrivant, un sourire naît sur ses traits.

_ Vaïk ! Si tu m' crois pas, p't-être que lui tu l' croiras ! » désigne-t-il le jeune homme.

Son regard marron va de son allié à la porte close, guettant l'interstice par lequel s'exprime celui qui commande à ce camp. La meurtrière repérée, il se laisse glisser hors des bras protecteurs de son époux jusqu'au sol et avance sans quitter son interlocuteur des yeux. Sa bouche est sèche de n'avoir pas pu boire, son corps est faible de n'avoir que peu mangé. Pourtant, il progresse, slalomant entre les flèches plantées dans le sable, tout en retirant son chèche pour découvrir son visage, mais gardant avec soin sa gorge à couvert.

_ Regarde-moi, capitaine ! » crie-t-il pour se faire entendre de tous, aussi bien des ruhniens à qui il s'adresse, que des kaspaziens derrière lui. « J'ignore qui t'a dit que j'avais été exécuté. Même si je me doute que cette information te vient de mon père ou de mon cousin. Certainement parce qu'ils n'ont pas réussi à me retrouver, et qu'ils s'attendent à une riposte de ma part, après la mort brutale et barbare qu'ils ont infligée à ma mère, la Reine Amala.

« Et ils ont raison de craindre ma vengeance, car, tout Oméga que je sois, je ne laisserais pas ce crime odieux impuni. C'est pour cela que j'ai convaincu le capitaine Mared de se tenir à mes côtés, c'est pour cela que je vous demande aujourd'hui, à toi et à tes hommes, de nous ouvrir vos portes et de vous joindre à nous. Crois-tu que Mared et ses hommes m'auraient suivi si je n'étais pas leur Prince ?

« Sous couvert d'être le Roi, mon père multiplie les meurtres de masse, assassine quiconque se dresse sur son chemin, tout ça au nom de quoi ? De l'Epuration ? De cette aberration qui divise notre peuple, qui le détruit de l'intérieur ?

La Vengeance d'un Oméga [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant